Comment réunir un tel casting si ce n'est le temps d'une remise de prix, un éclair entre deux taxis et une coupe de Champagne que je ne saurais partager, n'en étant amateur ? Mateur et midinet il m'arrive de l'être lorsque je photographie ensemble Alejandro Jodorowky, Sophie Calle et Laurie Anderson sous le Palais Brongniart, tandis qu'hors-champ Enki Bilal réfléchit à la prochaine affiche pour les Qwartz de l'année prochaine. La programmation musicale avait mal commencé avec le Suédois Åke Parmerud prenant des poses emphatiques de méchant en saluant la salle avec les trois doigts des Tchetniks qui tiraient sur les habitants de Sarajevo pendant le Siège ou les textes potaches des vieux garçons de Musique Post-Bourgeoise. Le violoncelliste Gaspar Claus tira heureusement l'électro vers l'acoustique en jouant sans autre effet que celui de son archet et de sa caisse, et Macro Disc-section (Jérôme Fino et Yann Leguay) grava ses sillons distroy sur des vinyles vierges en les scratchant en direct pour une noise plus sensuelle que ne le seront jamais les machines que nous programmons. Franck Vigroux nous fit oublier le désastreux maître de cérémonie coupable d'autant d'erreurs de prononciation sur les noms propres qu'il y eut de trophées ce soir-là. Je me souviens de celui de Kurt Entschlager pour les New Media Arts puisqu'il nous fit monter sur scène en tant que membres du jury, d'Olivier Sens pour son logiciel Usine et d'Hugues Germain pour son merveilleux CD Esprit de sel, juste une pincée, très fin, une fleur légère dont la salinité tient à l'alchimie entre instruments acoustiques et manipulations de laboratoire (Césaré, dist. Métamkine). La soirée termina en beauté avec un solo de Laurie Anderson au violon électrique et harmonisant sa voix en mâle organe autour du thème de l'accélérateur de particules qui fait flipper les plus pessimistes. Enfin, après mûre réflexion, je ne confierai jamais au cartomancien Jodorowsky, président des Qwartz 2010, le soin de prédire mon avenir, ni à Calle celui de parler de qui que ce soit, si ce n'est d'elle-même. Quoi qu'il en soit, le clou de la soirée restera pour moi Bruno Letort qui me fit deux propositions enchanteresses que j'évoquerai le moment venu. Youpi ! Au-dessus, le "marché" accueillait les stands des labels de musique électronique, les éditeurs de livres, les festivals et l'on fêtait le centenaire de Pierre Schaeffer.