70 Musique - juin 2024 - Jean-Jacques Birgé

Jean-Jacques Birgé

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vendredi 28 juin 2024

L'arbalète


Il y a quelque temps je prêtai l'arbalète l'arbalète à la violoniste Fabiana Striffler pour l'album ***, et à l'altiste Maëlle Desbrosses pour les albums Listen To The Quiet Plattfisk et Codex... Je retrouve ainsi aujourd'hui un article du 12 septembre 2012 :

Comme Nicolas Clauss [rassemblait] des images fixes et mobiles pour La machine à rêves de Leonardo da Vinci que nous [concoctions] pour iPad [l'article original date 12 septembre 2012] je lui [avais envoyé] des photographies d'instruments de musique construits par Bernard Vitet, inventeur plus proche de nous que Léonard. Ici l'arbalète en laiton et plexiglas réalisée par Bernard avec Raoul Maria de Pesters, sorte de violon alto électrique avec manche à sillets, mais on peut le remplacer par un manche plus traditionnel dont la place a été prévue dans la boîte vernissée ! La majeure partie de la musique interactive que je [composais] là [était] pour cordes, pincées ou frottées. À cet effet Vincent Segal [était] venu au studio avec son violoncelle.
Sacha Gattino m'avait indiqué un lien précieux vers un site espagnol où [étaient] présentés les instruments de musique inventés par le génial touche-à-tout toscan : orgue de papier, flûtes à glissando, flûte-tambour, percussion à roulements automatiques, crécelle à anches, etc. Leonardo aurait ainsi préfiguré le séquenceur, outil informatique dont je me servirai dans la troisième partie de l'œuvre, après le hochet de l'introduction et le mixage de surfaces de la seconde...
Par souci d'originalité ou peut-être crainte de comparaison je n'ai presque toujours joué que d'instruments rares ou construits à mon intention, qu'ils soient électroniques ou acoustiques. La trompette à anche de Vitet est ainsi devenue l'un de mes préférés avec les flûtes en plexiglas. Côté synthèse, fabriquer mes propres sons a longtemps été l'une de mes priorités, mais j'ai de moins en moins de temps de m'y consacrer, préférant me pencher sur la composition. Il faut environ une journée pour mettre au point un son, un programme qui pourra servir ensuite pendant de nombreuses années dans divers contextes. Ce n'est pas seulement le timbre dont il est question, mais la manière d'en jouer, aussi un son électronique est-il le plus souvent un instrument à part entière. Ceux que j'utilise actuellement ont le mérite de se passer de clavier et sont donc plus légers à transporter !


Il n'empêche qu'appréhender un instrument dont j'ignore tout me procure chaque fois une émotion sans pareil. Quant à Vincent, j'ai été sidéré par sa maîtrise de l'arbalète alors qu'il ne l'avait tenue qu'une fois entre les mains. Sa sonorité cinglante rééquilibre la composition interactive pour quatuor à cordes qui aurait été trop grave avec quatre violoncelles [...].

