70 Voyage - août 2024 - Jean-Jacques Birgé

Jean-Jacques Birgé

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vendredi 30 août 2024

Iquitos, huitième étape


La compagnie Latam, égale à elle-même, à deux heures de retard, mais nous réussissons à attraper notre correspondance pour Iquitos puisqu'il faut repasser par Lima pour remonter en Amazonie. Il n'existe aucune route. L'autre solution est le bateau, mais les navires marchands mettent des jours et des jours. Iquitos est comme une île au milieu de la forêt.


C'est la seule grande ville du monde (500 000 habitants) à n'avoir aucun accès routier. Avec ses triporteurs à moteur, sa circulation intense, ses marchés odoriférants, sa pollution aussi, on se croirait en Asie du Sud-Est. Nous n'y faisons halte qu'une nuit, le temps que je goûte le ragoût de caïman.


Au marché j'essaie de reconnaître les poissons. Nous continuons à manger du ceviche partout où nous allons, car on en pêche aussi dans les lacs et les rivières. Ici nous goûterons, entre autres, paiches et piranhas. Les piranhas n'attaquent jamais une proie en mouvement à moins qu'elle ne saigne. On peut donc se baigner parmi eux sans danger.


Partout où nous allons nous privilégions la marche à pied aux taxis et moto-taxis, histoire d'appréhender la vie quotidienne. Alors, "a marché, a beaucoup marché", pas qu'entre Denges et Denezy ! J'ai heureusement écouté le conseil de ma fille d'acquérir, avant de partir, de bonnes chaussures de marche.


Une "vedette" rapide doit nous emmener sur l'Amazone pour rejoindre le lodge "de luxe" où nous allons passer six jours, en fait deux lieux différents qui nous permettront d'appréhender la rain forest, la forêt amazonienne, la jungle, avec ses plantes dangereuses et ses animaux que l'on n'apercevra forcément que de loin. Pour les voir de près autant aller au zoo (« avec zizi, c'est ma petite amie !»), ce que nous ferons la semaine prochaine à Tarapoto, en visitant Urku, centre de sauvetage d'animaux saisis à des trafiquants : tapir, iguane, ocelot, tortues, etc.


En attendant, je photographie un chien noir sans poils, spécialité péruvienne. Leurs quelques poils sur le caillou, certains même blonds, les font ressembler à des punks !

jeudi 29 août 2024

Machupicchu, septième étape


Le train qui nous emmène à Aguas Calientes roule en moyenne à 25 km/h. En France on appellerait cela un tortillard. Il faut quatre heures pour faire 90 km ! Des enfants hurlent. Le responsable du wagon nous sert un gobelet d'eau. El condor passa est diffusé en boucle. Je déteste ce genre de musique. Que c'est bon quand ça s'arrête ! Ailleurs nous entendrons des musiques péruviennes autrement plus variées, même si Yma Sumac reste étonnamment absente.


Cette ville artificielle fut construite pour alimenter Machu Picchu. Elle est constituée d'hôtels, de restaurants et de vendeurs d'artisanat local. Les rues ressemblent aux travées d'un énorme magasin de souvenirs. Nous avons bien fait de choisir la visite de 7h du matin, pour faire la queue dès 5h30 au bus qui monte à l'une des sept merveilles du monde. Elle est si longue, je n'en vois pas le bout, que celle de la Tour Eiffel semblerait minuscule.


Pourtant nous arpenterons Machu Picchu sans presque personne. À un ami qui le remarque en regardant les photos que je mets en ligne sur FaceBook et Instagram, Bernard Cavanna répond, avec l'humour dont il ne se dépare jamais, que les Espagnols les ont tous tués !


On a beau en avoir vu tant d'images, la cité inca produit un effet exceptionnel. D'abord par sa situation sur la Cordillère des Andes, ensuite pour l'état de conservation de ses ruines du XVe siècle. L'endroit est magique. On comprend pourquoi les Incas y ont construit le Temple du soleil. Souvent, pendant notre voyage, nous penserons à l'album de Tintin. C'est probablement sa lecture qui nous a transportés jusqu'ici. Combien y a-t-il fallu d'esclaves pour monter ces pierres ? Combien de sacrifices humains pour amadouer les dieux ?


