70 Voyage - Jean-Jacques Birgé

Jean-Jacques Birgé

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dimanche 27 avril 2025

Pilgrim


Au fond, Pilgrim. Plus loin, un champ de coquelicots. Ou la garrigue qui monte et qui descend…

vendredi 25 avril 2025

Reflets d'argent


Arpenter la plage. Ramasser des coquillages. S'achever avec une crème glacée géante. Pendant les grandes vacances je mets le blog en jachère, mais si je pars une semaine je ne m'autorise aucune pause. La route défile. Le ciel est magiquement bleu. Je prends des couleurs. J'aime les couleurs comme un vampire se délecte du sang de ses victimes. Elles perdent les leurs, mais elles en retrouveront d'autres à leur tour. Je m'égare. S'égarer, c'est le propre des vacances. "Les vagues recopient cent fois le verbe aimer", ce sont des vers de Cocteau qui me reviennent souvent sans que je le veuille, comme ceux de Prévert dans Barbara, une des mes chansons préférées, si terrible soit-elle : "Je dis tu à tous ceux que j'aime, même si je ne les ai vus qu'une seule fois, je dis tu à tous ceux qui s'aiment, même si je ne les connais pas." Alors je cherche les mains qui s'étreignent, ou des baisers, secrets ou cannibales. Sur la plage les enfants font des châteaux. Ils rêvent. Il ne faut jamais cesser de rêver éveillé. Changer de rythme offre la liberté de penser, de penser par soi-même, sans répéter les usages que la mode ou la bienséance exigent. Les nouveaux puritains manquent de subtilité. Décidément je m'égare. Je devrais me cantonner aux spécialités du pays, tielles ou tellines, Pic Saint Loup ou Picpoule de Pinet. Comment ne pas se délecter de la philosophie de bistro ? C'est si bon de retrouver ses ami/e/s et de partager les mêmes interrogations sur le monde. C'est toujours le temps de le refaire. Jusqu'à la prochaine fois. Il en faudra d'autres, des prochaines fois, des fois inattendues, pleines de surprises, tendres et féériques.

dimanche 23 mars 2025

Estuaire


Anne, mon frère Anne, ne vois-tu rien venir ? À gauche la Loire me fait croire que la mer de nuages est déjà l’Atlantique. Tout n'est qu'illusion. Il y a une couleur qui se promène et des gens cachés dans cette couleur.

vendredi 6 septembre 2024

Retour à Lima, onzième étape


Ces trois jours à Lima figurent un sas de décompression entre la jungle et le retour en France. Métropole polluée, elle n'en est pas moins exotique si l'on sort des lieux touristiques comme lorsque nous sommes allés à Gamarra, immense marché textile occupant tout un quartier, pour trouver celui des sorcières, ou que nous avons longé les bidonvilles en roulant vers Callao. J'ai forcément accumulé les clichés depuis ces derniers jours où je publie ce journal de voyage, extime comme tout ce blog depuis vingt ans déjà. Ce sont donc les derniers, capturés avec mon smartphone qui dictent ces ultimes souvenirs d'un voyage merveilleux qui dura cinq semaines.


Nous avions commencé par une vue du Pacifique, nous terminerons ainsi en nous rendant à l'Aéroport Jorge Chávez. Les falaises noires forment rempart contre un éventuel tsunami. Le Pérou a souvent été secoué par de terribles tremblements de terre. Au Monastère de San Francisco, qui n'y échappa pas (en 1655, 1966 et 1970), je photographie un Christ saignant. Le sang a beaucoup coulé dans ce pays. Avant les conquistadors détruisant la civilisation inca sous prétexte d'évangélisation, il y en eu d'autres, victimes chaque fois d'une nouvelle guerre tribale. Disparurent les Nazca, les Mochicas (ou Moches), les Huari (ou Waris), les Chimú, les Chachapoyas et bien d'autres qui très probablement mêlèrent leurs gènes avec ceux des vainqueurs. Il n'y a pas d'histoire écrite, seulement des traces iconographiques difficiles à décrypter. Le magnifique Musée Larco retrace cette épopée toujours un peu mystérieuse au travers de l'art précolombien.


Pour quelles raisons les maisons qui nous plaisent le plus à Lima sont-elles en ruine ? Affaire de corruption, de taxes ? Elles ont souvent un petit côté mauresque. La présence arabe en Espagne n'était pas si loin. D'autres pavillons ressemblent à Deauville, avec des colombages. À Callao, la rue vide a des airs de western...


La vue du port depuis Monumental Callao, superbe immeuble de la Casa Ronald réhabilité par des célébrités du street art, montre le mélange d'industrie, de rénovation proprette et de pauvreté insalubre.


De temps en temps je prends les murs peints comme à Barranco. Les couleurs égaient la ville. Lorsque j'ai fait repeindre ma maison en bleu, j'avais pris modèle sur ces pays chamarrés. Les voisins ont suivi le mouvement. Cela change du blanc sale et du gris déprimant.


Il n'empêche que l'on croise de temps en temps des épaves posées là depuis des lustres. Pneus crevés, vitres brisées, carrosserie rouillée. Il y a aussi beaucoup de magnifiques automobiles vintage qui roulent toujours.


Les points forts de notre voyage sont évidemment Machu Picchu, l'Amazonie et bientôt les îles Palomino. Dans la forêt il est extrêmement rare de croiser un jaguar, emblème terrestre du Pérou à côté du serpent pour l'eau et du condor pour l'air. Celui-ci a été capturé à l'ancienne gare de Lima, la Desamparados transformée en musée de la littérature péruvienne.


Mais l'image que je préfère est le tableau de Pecon Quena que m'a offert Christiane. Pour elle il représente La métamorphose de Kafka. Ma référence est plus prosaïque, c'est le Beetlejuice de Tim Burton ! Décroché pour l'emballer, il n'est pas sur la photo, mais on peut admirer d'autres œuvres de cette artiste shipibo-conibo qui vit sur les hauts-plateaux à 4000 mètres d'altitude au centre de l'Amazonie. Chaque personnage protège une plante particulière. Autodidacte en musique, j'ai toujours eu un goût très prononcé pour l'art brut. Si j'en avais les moyens je les aurais tous achetés.


Comme c'eut été un peu dur, après tout ce que nous avions vécu dans la nature, de retourner brutalement à la civilisation urbaine, j'ai trouvé sur Internet une excursion qui bizarrement ne figure sur aucun guide. Il s'agit d'une promenade en mer pour rejoindre les îles au large de Lima à partir du port de Callao, près de La Punta où nous dégusterons un dernier ceviche absolument délicieux. Après être passés au large de l'île San Lorenzo, base d'entraînement de l'armée péruvienne, et de l'île El Frontón (La Isla del Muerto porte bien son surnom : dans sa prison, aujourd'hui détruite, l'intégralité des militants maoïstes du Sentier lumineux y furent massacrés après leur mutinerie), nous serons sidérés par les 8000 otaries qui vivent tranquillement sur celle de Palomino.


Le point fort de cette matinée est la baignade au milieu des otaries qui, aussi curieuses que nous, plongent en faisant des bonds de dauphins et en criant. Mon blog ne me permet pas de mettre en ligne les vidéos incroyables que j'ai postées sur FaceBook et Instagram, ni de diffuser l'odeur de poisson de l'eau qui est entre 15° et 17°.


