L'arbre en poche, le nouvel album de Claire Diterzi, retrouve la folie de Tableaux de chasse, mais la chanteuse s'efface souvent derrière le contre-ténor congolais Serge Kakudji. Artiste pluridisciplinaire, elle en a écrit les textes et composé la musique lors de sa résidence à la Chartreuse de Villeneuve-lès-Avignon et chez elle où elle a réalisé elle-même les enregistrements de même qu'elle programme ses machines et joue des claviers, de la guitare, des kalimbas... Elle a même mis en scène le spectacle d'où cette suite de douze scènes est tirée. Les critiques apprécient rarement les touche-à-tout qu'ils affublent du suffixe "de génie" lorsqu'ils sont bienveillants. En 2010 Claire Diterzi avait été la cible d'une cabale honteuse de la part de certains compositeurs "contemporains" lorsqu'elle avait obtenu une résidence à la villa Médicis de Rome. Une femme c'est déjà difficile à admettre dans le cénacle machiste, mais une chanteuse de musique populaire, avec des origines paternelles kabyles qui plus est, leur paraissait intolérable ! Or l'artiste cultive soigneusement la recherche dans ses facéties vocales comme dans ses arrangements instrumentaux, et L'arbre en poche est une œuvre osée qui peut revendiquer le statut d'expérimental tout en pouvant séduire un plus large public.


Inspirée par Le Baron perché, elle en tire l'anagramme qui donne leur titre à l'album et au spectacle, après avoir essayé Arche bien drôle, Rebel chaperon, L'herbe Prozac, Branche éplore, Bar Léon Chéper, Proche branlée pour contourner le refus des droits du roman d'Italo Calvino ! Elle aime jouer sur les mots pour éviter les maux qui l'ont fait souffrir. Les clins d'œil érotiques ou gentiment provocateurs conjurent les sorts jetés par de vilaines sorcières. Sa révolte fustige les dégâts monstrueux que l'homme inflige à la nature, sa sensibilité laissant entrevoir qu'elle-même s'y fond et s'y confond. Sa voix se multiplie par la puissance des harmoniseurs. L'électro se teinte de sons anciens, créant un nouveau baroque où s'envole la voix sublime de Serge Kakudji...

→ Claire Diterzi, L'arbre en poche, cd Pias, 15,99€