mardi 25 juin 2024

Brigitte Fontaine, 85 ans


Brigitte on t'aime. 85 ans déjà. La première fois que je t'ai rencontrée, c'était au festival de Biot-Valbonne il y a plus d'un demi-siècle, tu étais avec le bassiste Earl Freeman. Après il y eut la battue dans les bois à La Borde. J'étais très jeune, ce sont des évènements qui marquent. Et d'autres fois, grâce à Bernard. La dernière, c'était à l'occasion de Amore 529 que tu as cosigné avec Un Drame Musical Instantané et qui figure au début de notre album Opération Blow Up (index 2). La seule chanson que tu aies enregistrée en 1992, année charnière pour toi, juste avant ton glorieux come-back. Heureusement il y avait le Japon qui ne t'avait jamais oubliée. Et Bernard Vitet, jouant de la trompette comme il le fit souvent sur tes chansons. Du temps de Comme à la radio il avait remplacé Lester Bowie pour les tournées. Plus tard je vous ai entendus avec Moustaki, Areski, Rykiel... C'était avant. Tu avais annulé notre premier rendez-vous parce qu'il y avait de l'orage, tu t'étais cachée à la cave. J'avais préparé quelque chose de très délicat pour accompagner tes paroles, mais en arrivant au Studio GRRR tu nous as déclaré qu'il n'y avait plus que le rock qui t'animait. Je vous ai envoyés, Bernard et toi à la cuisine, et j'ai reprogrammé les machines pour faire un truc qui te plaise. Quelques années plus tard, pour le nouvel album du Drame intitulé Machiavel, Steve Arguëlles a remixé notre morceau avec toi sous le titre Nusch (index 7). Il avait écrit : "magie amoureuse, paradoxe temporel". Cela convient très bien à l'image que j'ai gardée de toi, quand nous étions à la brasserie en face de ton appartement sur l'île. J'écoutais tes disques à la radio lorsque j'étais minot, avec ceux de Colette Magny et de Catherine Ribeiro, mes trois Grâces ! Je n'ai jamais cessé. Il paraît que tu en prépares un nouveau. Je suis impatient. Joyeux anniversaire !

lundi 24 juin 2024

Folk & renouveau, une balade anglo-saxonne


Philippe Robert et Bruno Meillier signent un livre inattendu lorsque l'on connaît leur goût pour les musiques innovatrices. Leur étude sur le folk et ses déclinaisons actuelles, souvent empreintes de rock, est tout à fait cohérente grâce à leur ouverture d'esprit et leurs choix éclectiques.
Musicien (Etron Fou Leloublan, Les I, Bruniferd, Zero Pop, etc.), organisateur du festival Musiques Innovatrices à Saint-Étienne, Bruno Meillier est également label manager de Orkhêstra International, distributeur en France de tout ce qui se fait d'original en matière discographique. Leur locomotive est le célèbre Tzadik dirigé par John Zorn, mais ils s'occupent de plus d'une centaine de labels tels Ambiances Magnétiques, BVAAST, Cuneiform, FMP, GRRR, In Situ, Intakt, Knitting Factory, Nûba, Potlatch, Trace, Umlaut, Victo, etc.
Le journaliste Philippe Robert a collaboré aux Inrockuptibles, à Vibrations, Jazz Magazine, Guitare & Claviers et signé sept ouvrages sur la musique aux éditions Le mot et le reste dont ce remarquable Folk et renouveau, une balade anglo-saxonne.
Après un survol historique des différents courants, les auteurs ont choisi environ 150 albums pour illustrer leur propos.
Les folksongs et la musique traditionnelle anglo-saxonne n'ont jamais été ma tasse de thé, mais il n'existe aucun genre qui ne mérite qu'on s'y attache pour peu que l'on soit correctement guidé ! Le moindre rejet musical n'est qu'affaire de psychanalyse, les histoires familiales orientant fondamentalement nos goûts. Face à l'excellence on se laissera surprendre et emporter.
Traçant ma route parmi cette somme fortement argumentée j'ai pu ainsi retrouver des émotions oubliées en écoutant les albums évoqués qui avaient marqué ma jeunesse ou en faisant de nombreuses découvertes puisque le panorama débute en 1927 avec la célèbre Anthologie de la musique folk américaine publiée par Harry Smith et se développe jusqu'à aujourd'hui. Le folk s'est toujours coloré de maintes influences en se mariant, par exemple, avec l'énergie électrique du rock ou la liberté du jazz et de l'improvisation. Pendant ces 90 ans la critique sociale et politique y a rivalisé avec les élucubrations délivrées par l'alcool et les psychotropes.
Par affinité j'ai laissé tomber les classiques Peter Seeger, Woody Guthrie ou Bob Dylan, pour profiter de la voix envoûtante de Sandy Denny avec Fairport Convention ou Fotheringay, des envolées psychédéliques de Crosby Stills Nash & Young, des Byrds ou Buffalo Springfield. Mais j'ai surtout fait des découvertes en me plongeant dans Alasdair Roberts, Comus, Espers, Roy Harper, Pearls Before Swine, Peter Walker, R.E.M., The Holy Modal Rounders qui m'avaient échappé ou en dévorant coup sur coup treize albums de l'Incredible String Band qui m'avait tant plu à l'adolescence pour leur inventivité débridée et leur naturel décomplexé.
Si Folk et renouveau est bien une balade, c'est aussi une mine, un territoire gigantesque dont Robert et Meillier ont dressé la carte en s'en faisant les passeurs pour quiconque souhaite s'ouvrir sans cesse à de nouveaux paysages et se laisser porter par de sublimes ballades.

