Les deux livres parus en 2010 que Françoise m'a conseillés se réfèrent chacun au monde du travail dans une province cruelle où la différence de classes s'exprime sans fard. Dans Le quai de Ouistreham (Ed. de L'Olivier) la journaliste Florence Aubenas décide de se faire passer pour une femme de ménage jusqu'à trouver un emploi en CDI. Avec Retour à Reims (Ed. Fayard) Didier Eribon assume ses origines prolétariennes alors que son coming out n'avait jamais concerné que son homosexualité. La première choisit Caen, le second retourne dans sa ville natale. Si Aubenas s'immerge dans la noirceur de la misère et découvre un monde tu par les médias, Eribon fait surface en cherchant à comprendre la mutation subie par les électeurs communistes tentés par l'extrême-droite. Introspections d'une sincérité absolue, les deux romans sont des pamphlets politiques remarquablement écrits qui en disent plus long sur notre époque que la lecture des journaux au quotidien. Passionnants, teintés d'humour et de mordant, il se lisent comme les meilleures enquêtes policières, parce que la vie est pour beaucoup un simple crime.