lundi 30 mars 2015
Lothar and The Hand People
Par Jean-Jacques Birgé,
lundi 30 mars 2015 à 07:33 :: Musique
De temps en temps, au gré d'un nom lu ou entendu, la mémoire revient avec son lot d'émotions oubliées. En saisir un petit bout suffit pour dérouler le fil de toute une époque. Un morceau de musique, particulièrement, peut faire remonter les rêves de sa jeunesse, le sens d'une démarche, un engrenage de notre inconscient horloger. J'ai souvent cherché à comprendre comment j'en étais arrivé là, un chemin de traverse me menant très vite aux bases de mon engagement et de l'une de mes passions. Parmi les premiers émois électroniques je me souvenais de la musique tachiste de Michel Magne, des Silver Apples rapportés des USA en 1968, de Luc Ferrari entendu sur France Inter, de White Noise acheté sur sa pochette, de l'époustouflant Walter (Wendy) Carlos, du disque électronique de George Harrison, du Poème électronique de Varèse, mais j'avais oublié Lothar and The Hand People.
Leur second album, Space Hymn, commençait par Today is Yesterday's Tomorrow. Nous appelions cela de la musique spatiale, naviguant entre science-fiction et expériences sensorielles avec ou sans expédients divers. Lothar and the Hand People était le premier groupe de rock à jouer sur scène avec Theremin et synthétiseur Moog.
Réunis en 1965 à Denver, les Hand People sont contemporains des Beach Boys qui utilisèrent à la même époque une sorte de Theremin appelée Tannerin sur I Just Wasn't Made for These Times, Good Vibrations et Wild Honey. Lothar était le nom que les Hand People donnaient à leur Theremin !
Le groupe émigra à New York en 1966, enregistra seulement deux albums, Presenting... Lothar and the Hand People en 1968 et Space Hymn en 1969, et se dissoudra l'année suivante. Les voix rappellent un peu les Beatles, mais leur rock est à la fois psychédélique, folk et totalement azimuté. Lors de quelques séances mémorables, c'est ici que la mémoire refait surface, nous jouions le jeu de Space Hymn, allongés sur de profonds coussins sous la lumière noire. Far out ! Je me servis probablement de cette expérience pour pratiquer l'hypnose sur mes petits camarades de lycée, mais fatigué par l'exercice je ne continuai pas... Du moins l'hypnose. J'abandonnerai aussi les expériences lysergiques, et le dérèglement de tous les sens beaucoup plus tard, toujours pour les mêmes raisons : mon travail exige une fraîcheur que les lendemains matins brumeux empâtent. Progressivement la musique et les mots devinrent une drogue plus efficace que la chimie, fut-elle soigneusement naturelle !