dimanche 17 janvier 2010
Escroquerie à l'achat
Par Jean-Jacques Birgé,
dimanche 17 janvier 2010 à 09:32 :: Pratique
Deux couples de mes amis l'ont échappé belle. Les uns et les autres avaient un urgent besoin de vendre leur maison. Petites annonces, visites, attente, inquiétude, et puis enfin, grand soulagement, un acquéreur se présente, dans les deux cas un couple dans la soixantaine. Les choses se présentent bien, l'acheteur est emballé et il a les moyens de payer comptant. Comme l'affaire est sur le point d'être conclue, il demande à profiter de la maison avant la signature. Il y a en général un délai de deux mois avant de passer chez le notaire. Dans le premier cas, le couple d'acquéreurs demande les clefs pour réaliser quelques métrés en vue des prochains travaux ; dans le second, il souhaite louer la maison d'ici là pour s'installer au plus vite. Mes amis se méfient. Les premiers refusent. Les futurs propriétaires s'évanouissent dans la nature. Quelle arnaque se cachait derrière l'opération ? Le champ est ouvert aux spéculations. Squat, utilisation d'une maison "neutre" pour un coup d'envergure n'ayant aucun rapport avec la vente, nous ne le saurons jamais. Le notaire des seconds les met en garde lorsque le couple d'acquéreurs, de vagues amis, demande à louer la grande maison pour une somme symbolique en attendant la conclusion. Les petits malins ont déjà commis l'entourloupe, un bail est signé pour 500 euros mensuels, mais jamais la vente ne sera effective. Ils ont pu ainsi rester vingt ans pour un loyer dérisoire et comptaient réitérer l'opération sur le dos de mes amis. Lorsque ceux-ci, comprenant que ces locataires seront ensuite indélogeables, refusent poliment une entrée dans les lieux avant signature définitive, le couple d'escrocs se fâche, invoque l'amitié trahie et claque la porte de la maison de leurs rêves ! Si les vendeurs de la première histoire se retrouvent désemparés face à l'énigme de la disparition absolue de leurs acheteurs, les seconds qui avaient tout autant vendu la peau de l'ours avant de l'avoir tué se sentent soulagés d'avoir évité le pire. La similitude des deux arnaques laissent suspecter une escroquerie dans l'air du temps, à moins que ce ne soit un vieux truc dont je n'ai pris connaissance que récemment.
Nous avons tous été un jour ou l'autre victimes d'un escroc. Lorsque l'on est jeune, on apprend à ses dépens à être méfiant et à ne pas mélanger la sympathie qu'inspire certains individus avec le sérieux qu'exige une transaction. J'avais 25 ans lorsque j'ai acheté un piano qui n'existait pas. Ayant passé une petite annonce dans le journal Libération pour trouver un piano pas cher, je suis réveillé un matin par le coup de fil d'un convoyeur de pianos pour le Moyen-Orient qui m'explique qu'au retour il lui reste un piano droit neuf au cas où il y aurait de la casse pendant le voyage. La somme est importante pour moi, mais le prix global est dérisoire en regard d'un piano neuf. Je dois agir très vite pour lui remettre mille francs afin qu'il puisse dédouaner l'instrument. Nous prenons rendez-vous le matin même et je l'accompagne en voiture jusqu'à la Gare de Lyon où je le vois entrer aux Douanes, mais n'en ressortira évidemment jamais. Je l'attendrai trois heures en vain sur le quai en plein vent, ne rentrant chez moi qu'avec une grippe carabinée et une bonne leçon. La naïveté est si touchante !