Aux esprits chagrins qui critiquent notre incursion, je répondrais que les énormes mâles alpha protecteurs restent sur les rochers, que les petits glissent sur leurs toboggans pour profiter de la fête, qu'une otarie contrariée possède une mâchoire pouvant vous sectionner un membre, et que dix glaçons par jour flottant parmi des centaines de lions de mer dans un site protégé ne risquent pas de chambouler le bel équilibre de l'immense communauté otariidée.


Souvenir inoubliable que ces pélicans qui nous regardent rentrer (petit jeu style "Où est Charlie ?" : compter combien il en a sur la photo ?), belle manière de conclure notre voyage avant de regagner nos pénates. Avant le départ, je fais quelques emplettes culinaires : éclats de cacao, piment charapita, maïs cancha serrana et cancha chulpi grillés, tisane de muña, pisco...


Alors un dernier pisco sour, pour l'envol (même si Air France préfère servir du Champagne sur les longs courriers) : 3 mesures de pisco, 1 de citron, 1 de sirop de sucre, ½ blanc d'œuf, 6 cubes de glace - passer tout cela au mixeur et ajouter un trait d'angostura... À votre santé !

mercredi 4 septembre 2024

Tarapoto, dixième étape


Quelle bonne idée avons-nous eue de nous reposer à Tarapoto, porte de l'Amazonie ! Pour nous c'est plutôt la porte de sortie, mais pas tout de suite... Dans six jours nous regagnerons la civilisation à Lima.


Nous avons dégotté un havre de paix, encore cette fois tout en haut de la ville, à l'orée de la forêt. Est-ce un hasard si nous avons souvent choisi les endroits les plus excentrés ? Pour y accéder nous subissons quotidiennement un massage costaud en empruntant le chemin caillouteux de terre, conduits par un moto-taxi à trois roues. Nous avons beau faire le trajet jour après jour, le lodge est toujours plus loin que nous le pensions. Le chauffeur a un mal fou à gravir les côtes, mais leurs moteurs sont robustes.


La maison ronde sur pilotis n'a pas de fenêtres, mais elle est entièrement encerclée d'une moustiquaire, avec en son centre une sorte de grand lit à baldaquin et une salle de bain derrière la tête du lit. Un filet tient lieu de hamac au-dessus du vide. C'est absolument idyllique.


À la tombée du jour un drone aigu, d'une intensité insoupçonnable, monte à nous casser les oreilles, comme un son de synthétiseur strident qui se tait avec la disparition du soleil. Cette musique d'une modernité inouïe dure exactement une heure le soir de 6 à 7, et une demi-heure le matin de 5h45 à 6h15. Vient s'y superposer le cri d'un coq, des aboiements de chien, des chants d'oiseaux et des bruits d'insectes que nous sommes évidemment incapables de reconnaître. Au bout de quelques jours, j'ai l'idée de produire un nouveau disque où j'associerai L'aube à Shimiyacu à Nabaz'mob, l'opéra pour cent lapins connectés que j'avais composé en 2004 avec Antoine Schmitt. Ne faisant ni une ni deux, je réaliserai le montage de ces deux opéras pour bestioles dès mon retour et je demanderai une fois de plus à Étienne Mineur de réaliser une de ses pochettes magiques dont il a le secret. Sur place je commence à rédiger les notes du livret, excité comme une fourmi paraponera, seul animal dont il faut ici éviter la piqûre, connue comme la plus douloureuse au monde provenant d'un insecte, assimilée à un coup de feu, d'où son surnom de fourmi balle de fusil. Pendant le voyage, je croiserai ainsi trois de ces jolis insectes solitaires, mesurant deux centimètres et demi.


Comme lors des précédentes étapes nous alternons les jours denses et les moments de repos, pour ne pas dire de détente tant nous nous laissons aller au plaisir du far'niente, entendre par là la lecture sur liseuse de romans envoûtants.


Si la plantation d'orchidées nous laisse sur notre faim, la balade à Lamas vaut son pesant de noix amazoniennes. Il y a une vingtaine d'années un maboul italien y a fait construire une sorte de château de la Renaissance kitchissime, castillo avec peintures et sculptures du même acabit.


Comme raconté dans l'article sur Iquitos, nous visitons avec beaucoup d'intérêt le Centre Urku qui récupère et soigne des animaux sauvages victimes de trafic illicite. Non, le dragon fait seulement partie du délire de l'industriel turinois Nicola Felice Aquilano. Les papillons à la forme étonnante photographiés près d'une cascade non plus..


Nous passons beaucoup de temps à écouter la symphonie de la nature qui nous entoure. J'y ajouterais bien les instruments acquis pendant le voyage, flûte double, ocarina, sifflets à coulisse, maracas fabriqués dans les villages indigènes, mais non, je vais laisser agir la magie pure du field recording...


Les autres rares pensionnaires du lodge sont venus poursuivre un stage d'ayahuasca situé tout à côté dans la montagne qui nous surplombe. Pendant deux jours ils se vident avant d'absorber le breuvage, préparé à partir d'une liane de la forêt, sous la direction d'un chaman. Certains sont bouleversés positivement par cet hallucinogène, d'autres le vivent moins bien. Bien que j'ai expérimenté de nombreuses drogues dans ma jeunesse pour ouvrir les portes de la perception, je n'ai plus la même appétence pour ce genre d'aventure. Je garde en mémoire la phrase de Henri Michaux qui me guidait : "Nous ne sommes pas un siècle à paradis, mais un siècle à savoir."

lundi 2 septembre 2024

La forêt amazonienne, neuvième étape


Au début du voyage entre Iquitos et le lodge d'Amazonia nous croisons de nombreux bateaux échoués nous rappelant Fitzcarraldo, le film de Werner Herzog. Au début du XXe siècle ce fan d'art lyrique totalement allumé rêvait de construire un opéra à Iquitos, dont une artère principale porte son nom, composante essentielle de l'image de la ville "frontière". Plus loin ce sera Aguirre qui remontera à la surface.


Dans la selva nous marchons dans la boue en nous aidant d'un bâton puisque nous ignorons quelles sont les plantes vénéneuses qu'il est fondamental de ne pas toucher. Mais s'enfoncer dans le marécage jusqu'aux genoux procure une sale impression. Avec sa machette notre guide laisse régulièrement des entailles sur les arbres qu'il croise, comme le Petit Poucet. Il guette le moindre bruissement de feuilles en haut des cimes pour débusquer les animaux qui s'y cachent.


Au gré des promenades, nous croiserons de grands dauphins roses un peu balourds, de plus petits gris qui sautent très haut, un paresseux (très paresseux puisqu'il ne nous a exposé qu'un quart d'épaule), des singes, de minuscules marmousets ou de plus grands dont je ne me souviens plus du nom, des loutres, des oiseaux, rapaces surtout, hérons petits patapons avec de gros becs bleus, perroquets, martin-pêcheurs de toutes tailles, tous d'un magnifique bleu électrique, de grands papillons aux couleurs éclatantes...


