jeudi 5 décembre 2019
Art en grève
Par Jean-Jacques Birgé,
jeudi 5 décembre 2019 à 03:02 :: Humeurs & opinions
Que se passe-t-il aujourd'hui ?
Ce 5 décembre, c’est jour de grève. Cette date marquera le départ d’une mobilisation que nous espérons puissante. La raison de cette grève ? La réforme des retraites, qui pourrait porter un coup fatal à la Sécu. Le contexte ? Depuis 2016, la lutte n’a jamais cessé : loi Travail, ordonnances Macron, réforme de la SNCF, justice climatique, mouvements féministes, antiracistes, Gilets jaunes, mobilisations étudiantes, mouvement des sans-papiers.
C’est quoi cette réforme ?
Comme la santé, la retraite, c’est la Sécu. Dans le régime général, la pension est la poursuite du salaire de référence. Les militant·es qui ont bâti ce système ont commencé à déconnecter le salaire de l’emploi en socialisant les ressources dans une caisse commune. Contre cette avancée, le gouvernement entend imposer un système de retraite par points qui calculerait le montant des pensions en fonction d’un simulacre d’épargne individuelle. Tout au long de sa carrière, chaque travailleur·euse cumulerait des points qui lui permettraient, le moment venu, d’obtenir la stricte contrepartie de son « mérite ». C’est une individualisation de la protection sociale qui met fin au droit au salaire pour les retraité·es.
Pourquoi se mobiliser en tant que travailleur·euses de l’art ?
En attaquant les droits sociaux les plus avancés (ceux des fonctionnaires et des salarié·es du privé), cette réforme va parachever une politique libérale qui tire tout le monde vers le bas. Nous avons les mêmes intérêts que ces travailleur·euses qui, dans les différents secteurs de la société, vont se mobiliser pour défendre des droits remis en cause au nom d’une idéologie qui confond intentionnellement libéralisme économique et liberté individuelle. Pour des raisons historiques, les artistes sont hélas à l’avant-garde de l’absence de protection sociale et, au nom de leur passion ou de leur engagement, voient ainsi la plupart de leurs activités être non reconnues comme du travail. C’est pourquoi notre lutte pour faire reconnaître nos activités comme productrices de valeur économique peut être profitable à tou·tes et permettrait de combattre cette idéologie qui tente de nous faire croire que l’absence de protection sociale favorise la « liberté », la « créativité » ou « l’autonomie ».
Comment faire grève ?
Pour les salarié·es du privé (salarié·es du secteur associatif et des entreprises culturelles) : n’importe quel·le salarié·e peut faire usage de son droit de grève. Pas besoin de préavis, il suffit de ne pas venir bosser. La justification peut être donnée à votre employeur a posteriori.
Pour les salarié·es du public (fonctionnaires du ministère de la Culture, enseignant·es en ENSA ou en fac, contractuel·les, etc) : plusieurs syndicats ont déposé un préavis national. Vous avez le feu vert.
Pour les indépendant·es : en théorie, vous faites ce que vous voulez. En pratique, à vous de juger en fonction de votre situation actuelle. Plusieurs modalités sont envisageables : programmer une réponse automatique sur votre boîte mail (nous allons faire circuler un visuel « Art en grève » sur les réseaux sociaux), en cas d’interruption de votre activité le 5 décembre, en préciser les motifs et vous joindre à la manifestation la plus proche de chez vous, etc.
Pour les artistes-auteur·rices : la situation est la même que pour les indépendant·es, l’essentiel étant de faire en sorte que votre grève soit visible : encart sur votre site internet, communication sur les réseaux sociaux, décrochage d’une de vos œuvres exposées, port d’un brassard inspiré des méthodes des soignant·es (du type « artiste en grève »), blocage d’un événement culturel, etc.
Pour les étudiant·es : toutes les actions matérielles (assemblées générales, blocages) ou symboliques qui vous sembleront pertinentes.
Dans tous les cas de figure : Nous appelons les travailleur·euses de l’art à se fédérer, à se rapprocher d’un syndicat de lutte (CGT, CNT, CNT-SO, FSU, Solidaires, etc) et/ou de l’un des collectifs signataires de cet appel. On est toujours plus fort·es ensemble, dans la solidarité et le partage d’informations juridiques et politiques.
J'ajoute : "ou de n'importe quelle autre manière !"