Musées à Lausanne, jamais deux sans trois
Par Jean-Jacques Birgé, vendredi 8 novembre 2024 à 00:16 :: Expositions :: #5739 :: rss
Illustrer notre visite du Musée cantonnal des Beaux-Arts de Lausanne par le grand tableau de 1884 Taureau dans les Alpes d'Eugène Burnand était trop tentant, même si nous avons commencé par un selfie dans le miroir concave d'Anish Kapoor. J'aurais pu aussi commencer par La vision tisserande, 24 août 1976 de Dubuffet pour rester dans l'ambiance de la veille dans les collections de l'Art Brut...
Ce tableau peint à l'acrylique, qui fait partie de sa série Théâtres de la mémoire, est constitué de 43 pièces rapportées collées. Visiter un musée convoque évidemment la mémoire, qu'elle soit de l'instant pour plus tard ou logiquement du passé. Nous sommes ainsi faits de pièces rapportées qui s'accumulent avec les années. Certaines s'effacent avec le temps, d'autres naissent, et encore d'autres refont surface. Nous devons avancer, handicapés par le "déficit des années antérieures" que nous faisons hélas souvent subir à nos proches. En art c'est plutôt rassurant. L'artiste est parfois surpris de redécouvrir de vieilles œuvres qu'il avait oubliées. "C'est moi qui ai fait cela ?" est une exclamation récurrente que l'on tait humblement, mais qui nous soutient orgueilleusement.
La remarque la plus évidente de cette visite est l'immense présence de femmes artistes, ce dont on n'a malheureusement pas l'habitude. Ainsi dès l'entrée du troisième étage consacré à l'art contemporain est accroché Mirror Shadow de Louise Nevelson, sculptrice ukrainienne émigrée aux États Unis.
Derrière sa cimaise et les nombreux objets de William Kentridge, est projeté un film du prolifique et polymorphe artiste sud-africain. En plus des animations astucieuses jouant des superpositions la musique qui les accompagne est particulièrement intelligente, jamais illustrative, drôle et entraînante.
Au deuxième étage je ne résiste jamais devant un Rodin, et particulièrement lorsqu'il s'agit du Baiser. Je ne peux non plus m'empêcher de penser au poème Barbara de Jacques Prévert, des vers qui me font irrémédiablement craquer : "je dis tu à tous qui s'aiment, même si je ne les connais pas".
En passant devant une baie vitrée qui surplombe les voies ferrées que nous emprunterons le soir-même pour rentrer à Paris j'aperçois au fond le lac Léman. Lausanne est une ville pentue que les tramways aident à gravir...
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