Mais pas un seul serpent (un guide prétendit que les faucons les avaient tous dévorés, humour ou mauvaise foi, allez savoir, quand on connaît la taille d'un anaconda), ah si, une grosse tarentule dans l'escalier du lodge, et, contre toute attente, très peu de moustiques ! Nous n'avons jamais été piqués, mais nous portions pantalon et chemise à manches longues. Le soir nous nous enduisions de produit toxique. Partout d'énormes nids de termites, ressemblant à de gros sacs de jute, phagocytent les arbres ; c'est l'anti-moustique naturel des indiens.


Chaque pas est mesuré. J'use mes yeux à surprendre le moindre mouvement de branches ou les flaques où s'embourber. Tandis que nous avançons lentement parmi les lianes, notre guide s'évertue à nous donner le nom espagnol et quechua de chaque arbre et bestiole rencontrés.


J'ai tout de même réussi à me faire piquer par une guêpe nocturne. La douleur ne dure heureusement qu'une quinzaine de minutes. Pendant ce séjour chaud et très humide, nous avons vogué allègrement, de jour comme de nuit, en pirogue et en bateau à moteur. La nuit noire, le spectacle céleste, loin de toute civilisation, est absolument merveilleux. Je pense à la balade de La nuit du chasseur alors que la barque glisse doucement sur l'eau noire, encerclés par des centaines de lucioles dont certaines traversent héroïquement la rivière devant nous. De temps en temps un petit caïman noir plonge devant nous.


Nous admirons la mythique constellation du lama au sein de la Voie lactée et je fais un vœu à la première étoile filante. Mais je n'ai pas entendu la sublime symphonie batracienne dont je garde un souvenir inoubliable à Nong Kiaw, lors d'un voyage au Laos. Je me rattraperai plus tard, à Tarapoto.


La forêt amazonienne est magnifique, envahissante, absorbante. Loin du monde. Nous sommes en effet à cinq heures d'Iquitos en speedboat. Peu nombreux, seulement sept touristes pour une armada de guides, cuisiniers, personnel hôtelier, dans un superbe lodge sur pilotis qui me rappelle le labyrinthe du Nom de la rose. Une drôle de comparaison, mais si vous vous étiez perdus sur ces hautes coursives vous auriez peut-être appelé à l'aide, surtout si vous croisiez dans la nuit un gentil kinkajou.


Le petit mammifère aux grands yeux ronds avait commencé par lécher la chaussure de l'Américain avant d'y enfoncer ses canines. Conclusion, rapatriement d'urgence à Atlanta pour se faire vacciner contre la rage !


À la saison sèche les coursives sont à cinq ou six mètres de haut, moins que le circuit de tyroliennes, quarante mètres encore au-dessus, qui nous permettent d'admirer la canopée...


Mais lorsque vient la saison des pluies diluviennes l'eau monte presque jusqu'en haut des pilotis.


Les bateliers doivent faire des prouesses pour naviguer alors que le niveau de l'eau est très bas. Ils inclinent plus ou moins le gouvernail au bout duquel est fixée une minuscule hélice. Les arbres ont des racines si peu profondes qu'ils s'écroulent facilement. Il faut souvent pousser les troncs tombés au milieu de la rivière. Je me demande si l'on pourra encore passer la semaine prochaine. Comme nous sommes de plus en plus paresseux, nous privilégions les balades en pirogue à la marche dans la forêt, forêt qui sera totalement submergée en été, transformée en mangrove. Il n'y aura plus d'autre choix que la navigation, sous la pluie évidemment, pluie que nous aurons presque tout le temps évitée, sauf une fois, où nous étions justement en bateau et où nous avons été trempés jusqu'aux os.

vendredi 30 août 2024

Iquitos, huitième étape


La compagnie Latam, égale à elle-même, à deux heures de retard, mais nous réussissons à attraper notre correspondance pour Iquitos puisqu'il faut repasser par Lima pour remonter en Amazonie. Il n'existe aucune route. L'autre solution est le bateau, mais les navires marchands mettent des jours et des jours. Iquitos est comme une île au milieu de la forêt.


C'est la seule grande ville du monde (500 000 habitants) à n'avoir aucun accès routier. Avec ses triporteurs à moteur, sa circulation intense, ses marchés odoriférants, sa pollution aussi, on se croirait en Asie du Sud-Est. Nous n'y faisons halte qu'une nuit, le temps que je goûte le ragoût de caïman.


Au marché j'essaie de reconnaître les poissons. Nous continuons à manger du ceviche partout où nous allons, car on en pêche aussi dans les lacs et les rivières. Ici nous goûterons, entre autres, paiches et piranhas. Les piranhas n'attaquent jamais une proie en mouvement à moins qu'elle ne saigne. On peut donc se baigner parmi eux sans danger.


Partout où nous allons nous privilégions la marche à pied aux taxis et moto-taxis, histoire d'appréhender la vie quotidienne. Alors, "a marché, a beaucoup marché", pas qu'entre Denges et Denezy ! J'ai heureusement écouté le conseil de ma fille d'acquérir, avant de partir, de bonnes chaussures de marche.


Une "vedette" rapide doit nous emmener sur l'Amazone pour rejoindre le lodge "de luxe" où nous allons passer six jours, en fait deux lieux différents qui nous permettront d'appréhender la rain forest, la forêt amazonienne, la jungle, avec ses plantes dangereuses et ses animaux que l'on n'apercevra forcément que de loin. Pour les voir de près autant aller au zoo (« avec zizi, c'est ma petite amie !»), ce que nous ferons la semaine prochaine à Tarapoto, en visitant Urku, centre de sauvetage d'animaux saisis à des trafiquants : tapir, iguane, ocelot, tortues, etc.


En attendant, je photographie un chien noir sans poils, spécialité péruvienne. Leurs quelques poils sur le caillou, certains même blonds, les font ressembler à des punks !

jeudi 29 août 2024

Machupicchu, septième étape


Le train qui nous emmène à Aguas Calientes roule en moyenne à 25 km/h. En France on appellerait cela un tortillard. Il faut quatre heures pour faire 90 km ! Des enfants hurlent. Le responsable du wagon nous sert un gobelet d'eau. El condor passa est diffusé en boucle. Je déteste ce genre de musique. Que c'est bon quand ça s'arrête ! Ailleurs nous entendrons des musiques péruviennes autrement plus variées, même si Yma Sumac reste étonnamment absente.


Cette ville artificielle fut construite pour alimenter Machu Picchu. Elle est constituée d'hôtels, de restaurants et de vendeurs d'artisanat local. Les rues ressemblent aux travées d'un énorme magasin de souvenirs. Nous avons bien fait de choisir la visite de 7h du matin, pour faire la queue dès 5h30 au bus qui monte à l'une des sept merveilles du monde. Elle est si longue, je n'en vois pas le bout, que celle de la Tour Eiffel semblerait minuscule.


Pourtant nous arpenterons Machu Picchu sans presque personne. À un ami qui le remarque en regardant les photos que je mets en ligne sur FaceBook et Instagram, Bernard Cavanna répond, avec l'humour dont il ne se dépare jamais, que les Espagnols les ont tous tués !


On a beau en avoir vu tant d'images, la cité inca produit un effet exceptionnel. D'abord par sa situation sur la Cordillère des Andes, ensuite pour l'état de conservation de ses ruines du XVe siècle. L'endroit est magique. On comprend pourquoi les Incas y ont construit le Temple du soleil. Souvent, pendant notre voyage, nous penserons à l'album de Tintin. C'est probablement sa lecture qui nous a transportés jusqu'ici. Combien y a-t-il fallu d'esclaves pour monter ces pierres ? Combien de sacrifices humains pour amadouer les dieux ?


