jeudi 28 mai 2015
Quatre films qui méritent le voyage
Par Jean-Jacques Birgé,
jeudi 28 mai 2015 à 01:06 :: Cinéma & DVD
Les projections se succèdent sans que j'ai le temps d'évoquer certains films qui m'ont marqué ces temps derniers.
Antoine Schmitt, qui est un fan de films de science-fiction, m'a suggéré avec raison un film américain méconnu de 2007, The Man From Earth de Richard Schenkman. Film fauché à huis clos sans effets spéciaux, The Man From Earth repose sur un scénario brillant de Jerome Bixby qui mêle philosophie et anthropologie, métaphysique et psychologie tout en s'interrogeant sur ce qu'est une histoire, dans un suspense prenant où les dialogues sont au premier plan. Jamais la phrase de Cocteau "ne pas être admiré, être cru" n'aura été aussi bien illustrée ! Sur Wikipédia il est stipulé : "Le producteur Eric D. Wilkinson a remercié un site de piratage qui propose ce film en torrent, car cette distribution illégale a permis de faire connaître ce film confidentiel à petit budget dans le monde entier, alors qu'il n'est sorti qu'aux États-Unis. Une autre des conséquences de ce piratage est que le film est apparu dans la liste des meilleurs films du site IMDb et y a reçu de nombreuses critiques positives. Il figure ainsi dans la liste des 50 meilleurs films de science-fiction de tous les temps en septembre 2014. Le réalisateur a confirmé les propos de son producteur, et a souligné qu'ils acceptaient tous deux l'idée d'être piratés, mais en encourageant en contrepartie les internautes du monde entier, qui n'ont pas accès au DVD, à faire un don."
Armagan Uslu et Christophe Biet m'ont conseillé le second film sans m'en dire un mot. De toute manière je ne supporte pas que l'on me raconte un film avant que je l'ai vu. White God est un thriller hongrois de 2014 réalisé par Kornél Mundruczó et coproduit par la Hongrie, l'Allemagne et la Suède, dont le héros est un chien, avec alternance de scènes à la Disney et des séquences gore, l'ensemble faisant penser au statut politique de la Hongrie gouvernée par une bande de fachos racistes. Le titre White God est un clin d'œil au White Dog (Dressé pour tuer) de Samuel Fuller, autre film sur le racisme et l'intolérance où le dressage des chiens d'attaque tient une place déterminante. La première scène, à couper le souffle, rappelant le spectacle Inferno de Romeo Castellucci et Les oiseaux d'Alfred Hitchcock, n'est qu'un petit avant-goût de la suite.
Snow Therapy (titre original : Turist, et titré à Cannes Force majeure en 2014) est un drame psychologique de Ruben Östlund mettant en scène une famille suédoise en vacances dans les Alpes. Un événement traumatisant va révéler la lâcheté d'un des personnages, thème récurrent chez le réalisateur suédois, mais Play (2011), son précédent long métrage très critiqué pour ses choix communautaires (un groupe d'enfants d'origine africaine tyranisent de bons petits bourges suédois), nous a horripilés alors que celui-ci est remarquable par la finesse de son étude de caractères, au demeurant très suédois, avec des images et un montage parfaitement adaptés au scénario.
Le dernier pour aujourd'hui dure tout de même 4 heures et 11 minutes depuis que le laboratoire L'immagine Ritrovata de Bologne a ajouté 22 minutes inédites. Il était une fois en Amérique ressort donc au cinéma dans une superbe copie restaurée. La partition sonore du début du film est extraordinaire, mais elle a tendance à se diluer au bout d'un moment, avec une sirupeuse, redondante et envahissante musique d'Ennio Morricone qui n'était pas au mieux de sa forme. La dernière œuvre de Sergio Leone (1984) est passionnante, malgré un machisme assez insupportable, propre au cinéma de gangsters. Le plus époustouflant est le travail de maquillage des acteurs. Robert de Niro et James Woods, qui n'ont alors que 31 ans, jouent leurs personnages vieillis à s'y méprendre avec ce qu'ils sont devenus à 70 ans passés.
J'espère chroniquer l'inestimable coffret Nagisa Oshima publié par Carlotta, mais il contient neuf films renversants de révolte dont Le petit garçon, La pendaison et La Cérémonie, qu'il faut que je prenne le temps de voir alors que mes activités hors les murs s'accélèrent à vitesse V.