mardi 13 mai 2014
Jacques Perconte s'attaque aux sommets
Par Jean-Jacques Birgé,
mardi 13 mai 2014 à 00:04 :: Expositions
Pour son exposition D'est en ouest à la Galerie Charlot (jusqu'au 7 juin), le vidéaste Jacques Perconte, en s'attaquant aux sommets des Alpes et du Massif Central, franchit la frontière qui sépare le XIXe siècle du XXe. Si ses nouveaux paysages maritimes ou du Marais Poitevin rappellent encore sa période impressionniste, il survole aujourd'hui allègrement les abstractions de Kandinsky et Paul Klee, relisant l'histoire de la peinture à la lumière de ses films contemplatifs. Il est de fait à l'abri du néo-réalisme, ses traitements vidéographiques tordant le réel depuis ses débuts grâce à des compressions de plus en plus fines où le pixel remplace le grain du film en celluloïd et la pâte du peintre.
Ses algorithmes s'affinant l'artiste plasticien a fait imprimer des images arrêtées sur papier Fine Art encollé sur aluminium. Calculant la taille exacte qui permet aux pixels de n'être ni trop fin ni trop gros il a ainsi réalisé de très belles impressions numériques de 29x53 cm qui rendent merveilleusement son univers énigmatique où la couleur devient analytique, tour de passe-passe impertinent où la Terre réfléchit la matière qui la compose sous les calculs savants de l'artiste empirique.
Jacques Perconte n'est pas avare des films qu'il pose régulièrement sur Vimeo, 181 au compteur, mais il les vend aussi sous plusieurs formats, boucles sur iPad encadré, projections grand format de films génératifs sur écran vidéo ou mur blanc.
S'il a souvent payé le supplément d'Easy Jet pour un fauteuil côté fenêtre, les nuages l'ont presque toujours empêché de filmer les montagnes. En décembre 2013 le temps clair lui a permis de réaliser l'un de ses rêves. Ainsi Alpi, dicembre est sorti des limbes pour se projeter sur nos propres fantasmes, nous laissant voler à notre tour sur les ailes d'un plus lourd que l'air, voyage improbable que seul l'art procure.
Les films infinis qui ne se répètent jamais, tel aussi Le Sancy (Monts d'Auvergne), trouvent évidemment le plus de grâce à mes yeux. Toute ma vie j'ai cherché à ne jamais me répéter, créant chaque fois qu'il était possible des œuvres en mouvement à même de révéler des interprétations insoupçonnées. En marge de ce que l'on a coutume d'appeler l'improvisation j'ai trouvé en l'informatique les ressources offrant l'illusion de l'éternité. Jacques Perconte en est l'un des maîtres actuels, réconciliant l'art pictural, le cinéma expérimental et la poésie algorithmique.