J'avais illustré mon premier article avec une photo où le soleil naissait au milieu des nuages, comme un rond de fumée percé par une gloire. Je prends un peu de recul et j'intègre les vestiges de Machu Picchu et des rochers qui auront peut-être été idolâtrés il y a 500 ans. Je ne suis pas mystique, mais le lieu est chargé. On y sent des forces telluriques toujours à l'œuvre.


Des lamas paissent sur les terrasses en espaliers. Le soleil monte vite. J'ai très chaud, mais je crois que c'est dû à l'effort. En Amazonie nous serons en terrain plat, et dès que je serai monté dans l'avion je retrouverai mon souffle.

mercredi 28 août 2024

La Vallée Sacrée, sixième étape


Nous sommes juste sous les 4000 mètres sur les sites de Chinchero, Morey, Maras, Ollantaytambo, Pisac, mais ce jour-là, coup de chance, je suis moins sensible à l'altitude. Nous avons heureusement choisi d'alterner un jour d'excursion avec un jour de repos. Façon de parler, car plus nous avançons, puis le soroche nous épuise dès que nous retournons à Cuzco. Le pire fut le pisco sour de Cicciolina dégusté avant un succulent steak d'alpaga. L'altitude multiplie par trois les effets de l'alcool dans mon sang, alors trois pisco sour, et je dois me tenir aux murs pour grimper jusqu'à notre havre de paix. En montant dans le minibus qui nous emmène dans la vallée, j'oublie ces expériences épuisantes.


Nous nous arrêtons d'abord à Chinchero. Une jeune femme file la laine de lama et je trouve finalement des gants à la taille d'Eliott.


Par terre d'autres femmes ramassent des pommes de terre noires qu'elles ont fait sécher au soleil pour les déshydrater.


Après les cultures en espaliers de l'époque inca à Morey, terrasses en restanques (murs de soutènement), terre fertile et canaux d'irrigation permettant de cultiver plus de 250 espèces de plantes, le spectacle des mines de sel de Maras est phénoménal.


Cela ressemble aux cuves des teinturiers marocains. En gigantesque. Ou à des tableaux de Hundertwasser ou Alechinsky. En fait de mines ce sont plutôt des marais salants qui datent de la période pré-inca. L'eau salée, du chlorure de sodium, qui coule de la montagne entre dans chaque cuve par un petit trou. Aujourd'hui, près de 800 familles sont organisées en coopérative pour gérer les 3 600 bassins produisant jusqu'à 200 tonnes annuelles de ce sel rose étonnant et délicieux, cousin de celui de l'Himalaya. Mais les autochtones ne peuvent pas se l'offrir et achètent leur sel bas de gamme en Bolivie. Pourtant cela ne coûte pas grand chose. Leur niveau de vie est évidemment très loin du nôtre.


Pour l'équivalent de 25 euros nous nous baladons ainsi en minibus toute la journée, déjeuner compris à Urubamba. À Ollantaytambo nous passons notre tour, trop fatigués pour emprunter les 435 marches et optons pour des glaces aux fruits exotiques locaux et au chocolat de Cuzco. Nous ratons la forteresse de porphyre rouge.


Arrivés après la fermeture de Pisac, nous réussissons tout de même à pénétrer dans ce somptueux site archéologique grâce à l'astucieux Richard, notre guide d'origine inca, aussi drôle que savant. Le spectacle réside autant dans les ruines que dans le paysage qu'elles surplombent. Nous rentrons à la nuit tombée. Il faut se souvenir qu'ici c'est l'hiver. Le soleil se couche vers 17h30.


Je ne résiste pas à courir après des alpagas pour envoyer leurs frimousses à mon petit-fils. Comme lamas très contents, ainsi nous au sec.

mardi 27 août 2024

Cuzco, cinquième étape


Cuzco est notre cinquième étape et non des moindres. Nous avons loué pour la semaine un studio avec une vue imprenable sur la ville. Entièrement vitrée, la maison offre un panorama incroyable, car nous sommes tout en haut, même très haut, puisque Sacsayhuamán est juste derrière nous, légèrement au-dessus, ce que nous ressentirons fortement lorsqu'il s'agira de visiter cet impressionnant site inca, situé à 3700 mètres d'altitude. Les murs en zigzag de la forteresse (planche 56 des aventures de Tintin), également centre religieux dédié au Soleil et à d'autres dieux, sont constitués de pierres gigantesques dont on peut s'interroger sur comment elles sont arrivées là. Les blocs de calcaire, qui pèsent entre 120 et 200 tonnes chacun, sont assemblés sans lien entre eux. Le lieu est immense, hallucinant. Nous y montons en fin de journée pour profiter de l'absence de touristes, mais tout au long du voyage nous serons surpris de nous retrouver en tout petit comité.


L'inconvénient, c'est que nous avons à grimper chaque fois que nous descendons au centre-ville, vers la Plaza de Armas, où trône la cathédrale. Heureusement le quartier San Blas n'est pas très loin de notre résidence. Le coin est charmant avec ses ruelles pavées de galets, découpées en leur centre par un profond caniveau, bordées de vieux murs de pierre incas.


Deuxième inconvénient auquel nous pensions échapper, le soroche, le mal des montagnes qui me terrassait déjà sur le lac Titikaka. Cuzco est à 3400 mètres. Difficulté de respirer, grosse fatigue.


Le matin nous descendons prendre un exquis petit déjeuner végétarien chez Qura avant de courir les magasins pour répondre aux désirs de la famille qui a pris ses quartiers d'été à L'île Tudy, Finistère sud, rituel d'autant plus justifié cette année que ma fille Elsa accouchera à Quimper le jour de notre retour. Merveilleuse nouvelle, la bambinette est née coiffée. En attendant, la perte d'appétit nous entraîne à sauter le dîner. Nous nous régalons le midi chez Greenpoint ou Pachapapa à San Blas. Le soir un empanadas ou rien du tout. Il faut dire que les nuits très très fraîches ne nous poussent pas à sortir lorsqu'elle est tombée. Par contre le jour, au soleil, on peut se promener en bras de chemise. Les maisons sont mal ou pas chauffées du tout, très mal isolées. L'air glacial passe entre les vitres coulissantes.