J'avais illustré mon premier article avec une photo où le soleil naissait au milieu des nuages, comme un rond de fumée percé par une gloire. Je prends un peu de recul et j'intègre les vestiges de Machu Picchu et des rochers qui auront peut-être été idolâtrés il y a 500 ans. Je ne suis pas mystique, mais le lieu est chargé. On y sent des forces telluriques toujours à l'œuvre.


Des lamas paissent sur les terrasses en espaliers. Le soleil monte vite. J'ai très chaud, mais je crois que c'est dû à l'effort. En Amazonie nous serons en terrain plat, et dès que je serai monté dans l'avion je retrouverai mon souffle.

mercredi 28 août 2024

La Vallée Sacrée, sixième étape


Nous sommes juste sous les 4000 mètres sur les sites de Chinchero, Morey, Maras, Ollantaytambo, Pisac, mais ce jour-là, coup de chance, je suis moins sensible à l'altitude. Nous avons heureusement choisi d'alterner un jour d'excursion avec un jour de repos. Façon de parler, car plus nous avançons, puis le soroche nous épuise dès que nous retournons à Cuzco. Le pire fut le pisco sour de Cicciolina dégusté avant un succulent steak d'alpaga. L'altitude multiplie par trois les effets de l'alcool dans mon sang, alors trois pisco sour, et je dois me tenir aux murs pour grimper jusqu'à notre havre de paix. En montant dans le minibus qui nous emmène dans la vallée, j'oublie ces expériences épuisantes.


Nous nous arrêtons d'abord à Chinchero. Une jeune femme file la laine de lama et je trouve finalement des gants à la taille d'Eliott.


Par terre d'autres femmes ramassent des pommes de terre noires qu'elles ont fait sécher au soleil pour les déshydrater.


Après les cultures en espaliers de l'époque inca à Morey, terrasses en restanques (murs de soutènement), terre fertile et canaux d'irrigation permettant de cultiver plus de 250 espèces de plantes, le spectacle des mines de sel de Maras est phénoménal.


Cela ressemble aux cuves des teinturiers marocains. En gigantesque. Ou à des tableaux de Hundertwasser ou Alechinsky. En fait de mines ce sont plutôt des marais salants qui datent de la période pré-inca. L'eau salée, du chlorure de sodium, qui coule de la montagne entre dans chaque cuve par un petit trou. Aujourd'hui, près de 800 familles sont organisées en coopérative pour gérer les 3 600 bassins produisant jusqu'à 200 tonnes annuelles de ce sel rose étonnant et délicieux, cousin de celui de l'Himalaya. Mais les autochtones ne peuvent pas se l'offrir et achètent leur sel bas de gamme en Bolivie. Pourtant cela ne coûte pas grand chose. Leur niveau de vie est évidemment très loin du nôtre.


Pour l'équivalent de 25 euros nous nous baladons ainsi en minibus toute la journée, déjeuner compris à Urubamba. À Ollantaytambo nous passons notre tour, trop fatigués pour emprunter les 435 marches et optons pour des glaces aux fruits exotiques locaux et au chocolat de Cuzco. Nous ratons la forteresse de porphyre rouge.


Arrivés après la fermeture de Pisac, nous réussissons tout de même à pénétrer dans ce somptueux site archéologique grâce à l'astucieux Richard, notre guide d'origine inca, aussi drôle que savant. Le spectacle réside autant dans les ruines que dans le paysage qu'elles surplombent. Nous rentrons à la nuit tombée. Il faut se souvenir qu'ici c'est l'hiver. Le soleil se couche vers 17h30.


