Les lignes qui suivent ont été écrites la semaine dernière alors qu'il faisait extrêmement chaud. La température est tombée, mais ce n'est que partie remise. Très probablement en pire, puisque les gouvernements ne font rien, cédant aux industriels adeptes d'un capitalisme criminel et suicidaire, ou tout simplement dans le déni de la crise climatique dont nous ne percevons que les premiers soubresauts...

Jonathan avance que le seul moyen d'éviter les moustiques est de laisser le ventilateur tourner toute la nuit. Sa solution est efficace, mais d'une part elle est énergivore, d'autre part le moteur fait du bruit. En Asie, je préférais toujours une chambre avec palles plutôt que ce maudit air conditionné qui pollue nos bronches autant que le reste. Or ici, à la maison, on ne peut pas rêver mieux que la moustiquaire avec ses voiles prometteuses de mille et une nuits. J'ai installé un cadre en bambou que je remonte l'hiver et auquel j'accroche le parallélépipède blanc à la première piqûre. C'est donc après une nuit cloqueuse et gratteuse que j'ai compris que la saison de la chasse était ouverte. À l'extérieur du baldaquin les raquettes électriques sont prêtes. La moustique est l'un des rares animaux pour qui je n'ai aucune empathie. J'avoue apprécier la détonation lorsque le culicidé tente la traversée des mailles métalliques.
S'il faut m'empêcher de dormir, les chats s'en chargent. 3 heures du matin. Django est monté sur le lit pour jongler avec une souris. Je le fiche dehors, lui et sa proie. Jusqu'ici il avait toujours préféré la moquette claire du salon. C'est là qu'il la croque. 4 heures. Au tour d'Oulala de gratter à la porte parce qu'évidemment elle est fermée pour empêcher les agapes félines. 5 heures. Tous les deux font des glissades sous le lit sur le plancher bien lisse. Je rêve de nuits sans à-coup, où je dormirais d'une traite. Même si j'ai appris que les nuits complètes étaient une invention récente. Avant l'électricité et l'industrialisation, les gens se levaient une ou deux heures au milieu de la nuit, vaquaient à leurs occupations, professionnelles, ménagères ou amoureuses, et repartaient se coucher. C'est ce que je fais en cas d'insomnie. J'avais passé du temps à recouvrir de baume du tigre les démangeaisons. Rien ne sert de se tourner dans tous les sens. Les prochaines nuits auront le parfum de Shéhérazade.