jeudi 5 décembre 2013
Plus je dépense, plus je gagne
Par Jean-Jacques Birgé,
jeudi 5 décembre 2013 à 00:10 :: Pratique
Depuis 1975 je suis scrupuleusement le conseil glané dans l'autobiographie de Jean Marais qui y prétend "plus je dépense plus je gagne". Il ne s'agit pas de jeter l'argent par les fenêtres, mais de gérer habilement les flux migratoires. Pour commencer, l'argent n'est pas fait pour être thésaurisé mais pour circuler. L'exercice tient évidemment de la marche sur le fil et ne prend chez moi son sens qu'en période de trouble. Il s'agit de créer un vide soudain sur son compte bancaire pour qu'un appel d'air produise miraculeusement une rentrée inespérée. Comme il faut pouvoir gérer le danger, cela ne peut pas fonctionner si l'on est aux abois, déjà dans le rouge. Voilà quarante ans que ce système marche pour moi, même s'il fut des temps où l'exercice était des plus périlleux. Il exige que ses pratiquants soient de bons gestionnaires, capables d'envisager les enjeux. Je me souviens avoir fait frémir ma compagne en allant acheter une télé lors de l'une des ces périodes angoissantes. Le lendemain, aucun résultat ne se faisant sentir, je retournai acquérir un lecteur VHS. Bingo ! Un gros contrat tomba aussi sec, validant ce sport dangereux.
Il me semble que c'est avant tout une question d'action, de mouvement volontaire, d'agitation nécessaire. Je pourrais comparer cela à la recherche de travail. Fut un temps où j'envoyais régulièrement mille sollicitations par la poste. Internet n'existait pas. Heureusement que les temps ont changé ! Il fallait faire imprimer une carte remarquable avec si possible une image en couleurs, la glisser mille fois dans une enveloppe, rédiger chaque adresse à la main, coller mille timbres et lécher également le rabas de l'enveloppe, plus le coup de tampon, et direction la poste... Résultat des courses : aucune réponse. Mais quelques jours plus tard je recevais un coup de fil me proposant une grosse affaire. Or la proposition émanait d'un quidam à qui je n'avais rien envoyé. Le constat impliquait que si je n'envoyais pas mille sollicitations la 1001ème ne se manifestait pas. Je n'ai jamais pu expliquer rationnellement cette synergie, mais la magie n'opère jamais que si l'on aide la chance à vous sourire. Ainsi, dans les périodes d'inquiétude budgétaire, j'applique le conseil de Jean Marais, certes avec la plus grande circonspection, mais confiant dans l'existence des miracles. Car fut aussi un temps où je n'avais pas de quoi m'offrir un croissant lorsque j'en avais envie...