Raves comme chou et céleri qui étaient tous les deux au menu de midi, mardi 30 Mai, pour recevoir mes nouveaux invités, la tubiste Fanny Meteier et le bassiste Olivier Lété. Raves comme une free party où le public est aussi nombreux qu'il le souhaite puisque nous avons joyeusement enregistré un album comme tous ceux qui l'ont précédé, gratuit en streaming ou en téléchargement. Raves comme une succession de rêves éveillé. Et, comme souvent lors de ces Pique-nique au labo, nous avons composé instantanément les pièces en tirant aléatoirement les cartes du jeu Oblique Strategies de Brian Eno et Peter Schmidt qui chaque fois donne son titre au morceau et devient la partition de ce qui est communément appelé une improvisation collective. Les dix pièces sont présentées dans l'ordre où elles ont été interprétées et je les ai mixées dans la foulée les deux jours suivants, mais j'attendais le feu vert de mes camarades pour annoncer leur mise en ligne...


Après nous être installés, nous avons joué de 11h à 17h, avec une longue pause pour le déjeuner. La veille j'avais préparé un céleri-rave coupé en tranches fines et massé à l'huile d'olive, fleur de sel et graines de coriandre, suivi d'un chou-rave cuit au four à 170° pendant trois heures. Ne pas oublier de le poignarder une vingtaine de fois avant de l'enfourner. En le servant j'ai oublié de l'arroser de citron comme le conseille Ottolenghi. Pour ce menu végane j'avais ajouté des lentilles vertes à l'huile de noisette et vinaigre de pin et kaki. Sorbets et glaces terminaient le repas selon la tradition de la maison. La musique, comme la cuisine, sont affaire de gens sérieux, et nous avons donc bien rigolé pendant cette journée exigeant la plus grande concentration. Mes deux hôtes furent aussi inspirés qu'adorables.


Si Fanny s'est parfois servie de son tuba de manière peu orthodoxe, elle s'est aussi amusée avec un jouet qu'elle avait toute petite et qu'elle a trouvé dans ma collection que j'assimile plutôt à une boîte à outils. Lorsqu'on appuie sur la tête de Gédéon les billes sautent aléatoirement dans tous les sens. Elle aime certainement les objets un peu désuets qui tranchent avec son magnifique instrument, comme mon monocorde fabriqué dans une boîte de sardines. Elle a également feuilleter un bouquin et fait craquer ses doigts !


Mais elle a surtout soufflé dans le gros cuivre, mélodiquement, rythmiquement, timbralement, dialoguant avec Olivier qui avait apporté son ampli et deux basses dont une fretless, et ma pomme évidemment, entouré de dizaines d'instruments électroniques et acoustiques. Comme toujours je me sers essentiellement de sons échantillonnés contrôlés au clavier, mais j'ai adoré y mêler de la synthèse numérique, la trompette à anche, une flûte, des guimbardes, l'erhu, l'Enner (un synthé analogique russe fonctionnant par contact, les tensions passant par le corps) et une vieille boîte à musique récupérée chez ma tante. Olivier assurait l'homogénéité de l'ensemble, comme un filet phosphorescent aux grosses mailles pour récupérer les acrobates qui s'y vautrent. Les cartes que nous avons tirées à tour de rôle nous ont emmenés sur un sentier plutôt calme et tendre. On ne peut réellement en jouir qu'avec de bonnes enceintes restituant les graves, ou au casque. J'ai évidemment eu du fil à retordre au mixage pour faire ressortir les deux basses sans faire exploser mes haut-parleurs. Raves dure 91 minutes.

→ Birgé Lété Meteier, Raves, GRRR en écoute et téléchargement gratuits sur Drame.org, également sur Bandcamp