Je m'intéresse toujours aux petits détails qui peuvent en dire long sur les coutumes des peuples dont nous découvrons le pays. Par exemple, les douches sont dite "pluie", sans flexible, ce qui n'est vraiment pas pratique. La vétusté des canalisations interdit de jeter du papier dans les toilettes comme dans beaucoup de pays pauvres, mais on est loin de l'hygiène des douchettes des pays arabes ou de la casserole de ceux du sud-est asiatique. Comme ce détail peut surprendre sous ma plume, je précise qu'à la maison j'ai installé le système Boku, dit toilettes japonaises à la française. En voyage ces détails sont effectivement déterminants, un peu comme la tolérance à d'autres cuisines que la nôtre. Nous avons choisi de nous poser une semaine à Cuzco pour prendre le temps de visiter la Vallée Sacrée et l'une des sept merveilles du monde, Machu Picchu.

vendredi 23 août 2024

Puno, troisième étape


Nous avons beau avoir tout réservé, rien ne se passe en effet comme prévu. Le très confortable bus de la compagnie Cruz del Sur a pris plus de deux heures pour réparer une roue crevée au milieu de nulle part. La nuit était tombée, nous étions condamnés à ne pas quitter nos sièges et nous ignorions tout de la panne. Arrivé tardivement à Puno, je me suis rendu compte qu'il m'était très difficile de respirer. Le mal de hauteurs ! À 3812 mètres le lac Titikaka est le plus haut du monde, du moins parmi les navigables. Heureusement la Casa Panq'arani est très agréable. Des fleurs, des oiseaux, des chats et des hôtes très gentils. Nous ne voulions pas tout réserver à l'avance, mais les meilleurs endroits sont très tôt pris d'assaut et certains sites, comme le Machu Picchu, sont contingentés. Nous avons rencontré des touristes qui avaient fait le voyage pour rien, refoulés à l'entrée. Nous avions compulsé le Lonely Planet et le Guide du routard, étudié maints sites Internet, récolté les conseils de précédents voyageurs ou d'amis péruviens, nous y prenant plusieurs mois en amont. C'était prudent, car ayant laissé en suspens les trajets en bus, il ne restait plus que deux places quatre jours avant la traversée. Nous avons eu chaud. Façon de parler...


La bonne idée avait été d'acheter des pulls en baby alpaga à Arequipa, car ici il fait très froid lorsqu'on n'est pas au soleil. La nuit, le thermomètre descend en dessous de zéro et les chambres ne sont pas chauffées. De plus, les fenêtres ne sont pas jointives et l'air glacial passe entre. Les Péruviens vivent en anorak à l'intérieur de leur maison. Notre panoplie comporte donc bonnets, gants, écharpes, chauffrettes. J'en ai trouvé des électriques qui se rechargent en USB. Autres gadgets acquis avant de partir, des AirTags permettant de localiser nos valises. Ce genre de gadget peut être utile à condition de n'y avoir recours qu'en cas de problème, sinon cela rajoute simplement de l'angoisse pour rien.


En sortant ce matin nous avons croisé un enterrement. J'ai raté la photo de l'impressionnante procession, mais j'ai enregistré les musiciens qui l'accompagnaient. Guitare, basse, accordéon, avec la sono sur roulettes pour qu'on les entende jusqu'aux premiers marcheurs.


Ce n'est pas tout ça, le taxi vient nous chercher pour nous emmener au port où nous devons embarquer pour les îles flottantes Uros.

jeudi 22 août 2024

Arequipa, deuxième étape


C'est l'hiver au Pérou. Il faisait bon à Lima, mais nous avons trouvé le ciel bleu à Arequipa, bien que les nuits y soient frisquettes. C'est un des points qui m'inquiétaient un peu avant de partir. Le soleil nous ayant cruellement manqué à Paris cette année, quelle drôle d'idée d'aller passer ces semaines de juillet-août dans l'hémisphère sud où les saisons comme les gens marchent la tête en bas. L'attraction de l'exotisme comme celle dite terrestre eurent raison de nos inquiétudes. Certes le siphon des toilettes tourne dans le sens contraire de chez nous, mais les différences de hauteur sont ici plus importantes que la latitude. Lima est au bord de l'Océan Pacifique, mais Arequipa est déjà à 2300 mètres de haut et nous allons dépasser les 4000 mètres avec l'appréhension du mal des montagnes qu'ici chacun/e redoute. Nous nous sommes entraînés à mâcher des feuilles de coca pour atténuer les effets hypothétiques désagréables que certain/e/s subissent, mais c'est franchement dégueulasse, enfin pas tant que ça, juste un peu amer ; le problème est que chiquer en laisse plein les dents. De l'autre côté de la frontière on appelle même cela le sourire bolivien ! Donc plutôt que mastiquer ses feuilles sèches qui finissent en boule sous les joues, nous avons acheté en pharmacie un mélange de coca, guarana et gingembre. On verra plus tard que cela n'eut que peu d'effet, ou, sinon, dans quel état aurions-nous subi le soroche sans n'avoir rien essayé ? Lors d'un trek au Népal il y a trente ans, le sherpa nous avait expliqué que ce mal des montagnes peut arriver à n'importe qui, même après des années, et même à lui ! J'espérais passer au travers, par une foi qui frise le mysticisme, mais cette composante de mon caractère obsessionnel n'a pas toujours été à la hauteur de mes espérances.
Dans le jardin de l'Hostal Casona Solar, je réussis à filmer un joli colibri, excité comme une puce, qui butine la corole des fleurs en faisant du surplace devant les chambres en sillar de cette ancienne maison coloniale du XVIIIe siècle. Au son j'avais d'abord cru que c'était un gros insecte.



La visite la plus extraordinaire fut celle du Monestario de Santa Catalina, une petite ville en soi avec ses rues rouges dans lesquelles donnaient les cellules des recluses. Ses 20000 mètres carrés occupent tout un pâté de maisons entouré de hauts murs. Dans ce monastère fondé en 1580 par la riche veuve doña María de Guzmán, les jeunes novices, placées par leurs riches familles, toutes à leurs prières, ne devaient prononcer aucun mot. Quatre ans plus tard, à raison de cent pièces d'or par an, elles pouvaient prononcer leurs vœux ou sinon déshonorer leur famille. Notez qu'elles s'y enfermaient tout de même avec une ou plusieurs domestiques ! Les meilleures cellules possédaient une cuisine, un four à pain et je suppose que le petit coin reculé servait de toilettes. On n'imagine jamais à quel point les gens et leurs espaces de vie devaient puer à cette époque-là... Promenade superbe, à la découverte des peintures réalisées par les nonnes, des cloîtres, du réfectoire commun, du clocher, de la chambre mortuaire (salle dite De Profondis), de la chapelle et du petit labyrinthe qui les dessert.



L'autre attraction touristique est le Museo Santuarios Andinos où est exposée la "momie" de Juanita, une jeune inca découverte gelée au sommet du Mont Nevado Ampato en 1995. La glace conserva son corps quasiment intact depuis le XVe siècle. Lors de notre visite, Juanita étant stockée au congélateur à cause de la chaleur saisonnière, est exposée une réplique fidèle à l'originale. Nombreux objets trouvés dans sa tombe permettent à notre guide de détailler la longue préparation et les conditions des sacrifices humains dont étaient souvent victimes de jeunes enfants, préparés au supplice depuis leur naissance, en offrande à leurs dieux.




Ma petite sœur m'avait prévenu, ce que je savais déjà: tout ne se passe jamais comme prévu lors d'un voyage comme le nôtre. Nous en avions déjà fait les frais avec un retard de cinq heures de la compagnie low-cost chilienne Sky, mais le guano d'un urubu nous contraria vivement. Comment ce petit vautour a-t-il réussi à nous repeindre en vert tous les deux en même temps, c'est un mystère. Je n'avais jamais été recouvert de ma vie d'autant de merde. Heureusement c'est parti à l'eau et, après un nettoyage ardu mais réussi, nous en fûmes pour une bonne rigolade. À propos de fumée, en cinq semaines je n'ai croisé absolument personne avec une cigarette au bec, excepté ma compagne dont personne ne semblait remarquer cet appendice incongru.

mercredi 21 août 2024

Lima, première étape (2)


Nous étions évidemment sur les traces de Tintin et Milou, périple qui nous mènerait jusqu'au Temple du Soleil à Machupicchu. Mais pour le moment, c'était plutôt L'oreille cassée qui était évoqué dans le plus beau musée de Lima, le Museo Larco. Fondée en 1926 par l'archéologue et collectionneur Rafael Larco Hoyle, cette collection privée d'art préhispanique est à tomber à la renverse. En marge des galeries présentant les plus belles pièces, on peut visiter, ce qui est rare dans un musée, ses réserves, soit plus de 50 000 objets.


