jeudi 24 avril 2025
Retour en Arles
Par Jean-Jacques Birgé,
jeudi 24 avril 2025 à 04:56 :: Expositions

Je n'étais pas retourné en Arles depuis 2014. J'y avais assumé le rôle de directeur musical des Soirées des Rencontres de la Photographie pendant une dizaine d'années à partir de 2001. Dire que je connais la ville comme ma poche est un peu exagéré, mais je m'y promène les yeux fermés, ce qui n'est pas une bonne idée si je veux profiter du Festival du Dessin qui s'y déroule jusqu'au 11 mai. Comme nous n'avons pas beaucoup de temps nous choisissons d'abord l'Espace Van Gogh où sont exposés François Aubrun, Jean Scheurer, Francine Simonin, Sonja Hopf, Michel Roux, Valentine Schopfer, Annette Messager et Philippe Mohlitz. Ce sont ces deux derniers qui m'emballent le plus, Messager pour ses récentes aquarelles explorant les cycles de la vie et de la mort, Mohlitz pour ses fictions gravées d’une incroyable minutie réalisées directement sur le métal à la pointe sèche. Nous filons ensuite à l'Église Sainte-Anne, place de la République, où Antoine de Galbert a sélectionné 150 œuvres de sa collection où l'art brut côtoie des sommités aussi bien que des inconnus, mais toujours d'un exceptionnel pouvoir évocateur. Après le déjeuner dans un petit restaurant caché dans une ruelle dont je me souvenais nous marchons jusqu'à la Fondation Luma qui était encore en construction à ma dernière visite.

La magnifique tour construite par Frank Gehry me rappelle tout de même le rocher des singes du zoo de Vincennes, mais le bâtiment est plein de surprises passionnantes, des murs en cristaux de sel à la vue superbe sur la région depuis la terrasse du neuvième étage sans parler de ses volumes aux lignes brisées dont il s'est fait une spécialité. Si j'ai trouvé les expositions actuelles absolument sans aucun intérêt, j'ai énormément apprécié la bibliothèque au troisième étage, appelée pour l'occasion "la Bibliothèque est en feu", et ses ressources permanentes. Un casque sur les tempes, nous découvrons cette métafiction créée et écrite par Charles Arsène-Henry dans l'espace conçu avec Dominique Gonzalez-Foerster et Martial Galfione, développant, avec d’anciens étudiants de Shapes of Fiction (Architectural Association School of Architecture, Londres), un programme de recherche dans les profondeurs de ses bibliographies. L'effet est sensationnel, univers parfaitement markerien au milieu de la bibliothèque où travaillent actuellement quotidiennement un écrivain et un chercheur et qui n'accueillent que douze personnes à la fois.

Pour m'en aller, le gamin que je suis n'a pu résister à emprunter le toboggan pour rejoindre le rez-de-chaussée. J'ai toujours adoré les gamineries des architectes, comme Le Corbusier à La Cité Radieuse, qui ont préservé une certaine fantaisie malgré ou grâce à leur notoriété. Et puis nous avons repris la route, puisque demain nous nous dirigerons plus encore vers le sud.