70 Expositions - avril 2025 - Jean-Jacques Birgé

Jean-Jacques Birgé

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lundi 28 avril 2025

Aux MIAM et Mo.Co


Faire le détour par Sète vaut toujours le jus. Cette fois un jus d'orange puisque le MIAM, le Musée International des Arts Modestes, expose des centaines de papiers d'agrumes et d'objets qui y ont trait dans le cadre de Superbemarché. Des origines naturelles et mythologiques au commerce intergalactique on peut admirer l'imagination des graphistes vitaminés. Me revient alors une anecdote familiale qui m'inspira la chanson Toï et Moï enregistrée avec Bernard Vitet et Michèle Buirette pour le disque Carton paru en 1997. Mon père en frimeur patenté, pérorant devant ses futurs beaux-parents et voyant arriver le dessert, nous sommes en 1951, avait voulu étaler sa culture gastronomique et ses dons pour les langues étrangères. Voyant arriver sur la table des oranges Toi et Moi, marque qui existe toujours, s'était exclamé "Miam, des oranges Toï ète Moï !". On peut l'entendre sur Bandcamp.


C'est aussi toujours un régal de revoir les vitrines de Bernard Belluc, autant de petites madeleines qu'il y a d'objets, récoltés aux puces ou dans les arrières boutiques. Belluc est avec Hervé di Rosa à l'origine du musée aménagé par l'architecte-scénographe Patrick Bouchain. Le reste des collections est toujours fascinant, retour vers l'enfance et l'enfance de l'art.


Arrivés à Montpellier, nous jetons cette fois notre dévolu sur l'exposition Éprouver l'inconnu au Mo.Co, le musée d'art contemporain. Le choix d'œuvres à la thématique "art & science" est très inégal, évidemment surtout sur les plus contemporaines, allant tout de même de Bernard Palissy, Victorien Sardou, Jean Painlevé, Ernst Haeckel à Emma Kunz, Nam June Paik, Tetsumi Kudo, Kiki Smith, Anna Zemánková, H.R.Giger, Guadalupe Maravilla, Morgan Courtois... L'une d'elles nous a fait beaucoup rire. L'artiste chercheur.se americano-chinois.e Mary Maggic expose une vidéo hilarante sur un atelier d'extraction d'œstrogène à partir d'urine, pour accroître l'accès des femmes transgenre à une autonomie corporelle radicale, en se jouant des clichés des émissions de télé-réalité gastronomiques. Et puis nous avons regagné la garrigue pour nous reposer un peu avant le retour.

Superbemarché, exposition au MIAM à Sète, jusqu'au 8 mars 2026
Éprouver l'inconnu, exposition au Mo.Co à Montpellier, jusqu'au 18 mai 2025

jeudi 24 avril 2025

Retour à Arles


Je n'étais pas retourné à Arles depuis 2014. J'y avais assumé le rôle de directeur musical des Soirées des Rencontres de la Photographie pendant une dizaine d'années à partir de 2001. Dire que je connais la ville comme ma poche est un peu exagéré, mais je m'y promène les yeux fermés, ce qui n'est pas une bonne idée si je veux profiter du Festival du Dessin qui s'y déroule jusqu'au 11 mai. Comme nous n'avons pas beaucoup de temps nous choisissons d'abord l'Espace Van Gogh où sont exposés François Aubrun, Jean Scheurer, Francine Simonin, Sonja Hopf, Michel Roux, Valentine Schopfer, Annette Messager et Philippe Mohlitz. Ce sont ces deux derniers qui m'emballent le plus, Messager pour ses récentes aquarelles explorant les cycles de la vie et de la mort, Mohlitz pour ses fictions gravées d’une incroyable minutie réalisées directement sur le métal à la pointe sèche. Nous filons ensuite à l'Église Sainte-Anne, place de la République, où Antoine de Galbert a sélectionné 150 œuvres de sa collection où l'art brut côtoie des sommités aussi bien que des inconnus, mais toujours d'un exceptionnel pouvoir évocateur. Après le déjeuner dans un petit restaurant caché dans une ruelle dont je me souvenais nous marchons jusqu'à la Fondation Luma qui était encore en construction à ma dernière visite.


La magnifique tour construite par Frank Gehry me rappelle tout de même le rocher des singes du zoo de Vincennes, mais le bâtiment est plein de surprises passionnantes, des murs en cristaux de sel à la vue superbe sur la région depuis la terrasse du neuvième étage sans parler de ses volumes aux lignes brisées dont il s'est fait une spécialité. Si j'ai trouvé les expositions actuelles absolument sans aucun intérêt, j'ai énormément apprécié la bibliothèque au troisième étage, appelée pour l'occasion "la Bibliothèque est en feu", et ses ressources permanentes. Un casque sur les tempes, nous découvrons cette métafiction créée et écrite par Charles Arsène-Henry dans l'espace conçu avec Dominique Gonzalez-Foerster et Martial Galfione, développant, avec d’anciens étudiants de Shapes of Fiction (Architectural Association School of Architecture, Londres), un programme de recherche dans les profondeurs de ses bibliographies. L'effet est sensationnel, univers parfaitement markerien au milieu de la bibliothèque où travaillent actuellement quotidiennement un écrivain et un chercheur et qui n'accueillent que douze personnes à la fois.


Pour m'en aller, le gamin que je suis n'a pu résister à emprunter le toboggan pour rejoindre le rez-de-chaussée. J'ai toujours adoré les gamineries des architectes, comme Le Corbusier à La Cité Radieuse, qui ont préservé une certaine fantaisie malgré ou grâce à leur notoriété. Et puis nous avons repris la route, puisque demain nous nous dirigerons plus encore vers le sud.