Les cultures cupisnique, chimú, chancay, nazca et inca y sont représentées. Les vases, bijoux, instruments de musique, textiles sont remarquablement éclairés, offrant un spectacle incroyable d'art précolombien. Certaines pièces montrent que les indigènes n'attendirent pas les Espagnols pour vivre de manière saignante, les civilisations se succédant parfois dans une extrême violence. Car il n'y eut pas que des sacrifices humains pour plaire aux dieux, mais surtout des guerres meurtrières frisant régulièrement le génocide. Je ne vais pas me lancer ici dans une histoire du Pérou, mais il est important de comprendre que, pour que Francisco Pizzaro en prenne le contrôle avec seulement 168 hommes, il fallait que l'empire inca soit déjà affaibli par des guerres civiles qui les opposaient aux autres peuples andins, et également des épidémies ravageuses. Avide de voler l'or et tout ce qu'ils pourront rapporter en Espagne, les conquistadors trahiront leurs engagements, s'entredéchireront, en faisant régner la terreur. Si l'on compare avec le reste du monde, à ces époques-là particulièrement, jusqu'à notre propre territoire qu'on appelle la France, nous n'avons pourtant pas de leçon à donner en ce qui concerne la barbarie humaine !


Ces tiares, bijoux de nez, boucles d'oreille et parures chimús en argent ne devaient pas être faciles à porter ! Elles datent de l'époque impériale (1300-1532 après J.C.).


Pareil pour cette magnifique tiare et le reste des bijoux en or massif... Le site du Museo Larco offre de nombreux détails, photos et explications sur les différentes cultures exposées.


Le jardin, qui abrite cette demeure du XVIIIe siècle, ancienne résidence d'un vice-roi, offre un cadre paisible et particulièrement agréable, avant de rejoindre le bâtiment exposant une belle collection d'objets érotiques des périodes préhispaniques.


La veille nous avions visité le MALI (Museo de Arte de Lima) qui présente des œuvres depuis l'époque précolombienne jusqu'à nos jours. Le contorsionniste cupisnique, étonnant vase datant de 3000 ans avant J.C., est le symbole du MALI.


Au rez-de-chaussée je me balance sur des fauteuils-toupies contemporains dont il m'a été impossible de trouver l'astucieux auteur.


Après la visite du MAC, petit musée d'art contemporain proche de notre hôtel, du Monestario de San Francisco et de ses catacombes, un bon pisco sour au Bar Piselli me remet en jambes. Lorsque cela ne suffit pas, j'utilise le Theragun qui est désormais de tous mes voyages. Il m'évite les courbatures et fait disparaître la moindre douleur musculaire !

mardi 20 août 2024

Lima, première étape (1)


La première image forte fut celle du Pacifique. Je ne l'avais vu que deux fois, depuis la côte ouest des États Unis en 1968 et en 2000. À Lima il fait souvent gris. La capitale péruvienne n'a pas la réputation d'une ville particulièrement excitante, peut-être à cause de ses embouteillages et de la pollution qu'ils provoquent. C'est une idée idiote, car il n'est pas d'endroit où notre curiosité ne peut s'exercer. En choisissant le quartier de Barranco, nous y avons vécu d'agréables promenades loin du tumulte limanien...


Même si le jour de notre arrivée nous sommes tombés sur la commémoration de l'anniversaire des 150 ans du quartier... Devant la tribune officielle, où les discours hagiographiques étaient diffusés par des haut-parleurs surpuissants, défilaient les écoles, les associations culturelles et sportives, les pompiers, les employés de la ville, tous et toutes dans leurs uniformes de travail. C'était la fête, et nous en prîmes notre part !


Ce sont pourtant les ceviche de la Canta Rana, il y en a dix-sept au menu, qui nous mirent le pied "à les trier". J'ai, par exemple adoré celui aux coquilles saint-jacques noires. Car, entre les guides et les conseils d'amis, il faut toujours faire son chemin à la machette. On pourra d'ailleurs s'en resservir d'ici quelques semaines, dans la selva, la forêt amazonienne, pour avancer au milieu des lianes et des arbres aux écorces piquantes ou empoisonnées.


Le riz aux calamars à l'encre de seiche était tout aussi renversant, mais j'aurais pu m'abstenir de le commander en plus ce jour-là tant les portions sont gigantesques. À Lima les plats pour une personne pourraient en nourrir quatre affamées ! Un autre jour, les tripes servies avec du boudin noir haché menu, m'ont fait élire Isolina comme un autre de nos restaurants préférés, parmi ceux abordables du quartier. J'aurais bien essayé certaines grandes tables, le Pérou étant un pays où la gastronomie est luxuriante, mais ils ne sont pas dans nos moyens. De toute manière nous repasserons par Lima à la fin de notre périple, sachant également que chaque région a sa cuisine propre. À notre halte prochaine je pourrais goûter le steak d'alpaga (c'est du lama, l'équivalent pour nous du mouton en terme d'élevage) ou le cuy entier aplati (cochon-dinde, prononcé couille).


L'alpaga fournit aussi une des laines les plus douces au monde, surtout le baby alpaga, la vigogne (petit lama sauvage) atteignant des sommes astronomiques. Nous craquons pour des vêtements aussi chauds que soyeux qui nous seront bien utiles prochainement sur les hauts plateaux. C'est un des beaux souvenirs à rapporter du Pérou. Mais il n'y a pas que la bouffe et le shopping !


S'il n'y avait qu'un lieu à visiter à Lima ce serait indubitablement le musée Larco. Mais ça, c'est une autre histoire que je vous conterai demain.

lundi 19 août 2024

Un rêve d'enfant


Remettre le compteur à zéro est une constante de ma vie, peut-être une obsession, certainement un choix. C'est se demander si l'on est sur la bonne route ou s'il serait temps d'emprunter le chemin des écoliers. Cela vaut pour mon travail, mais aussi pour les grandes décisions, car on ne peut jamais revenir en arrière. Aucun regret n'était envisageable, et la responsabilité remplace ainsi toute culpabilité. Je souhaite donc conserver mes meilleurs souvenirs tant que je suis à même d'en avoir ! Lorsqu'en 1993 je suis revenu du siège de Sarajevo j'ai fait la liste de tout ce que je n'avais pas encore réalisé et dont j'avais rêvé. Cela m'a poussé à quelques bêtises, mais aussi à jouir de certains rêves d'enfant, ou d'homme, tout simplement. La forêt amazonienne fait partie de ces récits d'aventures qui alimentèrent mes jeunes années de découverte. Après le Journal de Tintin mes parents m'avaient abonné à la revue Tout l'univers. Avec les romans de Jules Verne il est probable que Le temple du soleil a décidé de ce que j'allais devenir. Je n'ai pas choisi la carrière d'explorateur, mais la création cinématographique et musicale m'a permis d'arpenter des espaces vierges où l'on pouvait vivre l'inimaginable. Au Laos j'avais adoré la forêt primaire et sur le disque Carnage j'avais déjà envisagé La fièvre verte. C'est la lune pour un petit parisien. Alors, lorsque Christiane a évoqué le Pérou comme destination pour les grandes vacances mon sang n'a fait qu'un tour, un tour d'un monde inconnu, sauvage, dépaysant. J'ai toujours été attiré par les pays dont je ne parle pas la langue. Mon espagnol et si rudimentaire que j'avais néanmoins évité jusqu'ici l'Amérique du Sud. Tant pis, tant mieux, je me lance, d'autant que nous croiserons probablement des Péruviens dans la langue nous est totalement étrangère. Le 12 juillet nous nous sommes donc envolés pour Lima, ce qui avait aussi le mérite de quitter Paris et ses jeux du stade.

