70 Cinéma & DVD - septembre 2024 - Jean-Jacques Birgé

Jean-Jacques Birgé

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lundi 23 septembre 2024

La tête dure


Lorsque j'ai commencé ce blog il y a vingt ans j'avais en tête de créer une œuvre à partir de ce nouveau medium. Étienne Mineur m'avait conseillé de m'y coller simplement, pour voir comment cela fonctionnait. Je me suis laissé prendre au jeu, pensant que je pourrais y raconter les histoires que je rabâche, m'épargnant ces répétitions un peu gâteuses. Longtemps je répondais d'aller y lire ma réponse pour ne pas ressasser. Avec le temps je me suis aperçu que la mémoire se fige et que nous finissons par toujours raconter les mêmes histoires, et surtout de la même façon. Il en est une que je me suis vu réitérer récemment.
Au cours de ma première année d'étudiant à l'Idhec (l'ancêtre de la Femis) un de nos exercices consistait à réaliser un reportage sur un sujet libre. Avec mon esprit facétieux et rebelle j'avais filmé un cocktail organisé par l'École et l'avais intitulé Idhec 72 : nouveau scandale financier. À sa projection devant des professionnels de la profession, le chef-opérateur Dominique Chapuis, m'ayant complimenté sur la lumière, m'avait demandé comment j'avais fait. À la fois humble et provocateur, j'avais répondu que je n'en avais pas la moindre idée, le laboratoire s'étant planté en développant la pellicule PlusX dans un bain de 4X. Chapuis, amusé, insista sur ce qu'indiquait la cellule (ou posemètre). Je répondis cette fois conscient de mon arrogance que j'étais de constitution chétive et que porter la caméra à l'épaule était déjà une épreuve, alors une cellule...! Le célèbre chef-op en sortit totalement dégoûté.


À la fin de l'année, le directeur des études, Louis Daquin, me fit appeler dans son bureau. Il m'expliqua qu'il n'y avait pas d'examen de fin d'année, mais que si je voulais passer en deuxième je devais savoir charger une caméra. À l'époque ce devait être une Arriflex ou une Éclair 16mm. Je passai l'après-midi à manipuler le magasin de la caméra dans un sac noir où l'on enfonçait les bras, j'ai oublié son nom, et le soir retournai montrer à Louis qu'il n'y avait plus de problème. J'ajoutai tout de même que c'était la première et la dernière fois que je chargeais une caméra et optai pour la section montage plutôt que celle de la lumière. De plus, il me semblait évident que le montage était l'école de la réalisation, section commune aux vingt-six étudiants de ma promotion. L'année suivante nous n'étions que huit à l'avoir choisie.

mardi 17 septembre 2024

L'Amazonie au cinéma


En revenant du Pérou nous avons regardé plusieurs films qui évoquent l'Amazonie, parce que leurs images me revenaient alors que nous avancions dans la forêt. Nous avons commencé par El abrazo de la serpiente (L'étreinte du serpent, 2015), chef d'œuvre du Colombien Ciro Guerra qui participera aussi à la série La frontière verte. La plante yakruna n'est pas l'ayahuasca, mais c'est bien un film magique !



Je n'ai pas revu cette série, mais j'en garde un bon souvenir... Dommage qu'il n'y ait eu qu'une seule saison. Nous étions dans la "selva" cet été, l'hiver pour les Péruviens, donc la saison sèche. Lorsque vient leur été, l'eau monte de cinq mètres et, là où nous étions, les promenades en forêt ne peuvent plus se faire qu'en pirogue...


Nous sommes ensuite passés à Sorcerer (Le convoi de la peur) de William Friedkin, adapté du roman Le Salaire de la peur de Georges Arnaud (1949) dont mon père, alors agent littéraire, avait vendu les droits à Clouzot. Mésestimé, c'est un excellent film à suspense de 1977 avec Roy Scheider, Bruno Cremer et Francisco Rabal, sur une musique puissante de Tangerine Dream. Pour Aguirre, la colère de Dieu (1972) et Fitzcarraldo (1982) de Werner Herzog, c'était un autre groupe de rock allemand, Popol Vuh, qui s'y était collé.


Par contre j'ai revu avec plaisir The Emerald Forest (La forêt d'émeraude) (1985), mon film préféré de John Boorman avec Leo The Last, à tel point qu'il est probablement à l'origine, avec les aventures de Tintin, de mon désir d'aller en Amazonie.


Il y a bien d'autres films se passant en Amazonie, mais glissant d'un sujet à un autre, Sorcerer m'a donné envie de revoir d'autres films de Friedkin comme The Boys in the Band (Les garçons de la bande) ou Killer Joe, ayant précédemment regardé La chasse (Cruising) et Police fédérale, Los Angeles (To Live and Die in L.A.). J'avais laissé de côté The Exorcist et French Connection. Comme Lucchino Visconti ou Atom Egoyan, il eut une importante carrière de metteur en scène d'opéra. Cette gymnastique exigeant des qualités d'adaptateur n'est pas étrangère à la virtuosité de ses montages...
Un dernier mot sur la forêt amazonienne : j'ai été surpris par son silence diurne au milieu duquel résonne de temps en temps le cri d'un singe ou d'un oiseau. Ses multiples dangers exigent aussi que l'on s'y colle, à l'affût du moindre bruit, du moindre mouvement de feuilles à la cime des arbres...