mardi 31 mai 2016
Journal napolitain : 2/Herculanum
Par Jean-Jacques Birgé,
mardi 31 mai 2016 à 00:19 :: Voyage
Le Circumvesuviana est une sorte de RER qui s'arrête toutes les deux minutes jusqu'à Sorrento le long de la côte amalfitaine, mais nous faisons halte à Ercolano Scavi pour visiter les ruines d'Herculanum. Françoise et moi ne connaissons que Pompéi, mais Yann-Yvon avait raison de nous indiquer cette petite cité ensevelie sous quinze mètres de lave et dégagée au fur et à mesure depuis le XVIIe siècle. Les fouilles n'ont permis de n'en dégager qu'un quart, car le reste est enfoui sous les immeubles modernes.
Le mot "moderne" sonne bizarrement à la vue des cages à poules où vit une population très pauvre. La pauvreté de la région contraste avec les villas excentrées des riches. Je connais mal les implications de la comorra dans la société napolitaine, sa présence restant discrète pour un touriste. Dans une rue qui longe les fouilles, une plaque rappelle "la mort accidentelle d'un jeune innocent victime du crime organisé".
Bien que nous n'ayons souscrit aucun abonnement local le plan de mon iPhone affiche notre position, ce qui est bien pratique dans le dédale napolitain. Vous connaissez la chanson, le linge sèche aux fenêtres, de petits kakous qui n'ont pas quatorze ans font des courses de scooters dans les rues étroites... Le concert de klaxons est définitivement moins touffu et moins musical qu'au siècle dernier ! Le Vésuve semble assagi. Nous nous régalons de sfogliatelle qui sortent du four, spécialité de la Campanie composée de ricotta parfumée à la vanille ou à la canelle avec des petites morceaux de fruits confits, le tout enveloppé dans une pâte feuilletée. Comme un fait exprès l'Antico Forno delle Sflogliatelle Calde Fratelli Attanasio est à deux pas de notre hôtel !
Chaque fois que je pense à la ricotta je pense au sketch sublime de Pier Paolo Pasolini dans le film collectif Ro.Go.Pa.G. où Orson Welles tient le rôle du réalisateur. Cette dénonciation de la pauvreté face à l'opulence de l'Église valut à Pasolini une condamnation à quatre mois de prison qu'il évita en payant une amende. C'est avec Uccellacci e uccelini et Che cose sono le nuvole ? mon préféré de ses films.
En marchant via dei Tribunali je trouve un amusant sistre articulé où sont cloués de petits crotales. Mais c'est au magnétophone que j'attrape la véritable musique de Napoli, incessant brouhaha, les cris des fêtards succédant au vacarme de la circulation, le montage du marché s'effaçant derrière la harangue des camelots.