Le train qui nous emmène à Aguas Calientes roule en moyenne à 25 km/h. En France on appellerait cela un tortillard. Il faut quatre heures pour faire 90 km ! Des enfants hurlent. Le responsable du wagon nous sert un gobelet d'eau. El condor passa est diffusé en boucle. Je déteste ce genre de musique. Que c'est bon quand ça s'arrête ! Ailleurs nous entendrons des musiques péruviennes autrement plus variées, même si Yma Sumac reste étonnamment absente.


Cette ville artificielle fut construite pour alimenter Machu Picchu. Elle est constituée d'hôtels, de restaurants et de vendeurs d'artisanat local. Les rues ressemblent aux travées d'un énorme magasin de souvenirs. Nous avons bien fait de choisir la visite de 7h du matin, pour faire la queue dès 5h30 au bus qui monte à l'une des sept merveilles du monde. Elle est si longue, je n'en vois pas le bout, que celle de la Tour Eiffel semblerait minuscule.


Pourtant nous arpenterons Machu Picchu sans presque personne. À un ami qui le remarque en regardant les photos que je mets en ligne sur FaceBook et Instagram, Bernard Cavanna répond, avec l'humour dont il ne se dépare jamais, que les Espagnols les ont tous tués !


On a beau en avoir vu tant d'images, la cité inca produit un effet exceptionnel. D'abord par sa situation sur la Cordillère des Andes, ensuite pour l'état de conservation de ses ruines du XVe siècle. L'endroit est magique. On comprend pourquoi les Incas y ont construit le Temple du soleil. Souvent, pendant notre voyage, nous penserons à l'album de Tintin. C'est probablement sa lecture qui nous a transportés jusqu'ici. Combien y a-t-il fallu d'esclaves pour monter ces pierres ? Combien de sacrifices humains pour amadouer les dieux ?


J'avais illustré mon premier article avec une photo où le soleil naissait au milieu des nuages, comme un rond de fumée percé par une gloire. Je prends un peu de recul et j'intègre les vestiges de Machu Picchu et des rochers qui auront peut-être été idolâtrés il y a 500 ans. Je ne suis pas mystique, mais le lieu est chargé. On y sent des forces telluriques toujours à l'œuvre.


Des lamas paissent sur les terrasses en espaliers. Le soleil monte vite. J'ai très chaud, mais je crois que c'est dû à l'effort. En Amazonie nous serons en terrain plat, et dès que je serai monté dans l'avion je retrouverai mon souffle.