vendredi 12 juillet 2024

Bye bye


Le retour de mes articles est programmé pour le 19 août, lorsque nous serons rentrés de notre incroyable périple. C'est une question de santé de ne plus penser à ce que je publierai demain, ce qui ne m'empêche pas de prendre des notes et des photos qui alimenteront plus tard mon récit de voyage. J'emporte aussi le petit Nagra, car je ne voudrais pas manquer la symphonie de la nature. Cela m'était arrivé en 2008 à Nong Khiaw, au Laos. Je ne souhaite pas rater pareille merveille une seconde fois ! Nous nous envolons tranquilles, sachant que la maison et les chats sont en de bonnes mains, arrosage du jardin et câlins félins à la clef. Nous aurons probablement froid dans les hauteurs et chaud dans la forêt profonde, ce qui complique un peu l'organisation de la valise pour qu'elle reste légère. Je suis ennuyé de ne pas avoir appris l'espagnol, n'ayant inlassablement répété que les premières leçons. Je fais abstraction du bilan carbone que nous taisons humblement, mais mes rêves de jeunesse réclamaient cette entorse. Demain il pourrait être trop tard. Voilà quatorze ans que je n'avais fait un si grand voyage. J'enverrai probablement quelques images sur FaceBook ou Instagram, histoire de dire qu'on est toujours vivants. À bientôt...

Illustration : John Constable, Cloud Study, 1822

vendredi 5 juillet 2024

Parmi les nénuphars


Lorsque je prends des photos je vais souvent au plus vite pour ne pas perdre l'intention initiale. Sans prendre le temps de chausser mes lunettes, je cadre à peu près en espérant que ça colle. Il est toujours possible de recadrer, même si mes meilleures images ne l'ont pas justifié. Et puis l'écran de mon smartphone est riquiqui comme sur tous ces trucs de poche qui ont supplanté les appareils photo chez les amateurs. C'est un peu comme lorsque j'improvise, j'enregistre, mais je ne connaîtrai objectivement le résultat qu'à la lecture.
Hier après-midi je me promenais donc dans le Jardin des Plantes près de la gare de Nantes lorsqu'Eliott a voulu voir la mare aux grenouilles. Comme celles-ci semblaient cachées, nous nous sommes penchés sur les nénuphars qui venaient d'éclore. Juste avant de nous diriger vers Dépodépo, le jardin créé par l'illustrateur Claude Ponti, où Eliott rêvait d'aller se cacher dans les pots de fleurs géants, j'ai cherché à photographier une fleur plein pot sans me rendre compte qu'une grenouille était dans le champ. Ce sont les amies à qui je l'ai fait suivre qui l'ont instantanément remarquée. En fait, s'il l'on faisait bien attention on en découvrait d'autres camouflées parmi les feuilles en forme de cœur. Comme elles étaient trop loin pour qu'on les embrasse (on ne sait jamais), Eliott tenta de leur cracher dessus, sans succès. Elles ne bougèrent pas d'un cil. Nous les avons laissées à leur bain de soleil pour admirer L'homme de bois de Fabrice Hyber, un géant d'où coule de l'eau par tous les orifices (tous, on vous dit, même si les guides en évitent soigneusement le détail) et qui devrait se végétaliser ainsi d'ici septembre grâce aux mousses et fougères que l'humidité favorise. Il fait partie du Voyage à Nantes, des installations contemporaines et des expositions comme celle de Pierrick Sorin qui sont présentées jusqu'au 8 septembre et que l'on peut rencontrer en suivant une ligne verte peinte sur les trottoirs de la ville. Certaines deviendront pérennes.
Nous sommes rentrés à Indre où Will Guthrie présentait le travail de ses élèves batteurs et joueurs de gamelan dans un jardin près du port. Il était temps que je regagne mes pénates pour préparer le grand départ.

lundi 10 juin 2024

Utopie urbaine de Christiania


Retour sur un voyage au Danemark. Quatrième article qui me permet d'un peu reposer mes yeux attaqués par les graminées. Cela gratte horriblement. Je pensais être débarrassé de ce fléau qui m'affligeait adolescent. Je me souviens d'un voyage en Suède où, sur l'île d'Öland, la seule chose qui me calmait était de m'immerger totalement dans la Baltique les yeux ouverts. Ce n'est pas loin. On peut voir la Suède depuis Copenhague. Et puis le Levofree fait enfin de l'effet. Quant à l'Innovair qui a calmé ma toux monstrueuse, je me demande s'il n'assèche pas mes sinus. Conclusion, j'ai le nez totalement bouché la nuit, ce qui m'empêche de dormir, et m'épuise. Vivement que je sorte de cette spirale infernale ! Retour au 17 juillet 2012, en attendant le grand départ cet été...

Après un délicieux et revigorant déjeuner végétarien au Morgenstedet nous avons réenfourché nos vélos pour un tour et demi-tour du lac de Christiania [...]. Nous avons pu ainsi admirer la liberté de construction dont jouissent les habitants. Cela tient du bricolage, du système D et d'une imagination débridée. D'anciens bâtiments de l'Armée sont restaurés, on trouve beaucoup de maisons en bois contrairement à la ville de Copenhague, d'autres font des expériences avec du verre, de la résine ou de la terre herbeuse.


Il n'y a que dans Pusher Street que les photos sont interdites. Pourtant les étalages sont attrayants avec leurs petites étiquettes aux noms évocateurs de paradis pas si lointains, mais pour le coup artificiels. Ailleurs je me fais discret lorsque j'appuie sur le bouton. Le vent souffle dans les arbres. Le silence est une des caractéristiques de Copenhague. Hormis quelques rares grands axes, pendant toute la semaine on se serait cru un dimanche ! Même pas l'ombre d'un policier dans toute la ville au bout de huit jours, sauf une sortie nocturne "à l'américaine" avec phares bleus et sirènes de quatre voitures se suivant à fond la caisse et demi-tour penaud à peine deux minutes plus tard, style on existe, cette alerte ressemblant plutôt à la parade de Buffalo Bill ! Une ville et des gens très cool, qu'on vous dit... Cela ne signifie pas qu'il ne se passe rien. Le fait-divers local met en scène un jeune afghan à peine naturalisé, retrouvé un matin dévoré par les tigres du zoo sans que l'on sache s'il s'agit d'un suicide, d'un accident ou d'un règlement de comptes. Bon début pour un polar nordique !

vendredi 10 mai 2024

De Nantes à Copenhague


Je ne suis pas à Copenhague, mais près de Nantes. Après avoir traversé la Loire, qui coule en bas de la maison, grâce au bac qui s'appelle Lola, nous grimpons dans les bois. Lola, celle qui dit v'le l'bateau, v'la l'samedi, v'la des matelots... J'ai terminé l'excellent numéro spécial Jacques Demy édité par Les Cahiers du Cinéma sous la direction de Thierry Jousse, j'y reviendrai certainement... J'admire les fleurs des champs qui sont de toutes les couleurs. Mais pour l'instant, je republie cet article du 16 juillet 2012 qui fait suite à deux autres publiés récemment. La mémoire se travaille comme les autres temps. Il s'agit aussi de réactualiser les liens hypertexte que seuls ce blog original et son miroir sur Mediapart autorisent.

