dimanche 25 novembre 2007
Du praxinoscope au cellulo
Par Jean-Jacques Birgé,
dimanche 25 novembre 2007 à 02:19 :: Cinéma & DVD
Du praxinoscope au cellulo retrace un demi-siècle de cinéma d'animation en France de 1892 à 1948. L'ouvrage de 350 pages publié par le Centre National du Cinéma est accompagné d'un dvd où se succèdent 14 films clefs, véritables pépites, parfois extrêmement rares. J'aime beaucoup ce genre d'objets hybrides qui apportent un complément à un bouquin ou qui donne au "disque" une valeur ajoutée par un "livret" incontournable ! Dans ce cas-ci, les deux se complètent admirablement. Jetons donc un coup d'œil au dvd glissé dans un pochette en plastique collée en avant-dernière page...
Pauvre Pierrot étant une pantomime lumineuse de trois ans antérieures à l'invention du cinématographe, l'attraction d'Émile Reynaud présentée au Musée Grévin a été reportée sur pellicule ; il mourra dans la misère, après avoir précipité dans la Seine sa dizaine de "films".
Dans Fantasmagorie les mains d'Émile Cohl apparaissent à l'écran ; ce premier dessin animé de l'histoire date du 17 août 1908.
Segundo de Chomón rappelle Méliès et, la même année, son Sculpteur moderne annonce l'animation en volume.
Le Ballet mécanique de Fernand Léger est le fruit de sa collaboration avec le compositeur George Antheil et Dudley Murphy que lui avait présentés Ezra Pound ! Réalisé le plus souvent à partir de vues réelles, ce montage kaléidoscopique de 1924 est un des grands classiques du cinéma expérimental.
L'idée, chef d'œuvre provoquant de 1932 tenant de Sade et de Walter Ruttmann, sur une musique d'Arthur Honegger avec ondes Martenot, est une merveille en papiers découpés et surimpressions de Berthold Bartosch à partir des gravures de Frans Masereel. Bartosch avait collaboré avec Lotte Reiniger, entre autres sur Les aventures du Prince Ahmed.
1934. L'Histoire sans paroles de Bogdan Zoubowitch est une leçon de géopolitique asiatique à base de poupées tandis que La joie de vivre d'Anthony Gross et Hector Hoppin est un ballet euphorique, autre versant de cette époque menaçante et utopique.
Les Trois thèmes d'Alexandre Alexeïeff et Claire Parker figurent dans la sublime intégrale des inventeurs de l'écran d'épingles parue chez Cinédoc, comme le Barbe-Bleue du marionnettiste René Bertrand souvent attribué à Jean Painlevé (1938) publié par Les Documents Cinématographiques (Jean Painlevé, Compilation n°2) et Le petit soldat de Paul Grimault (1948) qui figurait dans La table tournante avec Jacques Demy en complément du Roi et l'oiseau (Studio Canal).
En 1936, La fortune enchantée du peintre Pierre Charbonnier mêle prises de vue réelles et dessins animés et les bruitages ponctuent musique et chansons. Il assurera nombreux décors de Robert Bresson depuis son premier film (Affaires publiques, deux ans plus tôt) jusqu'à Lancelot du Lac.
Dans Callisto, la petite nymphe de Diane, on retrouve Honegger, ici avec Roland Manuel qui a composé le sprechgesang de l'accompagnement. En 1943, André-Édouard Marty revisite la mythologie grecque dans un style proche de l'art déco.
Pour nous achever avec ce beau cadeau à 29 euros, on ne s'attendait pas à découvrir Anatole fait du camping d'Albert Dubout...
L'ouvrage papier accorde une page à chacun des 105 films de la programmation diffusée à la Cinémathèque Française le mois dernier, ainsi qu'un passionnant abécédaire des plus grands animateurs des débuts de l'animation.