mardi 7 septembre 2010
Il n'y a pas de miracle
Par Jean-Jacques Birgé,
mardi 7 septembre 2010 à 08:31 :: Humeurs & opinions
Journée Lourdes et humide. Pas de miracle. Le temps semblait tourner à l'orage. La ville de Bernadette Soubirous exhalait un parfum morbide. L'angoisse des clients s'exprimait unanimement. Est-ce véritablement la dernière station avant l'autoroute ? Les auxiliaires en blanc s'affairaient autour des plus mal portants. Les chaises roulantes glissaient péniblement vers la grotte de Massabielle où les fidèles faisaient la queue pour palper la roche noire. Elles repartaient pourtant comme elles étaient venues. Autodafé du XXIe siècle, d'énormes cierges flambaient comme un bûcher. Seuls les colverts s'épanouissaient sur le gave de Pau qui traverse le site. Sans nous concerter, l'un et l'autre avons évité le contact avec la chasse d'eau. L'eau qui coule des toilettes puant la vieille urine est-elle aussi bénite ? Boulevard de la Grotte on vend toutes sortes de flacons à remplir aux dizaines de fontaines éparpillées sous la basilique de l'Immaculée-Conception. Les plus kitsch ont la forme de la Vierge avec un petit bouchon bleu sur la tête. La barre qui commençait à nous plomber les sinus était-elle due aux vibrations du sanctuaire ou étions-nous seulement affamés ? Devant un jambon de porc noir et une énorme côte de veau garnie de cèpes et de truffes je racontai à Sonia Lourdes et ses miracles, le fantastique film de Georges Rouquier, commande du Diocèse qu'il transforme en enquête à la fois sincère et pleine d'humour, sentiment résolument absent hier matin devant la piscine où attendaient sagement les pèlerins. Aux marchands du Temple qui s'égrènent tel un chapelet sur les deux côtés de la rue principale j'ai acheté une petite cloche en céramique et deux briquets à l'effigie de Bernadette. Nous avions opté pour le Palais du Rosaire, grand bazar aux prix vraiment attrayants : 2,50€ la cloche, moins d'1€ le briquet, et à partir de 5€ vous avez droit à un cadeau, en l'occurrence trois images pieuses. Mécréants à l'esprit définitivement mal tourné, nous avons fui cette ville de débauche batracienne et repris l'avion pour Paris avant que le ciel ne se gèle, grève oblige !