Article du 4 septembre 2012

vendredi 21 juin 2024

Illuminations


[Ce 2 août 2012, j'enchaînai] les débuts de Brigitte Fontaine (... est folle !) arrangé par Jean-Claude Vannier, Le voyage dans la lune, probablement le meilleur disque du groupe Air, les Blues and Haikus du poète de la Beat Generation Jack Kerouac accompagné par les saxophonistes Al Kohn et Zoot Sims, l'album rock de reprises Way Out West de l'hypersexy septuagénaire Mae West, et enfin Illuminations de Buffy Sainte-Marie.

En écoutant cet époustouflant disque de l'amérindienne Cree canadienne [origine contestée depuis 2023, argh !], je fais le lien direct avec le passionnant livre de Philippe Robert et Bruno Meillier, Folk et renouveau, une balade anglo-saxonne [...] (Le mot et le reste, Formes). Lorsque Illuminations est sorti en 1969 je ne connaissais que le poème God Is Alive, Magic Is Afoot de Leonard Cohen mis en musique par Buffy Sainte-Marie entendu par hasard au Pop-Club de José Artur. J'avais été marqué par l'originalité du traitement électroacoustique pour une chanson folk. C'est l'époque où je recherchais tout ce qui sonnait résolument moderne dans la pop comme les Silver Apples, White Noise, les manipulations de Frank Zappa pour Uncle Meat, Electronic Sound de George Harrison, mais aussi Pink Floyd, Soft Machine, Vanilla Fudge, etc.


Surtout connue pour l'hymne à la paix Universal Soldier et son hit Until It's Time for You to Go repris entre autres par Elvis Presley, Buffy Sainte-Marie a ensuite totalement abandonné cette voie, expulsant même cet incroyable album expérimental de son catalogue. À l'exception d'une guitare électrique sur un morceau et d'une section rythmique sur trois des derniers, tous les sons du disque, soit la voix et la guitare sèche de Buffy, sont trafiqués par un synthétiseur Buchla. Illuminations fut de plus le premier disque à sortir en quadriphonie ! Si la voix des premières chansons rappelle Joan Baez la suite ressemble plutôt à Grace Slick, la chanteuse du Jefferson Airplane, mais dans tous les cas elles se seraient envolées vers les plus hautes sphères, là où le psychédélisme vous fait complètement chavirer... D'où ces Illuminations tripantes qui donnent son titre à l'album, le sixième de cette artiste engagée, transformé par son producteur Maynard Solomon, les arrangements de l'allumé Peter Schickele et du musicien folk-jazz Mark Roth. Fortement conseillé pour léviter dans des paysages minimalistes dignes de la meilleure science-fiction !