La nuit tombe sur Nørrebrogade comme une toile peinte derrière un décor de carton-pâte. Nous sortons d'un étonnant spectacle de la troupe We Go. Le titre de sa nouvelle création est explicite : Music From Movement. La musique découle directement des gestes des danseurs qui s'y collent tandis que les musiciens bougent comme des fous. La fusion diabolique apporte un humour ravageur aux mondes du concert rock et du ballet qui en prennent pour leur grade. Les rythmes mécaniques et les facéties acrobatiques rappellent un peu la première période de Frank Zappa. L'excitation et le plaisir des interprètes sont communicatifs.


La compagnie We Go, fondée à Copenhague en 2004 par le compositeur Niels Bjerg et la chorégraphe Kirstine Kyhl Andersen, est composée d'une dizaine de protagonistes d'un peu partout en Europe. Une aubaine pour les organisateurs de spectacles désirant renouveler leur programmation ! La photographie des haricots sauteurs est d'Anna van Kooij. J'évite de prendre des photos si cela risque de gêner les acteurs ou les spectateurs. Sur scène ils sont sept en justaucorps rouge avec autant de guitares, plus percussion et petits instruments électroniques portables.


Nous passons toute la journée du lendemain à Louisiana, magnifique musée d'art moderne et contemporain situé à trente minutes au nord de Copenhague. Dans un théâtre de verdure, plusieurs bâtiments à l'architecture astucieuse abritent une collection d'œuvres remarquablement choisies. On entre, on sort, on s'y perd et s'y retrouve. Le panorama offre une vue imprenable sur la mer baltique et la Suède. Les plus grands sculpteurs sont exposés au milieu de la nature, entourés d'oiseaux.
Pink Caviar présente les acquisitions 2009-2011, mais c'est Five Car Stud qui me fait la plus grosse impression. Je suis un fan d'Edward Kienholz depuis 1970, mais cette œuvre déterminante est légèrement postérieure à la rétrospective du CNAC rue Berryer qui me marqua alors si fort. Cet artiste dont il est difficile de voir les œuvres et même de trouver des livres qui lui sont consacrés est pourtant une clef pour comprendre les années 60. J'écrirai probablement bientôt un article sur cette installation montrant un groupe de blancs lynchant un noir éclairés par les phares de cinq voitures, le castrant devant un jeune garçon et une femme restés à l'écart. Le public traînant ses chaussures dans le sable fait figure de témoin passif devant la scène abominable. J'en fais des cauchemars la nuit suivante.

mardi 7 mai 2024

Repos bien mérité !


"Repos bien mérité !" se serait écriée Aliénor d'Acquitaine, depuis huit-cent-vingt-ans allongée à côté de son mari Henri II Pantagenêt et de son fils Richard Cœur de Lion dans l'église abbatiale de Fontevraud. Elle avait d'abord été mariée quinze ans à Louis VII, dit le jeune, avant d'épouser celui qui la tiendrait quinze autres années en captivité avant d'être délivrée par son fils chéri pour qui elle réunit la rançon lorsque celui-ci fut capturé par le duc Léopold V de Babenberg et livré à l'empereur Henri VI. Depuis la légende de Robin des Bois on se souvient que son jeune frère Jean-sans-Terre lui avait piqué sa place en son absence. En fait l'exclamation n'est évidemment pas d'Aléonor, mais de ma pomme, heureux de m'être échappé sans peine de la capitale. Comprendre comment on passe de reine de France à reine d'Angleterre demande à ce qu'on se penche sérieusement sur cette histoire. C'est elle qui a voulu que son gisant polychrome lise un bouquin. Sous la voûte somptueuse de l'abbaye de Notre-Dame de Fontevraud, se trouvent à côté d'elle Henri II, Richard et Isabelle d'Acquitaine, la femme de Jean-sans-Terre, allez-y y comprendre quelque chose, d'autant que les historiens s'écharpent pour savoir si elle était ou non infidèle, mécène, etcétéra. En tout cas ce fut une forte femme qui mourut à 82 ans, pas mal pour l'époque...


La visite de l'abbaye royale est extraordinaire, d'une richesse incroyable, tant pour l'architecture que pour les us et coutumes des moniales, sans compter sa transformation en prison par Napoléon, ce qui a certainement préservé l'état de l'ensemble, puisqu'elle ne ferma qu'en 1963. Jean Genet, rien à voir avec les Plantagenêt, interné trois ans dans la Colonie agricole et pénitentiaire de Mettray lorsqu'il était très jeune, écrivit dans Miracle de la rose : « De toutes les centrales de France, Fontevrault est la plus troublante. C’est elle qui m’a donné la plus forte impression de détresse et de désolation, et je sais que les détenus qui ont connu d’autres prisons ont éprouvé, à l’entendre nommer même, une émotion, une souffrance, comparables aux miennes. » En visitant l'église, le cloître et la cour Saint-Benoît, le dortoir et le réfectoire, j'ai trouvé remarquable l'appareillage pédagogique des grands écrans disséminés un peu partout avec des petits films offrant des réponses claires à toutes les questions que nous nous posons. Idem en ce qui concerne la galerie pénitentiaire et la cour de l'écrou à l'incroyable dôme en écailles.


Ce fut jadis la plus grande communauté de moniales contemplatives d'Europe, pouvant accueillir jusqu'à 700 personnes. L'après-midi nous profitons du mauvais temps pour visiter le Musée d'Art Moderne qui abrite la collection personnelle de Martine et Léon Cligman. Je suis particulièrement séduit par les nombreuses sculptures de Germaine Richier dont ses personnages d'un jeu d'échec géant, celle d'un sumérien en prière ou un auto-portrait de dos du jeune Toulouse-Lautrec sur lequel je reviendrai un de ces jours. Comme chez Gulbenkian à Lisbonne, j'aime la confrontation des époques et des continents propres à ces collectionneurs privés du début du XXe siècle.


Nous avons la chance d'arpenter les lieux la nuit tombée. L'église abbatiale est totalement déserte. Au milieu se tient un personnage en céramique, sa propre tête entre ses mains, portrait d'un jeune homme en Saint Denis par Pascal Convert. Lorsque nous pénétrons dans le cloitre seuls s'y meuvent quelques fantômes, mais ce sont les nôtres dont nous apercevons les ombres de l'autre côté du jardin.