mercredi 13 avril 2011
Finir la musique, pour commencer !
Par Jean-Jacques Birgé,
mercredi 13 avril 2011 à 00:28 :: Musique
Qu'un jeune homme choisisse le dernier plan de la Villa Santo-Sospir pour ouvrir son blog et celui du Testament d'Orphée pour le refermer ne peut qu'entretenir ma sympathie. Le fantôme de Jean Cocteau, artiste protéiforme, se sera penché sur son berceau en convoquant une cohorte de bonnes fées qui lui communiqueront le désir d'écrire et de jouer. En analysant la fin, le jeune garçon précoce se préparait un avenir. Il a depuis grandi et ne pourra bientôt plus émouvoir ses pairs en incarnant la jeunesse si ce n'est l'éternelle, privilège des poètes. Son duo à paraître sur le label Bee Jazz avec le pianiste Benoît Delbecq se révèle déjà un petit chef d'œuvre de sensibilité et d'intelligence partagée.
Antonin-Tri Hoang, saxophoniste, clarinettiste, pianiste, compositeur, que sais-je encore, a enfin mis son mémoire en ligne. "Finir la musique", beau sujet pour le gamin qui commençait ce travail d'étude dans le cadre de son Master 2ème année au CNSMDP (Conservatoire National Supérieur de Musique et de Danse de Paris) en mars 2009 et recevra les félicitations du jury à l'unanimité l'année suivante. Qu'il me sollicite pour le diriger m'honora plus que je ne pensais l'aider. Nous eûmes quelques discussions à bâtons rompus sur la composition musicale et l'improvisation, terme qui n'exprime que la contraction du temps entre l'écriture et l'interprétation. Nous écoutâmes quelques références étoilées, entendre comme elles brillent malgré leur distance, et les commentaires du blog qu'il initia à cette occasion furent surtout alimentés par son artiste de mère, Marie-Christine Gayffier, et par ma fidèle attention. Passé le mot "fin", les illustrations représentent Eric Dolphy, Erik Satie et Marcel Proust, c'est tout dire de son inspiration comme de ses expirations.
Dans les dernières notes que je lui envoyai trop tard pour qu'il en tienne compte, la nuit où il bouclait son mémoire, je critiquai (mes termes en italiques) son évocation des frontières. La musique n'en a pas. Ce n'est pas pour délimiter l'espace qu'elles ont été inventées. L'horizon est infini. La Terre n'appartient pas aux humains, c'est le contraire. Il s'agirait plutôt de dessiner un cadre, de délimiter l'espace pour ne pas s'y perdre. J'ajoutai : tes comparaisons du premier paragraphe sont aussi sujettes à caution : le langage a une structure, ce n'est pas une fin... La durée a peut-être à voir avec les rotations de la planète, la révolution copernicienne. La fin fait peur quand le début enchante. Les interrogations d'Antonin se retrouveront dans sa musique. Lorsque vous entendrez sa ligne de anches ayez son texte à l'esprit ! Il éclaire sa pensée, son œuvre en devenir. Tenez-le à l'oreille, aux deux même, tant le monde du son jouit du relief et des perspectives. Ça s'écoute sans fin...