mercredi 12 juin 2024

Brassens orchestré par Vannier


En 1993, tandis qu'il enregistrait avec nous l'album de chansons pour enfants Crasse-Tignasse, Michel Musseau m'avait parlé de son admiration pour le disque de Jean-Claude Vannier orchestrant les chansons de Georges Brassens. Ses mélodies n'étant pas ce qui me semblait le plus remarquable chez le poète, j'avais quelques doutes, mais Musseau avait tant insisté que j'avais fini par le croire, d'autant que j'avais toujours été un fan du travail de Vannier, pas seulement pour Gainsbourg et leur Melody Nelson, mais aussi pour Brigitte Fontaine, Claude Nougaro et bien d'autres. L'année suivante, avec Bernard Vitet nous étions d'ailleurs allés lui faire écouter les maquettes de Carton pour avoir son avis sur nos chansons peu ordinaires. Vannier avait, paraît-il, beaucoup apprécié, mais il nous avait plutôt démoralisé sur le potentiel commercial de notre démarche ! Nous ne nous étions pas démontés et avions continué notre aventure dont la suite ne lui donna pas vraiment tort, bien que nous n'eûmes jamais à regretter ce dont notre imagination avait accouché. [Mis à part les créations des sept dernières années où j'ai été particulièrement productif], les nombreuses chansons écrites avec Bernard Vitet sont avec les instantanés du Drame et nos pièces orchestrales ce dont je suis le plus fier.
En me promenant dans les allées virtuelles [j'avais découvert une réédition] de L'orchestre de Jean-Claude Vannier interprète les musiques de Georges Brassens. Que soit loué le camarade Michel Musseau dont j'ai toujours adoré l'humour critique et la précision musicale ! L'album commandé en 1974 par le patron de Philips pour commémorer les vingt ans d'activité de Georges Brassens, est à la hauteur de nos espérances. Certainement l'une des œuvres les plus réussies de Jean-Claude Vannier, elle respire la liberté inventive de l'autodidacte et l'intelligence de l'arrangeur tout en mettant en valeur les compositions de Brassens que j'ai longtemps cru monotones. Utilisant quantité d'instruments rares, flexatones, piano-jouets, clavier de cloches, mais aussi fanfare d'inspiration catalane, clavecin, limonaire, percussion ou cordes à la Carl Stalling, il fait preuve d'une créativité exceptionnelle et d'un humour décapant reléguant la variété instrumentale aux pires ringardises et les fantaisies de Pascal Comelade à de timides tentatives. On regrette seulement qu'aucun musicien de cet orchestre impossible ne soit cité sur la pochette, d'autant que s'y succèdent d'étonnants solistes. Je ressens le même enthousiasme qu'à la découverte des versions orchestrales de Let My Children Hear Music de Charlie Mingus arrangées par Sy Johnson, Alan Raph et le maître en personne. On se délectera donc de ces versions épatantes de Chanson pour l'Auvergnat, Les Sabots d'Hélène, Les Amoureux des bancs publics, Stances à un cambrioleur, Le 22 septembre, La Mauvaise réputation, Les Copains d'abord, Je me suis fait tout petit, Supplique pour être enterré à la plage de Sète, Jeanne, Les Amours d'antan, Bonhomme.

Article du 30 juillet 2012 (liens hypertexte réactualisés)

jeudi 6 juin 2024

Loopy Loops (Mix Me)


Je n'ose pas imaginer ce que je risque de découvrir si j'exhume mes archives du grenier. Je pense qu'y dorment autant d'œuvres inachevées que celles qui ont vu le jour. J'avais même imaginé le roman d'un groupe de musiciens en ne m'appuyant que sur ces rêves morts nés. Donc avant-hier en recherchant des sons et des musiques enregistrées pour un CD-Rom de 2001 à la demande de Sonia Cruchon qui en avait eu la charge, je suis tombé sur la version longue d'une pièce qui figurera sur Tchak !, le prochain album, totalement inédit, produit par Walter Robotka et qui devrait sortir en août sur le label autrichien KlangGalerie, dernière formule d'Un Drame Musical Instantané avec Bernard Vitet, Philippe Deschepper et Nem. Je me souvenais que Le silence éternel des espaces infinis m'effraie était une réduction d'une pièce plus longue intitulée Loopy Loops interprétée par Bernard au bugle et ma pomme aux machines, mais j'avais totalement oublié que nous avions transformé notre duo en une chanson interactive avec ma fille Elsa qui avait alors 14 ans.
C'est incroyable, les fichiers étaient prêts pour la fabrication, si j'en juge par les échanges avec le presseur et les différents documents retrouvés grâce à l'application Tri-Catalog qui tourne sur un vieux MacBook et où j'avais indexé quelques trois cents CD-R d'archives. Cette astuce me permet toujours de localiser systématiquement la plupart des fichiers de 1995 à 2011, soit la période féconde où nous inventions des objets multimédia plus interactifs les uns que les autres. La suite est copiée sur une vingtaine de disques durs de quatre à huit terras chacun.
La programmation algorithmique de Loopy Loops était entre les mains de Frédéric Durieu avec qui j'avais conçu l'objet, et le design graphique entre celles d'Étienne Mineur, qui réalise justement actuellement la pochette de Tchak !. Sur la couverture on aurait pu lire "An interactive song - Infinite variations" et "Choose your mix - Move the mouse - Play the keyboard – Do it again". Soit " À chaque utilisation, une nouvelle interprétation. Choisissez un mix, tapez sur le clavier, jouez avec la souris, recommencez... Variations infinies." Des remerciements étaient adressés à Francis Gorgé, Pierre Lavoie & Hyptique.

