La nouvelle pièce de Jacques Rebotier se joue au Théâtre de La Colline jusqu'au 24 novembre. En sortant, toutes les phrases que nous entendons ou lisons semblent être de l'auteur : "ça fait dix minutes que je t'attends !", "quelle sauce vous voulez ?", "fatal error", "réfléchissez mieux sans réfléchir plus", etc. Rebotier presse les tics de langage pour profiter de leur suc, il tord les us et coutumes de notre quotidien en les répétant tant qu'il en révèle l'absurde. Sa prosodie à trois voix parlées, souvent à l'unisson, rythmique très personnelle qu'il utilise depuis (presque) toujours, produit l'hilarité de la salle. Ciselé au rasoir sur du papier de vers à musique, le texte se moque de l'époque, critique ses à-peu-près et ses paradoxes. En 2012 j'avais vu Les Trois parques m'attendent dans le parking aux Amandiers de Nanterre, déjà trois filles à roulettes. La même année je lui avais donné la réplique tandis qu'il improvisait sa Revue de presse. Sa nouvelle pièce, Six pieds sous ciel, s'appuie évidemment sur l'actualité récente, comme découpée dans le journal du jour ou glanée au gré de la promenade. Le quotidien est la source principale de toute l'œuvre de Rebotier. Il le souligne au marqueur fluo en faisant ressortir les phrases du silence. Dans les haut-parleurs Bernard Vallèry diffuse des sons qui font glisser le documentaire dans la fiction, c'est bien de cela dont il s'agite. Au salut, Anne Gouraud, Aurélia Labayle et Émilie Launay-Bobillot soulèvent le cerveau, créé par Katell Lucas, qu'elles ont porté tout au long du spectacle. C'est délicieux avec un filet de citron. Acide.