C'est reparti pour un tour ! Un mois de pause fait le plus grand bien, on rentre dispos, prêts à affronter le froid en se disant qu'on va se jeter dans un bon bain chaud. Cela changerait des douches rafraîchissantes des nuits clémentes de Bangkok où il faisait seulement 30°C. Mais la maison nous réserve une vilaine surprise. La chaudière est tombée en panne encore une fois. Je connais la manœuvre, démonter la face avant, essuyer le contacteur et la température remontera dans une heure. Françoise prend son mal en patience en se décidant pour un thé chaud, mais les plombs ont sauté en notre absence ! Comme le garde-manger est vide, j'en profiterai demain pour acheter des fusibles en faisant les courses. En attendant je passe la nuit à remplir la DADS de l'association, faire les comptes et trier les six mille mails qui se sont amoncelés comme autant de lignes budgétaires sur le déficit d'une année antérieure ainsi que la pile de courrier qui ressemble à des cadeaux de Noël. Le chat n'arrête pas de miauler et je n'ai pas sommeil. La mélatonine fait son effet : je ne suis pas fatigué et j'attendrai quarante-huit heures avant de fermer l'œil. Dans mon sommeil planent les effluves de notre voyage...


Mes premières lignes thaï se dessinent sous une pluie battante. J'écris couché sous une moustiquaire rose avec les vagues qui viennent s'échouer sur la plage au pied du bungalow vert pomme, couleur de toutes les maisons de l'île.


Nous passerons la nouvelle année endormis, la fenêtre ouverte sur les cocotiers, après avoir quitté Paris vingt-quatre heures auparavant. Mon intoxication alimentaire de la veille du départ n'a pas facilité le voyage. Peu dormi, rien mangé, même pas eu le courage de suivre un film malgré une sélection appétissante dont je ne jouirai qu'au retour où je m'en enfilerai cinq coup sur coup. Françoise a eu la judicieuse idée de prendre une chambre pour quelques heures dans un hôtel proche de l'aéroport Suvarnabhumi, nous permettant d'attaquer la seconde partie du voyage un peu reposés. Un Flamand nous raconte qu'il s'est offert deux heures de massage pour tuer le temps pendant la correspondance. L'avion à hélices ne peut contenir plus de trente passagers. Arrivés à Ranong nous sautons dans un speed boat qui nous emporte sur Kho P., une île encore préservée des flots de vacanciers, fêtards et touristes sexuels.


Nous nous endormons au son du sac et du ressac et nous réveillons à celui des pétards du réveillon que nous passerons dans les bras de Morphée, huitième anniversaire de notre rencontre. Les cris d'un gros gecko gris foncé me font sursauter au milieu de la nuit. Le petit dragon caché sous le toit fait autant de bruit qu'une trompe d'auto, sauf qu'ici personne ne pollue l'espace sonore. On croirait le chant d'un coq punk. Dans la moiteur du matin je termine mon premier billet, allongé sur la chaise longue de la terrasse du bungalow sur pilotis qui fait face à la Mer d'Andaman.