Ce matin nous avons été réveillés par une explosion, courte, sèche. Le front polaire qui nous fait greloter interdisant les orages, j'ai pensé au gaz. C'est déjà moins brutal que le jour où une bombe m'a fait sauter en l'air à cinq heures du matin. J'avais pensé que ça y était : à force de jouer avec le feu, ils avaient réussi ! C'était il y a trente ans, j'habitais rue de l'Espérance à côté d'un café dont la vitrine venait d'être pulvérisée par quelque règlement de comptes, mais nos parents nous ayant élevés en nous répétant qu'ils n'auraient peut-être pas dû faire d'enfants à l'ère de la bombe atomique, j'ai attendu un instant la lumière blanche et la brûlure de la fatalité. Le nucléaire ne provoque plus les mêmes peurs. Nous avons jusqu'ici survécu. Les explosions sont devenues banales. On ne lira probablement rien dans la presse et le chat continuera à dormir à mes pieds sur la couette.
Je me demande pourquoi il choisit cette place, réduisant mon espace de sommeil en m'obligeant à des positions obliques ou en chien de fusil. Le coin du lit est le plus proche du radiateur, mais nous l'éteignons la nuit et entrouvrons la fenêtre, ce qui explique pourquoi nous avons entendu clairement la déflagration. Ayant laborieusement œuvré avant la naissance de l'aube - l'aube précède l'aurore - je retrouve systématiquement Scotch allongé de tout son long sur le ventre de Françoise. Il ne vient jamais sur le mien qui a pourtant perdu son bombement excessif pas plus qu'il ne se couche aux pieds de ma compagne dont la taille moindre offre un espace libre plus propice à l'extension du matou géant. Les croquettes diététiques semblent moins probantes que mon chrono-régime. J'ai perdu quatre kilos en deux mois, mais la panthère des neiges fait toujours ses huit et demi. Entre ses deux positions, il m'accompagne sagement pendant la rédaction de mon Blog, mais dès la dernière bouchée avalée, il remontera rejoindre Françoise, me laissant seul choisir le cliché qui illustrera ce billet. Passé sa mise en ligne, je me console en enfourchant mon vélo jusqu'à la boulangerie où m'attend un moelleux palmier qui me fait saliver tout le long du chemin...