mercredi 2 novembre 2011
L’Europe des Esprits ou la fascination de l'occulte, 1750-1950
Par Jean-Jacques Birgé,
mercredi 2 novembre 2011 à 07:06 :: Expositions
La semaine dernière je suis allé en repérage au Musée d'Art Moderne et Contemporain de Strasbourg avec la percussionniste suédoise Linda Edsjö. Nous préparons un spectacle qui y sera créé le 26 janvier 2012 avec la chanteuse danoise Birgitte Lyregaard dans le cadre de l'exposition L’Europe des Esprits ou la fascination de l'occulte, 1750-1950. Huit cents œuvres et objets de vingt-et-un pays européens y sont présentés jusqu'au 12 février 2012. Nous interviendrons lors d'une nuit où sont attendus pas loin de trois mille étudiants.
Le parcours muséographique est constitué de trois volets. L'Europe des esprits, arts et littérature est réalisé par le Musée d'Art moderne et contemporain de Strasbourg. Y figurent entre autres Caspar David Friedrich, Francisco Goya, Eugène Delacroix, Gustave Doré, Victor Hugo dont la modernité picturale me surprendra toujours, Edvard Munch, Odilon Redon, M. K. Čiurlionis, František Kupka, Wassily Kandinsky, Kazimir Malevitch, Piet Mondrian, Jean Hans Arp, Paul Klee, Max Ernst, André Masson, Victor Brauner, Roberto Matta, Wifredo Lam, Jeanne Tripler, Helene Smith... Histoire et iconographie de l’occulte : un monde d’écrits et d’images a été confié à la Bibliothèque nationale et universitaire de Strasbourg et au Cabinet des Estampes et des Dessins des Musées de Strasbourg qui ont choisi Baldung Grien, Brentel, Cranach, Dürer, Schongauer, Mantegna, Jacques Callot, Piranèse...
La troisième de nos quatre interventions se tiendra au milieu des instruments de Quand la science mesurait les esprits, réalisé par le Musée Zoologique de la Ville de Strasbourg et le Jardin des sciences de l’Université de Strasbourg. Nous sommes fascinés par le baquet de Mesmer, exemplaire unique au monde (photo, en anglais mesmerize signifie hypnotiser), un tube à rayons X, un tube de Crookes, un récepteur télégraphique, un cohéreur de Branly, un photophone de Bell, etc. Nos propres instruments, cuivre, bois, peau, s'intégreront parfaitement aux dispositifs déjà mis en scène ; la voix et le corps font partie de ce laboratoire incroyable où planent les esprits de Charcot, Pierre et Marie Curie, Camille Flammarion et bien d'autres savants.
Plutôt que de rajouter une couche de sens à une programmation d'une extrême densité, ce qui reviendrait à illustrer platement les œuvres et perturber la réflexion des visiteurs déjà fortement sollicités, nous nous installons dans la nef, bateleurs sur tréteaux dès l'entrée ou officiants d'une étrange expérience, à l'écart des interprétations picturales.
Notre chambre de Swedenborg devient une attraction parmi les autres : "Répartie en quatre stations (Antichambre, Le long couloir blanc, Expérience du ciel et de l'enfer, La chambre de Swedenborg et ses fantômes), le spectacle consiste en une séance de spiritisme où trois maîtres de cérémonie utilisent leurs instruments de musique pour convoquer les esprits d'artistes qui se sont intéressés à l'occultisme. Le rôle de l'orchestre est de faire passer le public au travers du long couloir blanc qui mène à la chambre de Swedenborg, afin que chacun choisisse son paradis ou son enfer. Les spectateurs y rencontreront peut-être les spectres d'August Strindberg, Karen Blixen, Hilma af Klint, William Blake, Henry James, Benjamin Christensen, Carl T. Dreyer, Goethe, Poe, Baudelaire, Honoré de Balzac… Les cloches sonneront tant que cela peut, les voix célestes s'élèveront dans les cintres, les lumières du Tenori-on hypnotiseront les plus récalcitrants. Si le silence aurait pu être mortel, espérons que tout le monde reviendra sain et sauf de l'expérience musicale !"
Suivra un ballet de Jean-François Duroure inspiré de Rudolf Laban et un final festif qui conclura la soirée sous l'immense nef du musée. L'exposition elle-même sera transportée au Zentrum Paul Klee de Berne du 31 mars au 15 juillet 2012.