Pour écouter ce morceau tendre, hypnotique, en perpétuelle mutation, sorte d'hommage au Bitches Brew de Miles Davis, on ira sur le lien http://www.drame.org/blog/share/zik/Loopy%20Loops.mp3, mais il manque évidemment la voix, les effets et de nombreuses articulations ajoutées pour l'interactivité. Comme souvent, mais hélas pas toujours, j'avais rédigé le processus compositionnel que je livre ici brut et qui permet donc d'avoir une idée du type d'objet que nous fabriquions à cette époque.

Piste du continuum (stéréo) :
C’est la piste principale, elle est générative. Elle doit varier d’une interprétation à l’autre. Tous les événements s’enchaînent « cut », collés les uns aux autres sans temps morts. La synchro doit toujours être conservée, donc parfait enchaînement entre les cellules rythmiques. L’unité est de 8 secondes précises. Il y a des cellules de 2-4-7-8-12-16-18-20-22-28 mais la majorité est de 8 (les cellules basiques) ou de 16 (surtout les trompettes). Les 10 Débuts et les 10 Fins se correspondent deux à deux. Les 81 cellules (bouclables) sont le corps du récit. Les 22 articulations représentent des breaks, des refrains, au milieu des boucles. Certaines sont également bouclables.
Les 81 Cellules sont réparties en 8 catégories : 18 Drum’n Bass (commencer toujours par une de ces boucles) et 14 Fuzz (les mêmes, mais perverties), 17 Trompettes dites Tp nature et 7 Tp effet (trompettes perverties), 6 Cordes et 5 Soft’nCordes (encore plus cool), 11 Marimbas, 3 Flangers. Toutes les cellules sont bouclables (répétables) mais on évitera en général (sauf pour l’Infinite Mix) de boucler les trompettes (nature et effet). Trois modes offrent le choix entre le Radio Mix (3 minutes environ), le Medium Mix (10 à 12 minutes) et l’Infinite Mix (ininterrompu). Le Medium Mix ressemble au Radio Mix sauf qu’il est plus long et alterne plus de cellules bouclables et d’articulations (plus de couplets, plus de refrains), sept à dix couplets maximum de 4 (exceptionnellement 3) à 8 cellules. L’Infinite Mix alterne cellules bouclables et articulations (certaines sont également bouclables).
Le Radio Mix est construit selon le modèle : Début – 3 ou 4 Boucles – Articulation – 3 ou 4 Boucles - Articulation – 3 ou 4 Boucles – Fin. Comme il y a 3 moments de boucles, un est choisi dans « Tp nature » et un peu dans « Tp effet » (avec éventuellement « Flangers »), le second dans « Cordes » ou bien « Soft’nCordes » (pas de mélange des deux, choix à faire), et le troisième dans « Marimbas ». L’ordre de ces 3 couplets est variable. Mais la première cellule est toujours issue de « Drum’n Bass », et ensuite des cellules de cette série ou de « Fuzz » peuvent s’insérer dans les parties « Cordes » et « Marimbas ». Attention : on doit beaucoup plus souvent entendre « Drum’nBass » que « Fuzz », « Tp nature » que « Tp effet », « Cordes » - « Soft’nCordes » - « Marimbas » que « Flangers ».

Piste Elsa (mono) :
Il y a 20 vers chantés, chacun sous une touche du clavier (de A à P – de Q à M). Cette piste est interactive par le clavier, et générative pour le choix des pieds. Chaque vers possède 3 pieds. Exemple : sous la touche A on peut déclencher le premier vers soit « You mix me ». Le programme va choisir parmi les 7 « You », les 6 « Mix » et les 5 « Me ». Les trois pieds vont s’enchaîner sans coupure. Sous cette première touche on aura toujours ce vers-là, mais la mélodie variera (surprise !). Et ainsi de suite pour les deux rangées de 10 vers de 3 pieds (voir le texte pour l’ordre). Ici le joueur maîtrise donc le sens mais pas la musique. Les paroles étaient très simples : You mix me, I mix you, You mix here, I mix here, I hear you, You hear me, You know me, I know you, Hear me here, Here you mix / No no no, No mix here, No eye here, You mix you, You know here, I mix me, You you hear, I know me, I hear me, Here I mix.

Piste Stretches :
Les 16 stretches sont joués à la souris (sons Quicktime). Le mode est aléatoire ordonné. On ne joue qu'un son à la fois. Pour en changer il faut soit taper sur la troisième rangée du clavier, soit cela change tout seul au bout d’un certain temps à définir ou encore en fonction de l’utilisation de la souris par le joueur. Le glissement de la souris provoque des variations de la vitesse de lecture de chaque son. Sur les 16, 12 sont stéréo et 4 mono. Alors que la piste Elsa est rassurante (voix féminine, chant…), les effets du stretching sont destructeurs.

Touches spécialisées :
Flèches haut et bas = volume / Pomme-Q = Quitter / Pomme-Flèche gauche (ou aut’chose) = Supprimer la voix du clavier si on souhaite utiliser l’Infinite Mix pour accompagner son travail (même combinaison pour la remettre) / Pomme – Flèche droite = Supprimer le son des stretches pour la même raison (idem).

Ces explications me servaient à converser avec Frédéric Durieu, génial matheux qui n'entendait rien à la musique, tandis que ses algorithmes restaient pour moi du chinois. Comme pour le CD-Rom Alphabet, les modules du CielEstBleu, La Patason ou FluxTune, nous affinions au fur et à mesure à force de lois restrictives, les premiers tests ressemblant toujours à un monstrueux chaos sonore.

mardi 4 juin 2024

Hibiki par le trio San


Une, deux, trois, Japonaises. Une, deux, trois, nous irons au bois. Une, deux, trois, musiciennes. Quatre, cinq, six, cueillir des cerises. Ah, au pays de l'Hanami ? Non, à Berlin où vit la vibraphoniste Taiko Saito. La seconde à Tokyo, la pianiste Satoko Fujii, et la troisième à Strasbourg, la percussionniste Yuko Oshima. Alors San, c'est pour nous ou bien entre elles ? En tout cas, cela fait trois. Et Hibiki est le whisky japonais si réputé, mais hors de prix. Alors San, parce qu'elles trois savent se tenir ? La musique, c'est certain. Enregistrement live au Kesselhaus Berlin le 8 juin 2022. Le trio San possède une entente parfaite.
J'ai toujours adoré le jeu de Yuko avec qui j'ai eu le plaisir de jouer en 2008 du temps de Donkey Monkey. C'était leurs débuts avec la pianiste Ève Risser. Yuko a gardé cette franchise du jeu, ce plaisir de colorer ses timbres sans noyer le sushi. Rien d'étonnant à ce qu'elle s'entende avec Satoko Fujii et Taiko Saito. Elles parlent le même langage où les silences sont autant de notes muettes. Quand elles se rencontrent, piano-vibra-batterie forment un seul instrument, chacun devenant le prolongement des deux autres, du simple aux extrêmes. Une, deux, trois, compositrices. C'est construit comme ce sublime dessert tout au thé vert dont je me souviens à Omuta : les biscuits étaient surmontés de glace, une mantille de caramel au matcha recouvrait l'ensemble tenu par des gaufrettes. Le manque se fait sentir. San me fait merveilleusement voyager, tel que des papilles me poussent aux oreilles.

→ Trio San, Hibiki, CD Jazzdor Series, dist. L'autre distribution, 15€ (10€ en numérique)