Je ne résiste pas à courir après des alpagas pour envoyer leurs frimousses à mon petit-fils. Comme lamas très contents, ainsi nous au sec.

mardi 27 août 2024

Cuzco, cinquième étape


Cuzco est notre cinquième étape et non des moindres. Nous avons loué pour la semaine un studio avec une vue imprenable sur la ville. Entièrement vitrée, la maison offre un panorama incroyable, car nous sommes tout en haut, même très haut, puisque Sacsayhuamán est juste derrière nous, légèrement au-dessus, ce que nous ressentirons fortement lorsqu'il s'agira de visiter cet impressionnant site inca, situé à 3700 mètres d'altitude. Les murs en zigzag de la forteresse (planche 56 des aventures de Tintin), également centre religieux dédié au Soleil et à d'autres dieux, sont constitués de pierres gigantesques dont on peut s'interroger sur comment elles sont arrivées là. Les blocs de calcaire, qui pèsent entre 120 et 200 tonnes chacun, sont assemblés sans lien entre eux. Le lieu est immense, hallucinant. Nous y montons en fin de journée pour profiter de l'absence de touristes, mais tout au long du voyage nous serons surpris de nous retrouver en tout petit comité.


L'inconvénient, c'est que nous avons à grimper chaque fois que nous descendons au centre-ville, vers la Plaza de Armas, où trône la cathédrale. Heureusement le quartier San Blas n'est pas très loin de notre résidence. Le coin est charmant avec ses ruelles pavées de galets, découpées en leur centre par un profond caniveau, bordées de vieux murs de pierre incas.


Deuxième inconvénient auquel nous pensions échapper, le soroche, le mal des montagnes qui me terrassait déjà sur le lac Titikaka. Cuzco est à 3400 mètres. Difficulté de respirer, grosse fatigue.


Le matin nous descendons prendre un exquis petit déjeuner végétarien chez Qura avant de courir les magasins pour répondre aux désirs de la famille qui a pris ses quartiers d'été à L'île Tudy, Finistère sud, rituel d'autant plus justifié cette année que ma fille Elsa accouchera à Quimper le jour de notre retour. Merveilleuse nouvelle, la bambinette est née coiffée. En attendant, la perte d'appétit nous entraîne à sauter le dîner. Nous nous régalons le midi chez Greenpoint ou Pachapapa à San Blas. Le soir un empanadas ou rien du tout. Il faut dire que les nuits très très fraîches ne nous poussent pas à sortir lorsqu'elle est tombée. Par contre le jour, au soleil, on peut se promener en bras de chemise. Les maisons sont mal ou pas chauffées du tout, très mal isolées. L'air glacial passe entre les vitres coulissantes.


Je m'intéresse toujours aux petits détails qui peuvent en dire long sur les coutumes des peuples dont nous découvrons le pays. Par exemple, les douches sont dite "pluie", sans flexible, ce qui n'est vraiment pas pratique. La vétusté des canalisations interdit de jeter du papier dans les toilettes comme dans beaucoup de pays pauvres, mais on est loin de l'hygiène des douchettes des pays arabes ou de la casserole de ceux du sud-est asiatique. Comme ce détail peut surprendre sous ma plume, je précise qu'à la maison j'ai installé le système Boku, dit toilettes japonaises à la française. En voyage ces détails sont effectivement déterminants, un peu comme la tolérance à d'autres cuisines que la nôtre. Nous avons choisi de nous poser une semaine à Cuzco pour prendre le temps de visiter la Vallée Sacrée et l'une des sept merveilles du monde, Machu Picchu.

vendredi 23 août 2024

Puno, troisième étape


Nous avons beau avoir tout réservé, rien ne se passe en effet comme prévu. Le très confortable bus de la compagnie Cruz del Sur a pris plus de deux heures pour réparer une roue crevée au milieu de nulle part. La nuit était tombée, nous étions condamnés à ne pas quitter nos sièges et nous ignorions tout de la panne. Arrivé tardivement à Puno, je me suis rendu compte qu'il m'était très difficile de respirer. Le mal de hauteurs ! À 3812 mètres le lac Titikaka est le plus haut du monde, du moins parmi les navigables. Heureusement la Casa Panq'arani est très agréable. Des fleurs, des oiseaux, des chats et des hôtes très gentils. Nous ne voulions pas tout réserver à l'avance, mais les meilleurs endroits sont très tôt pris d'assaut et certains sites, comme le Machu Picchu, sont contingentés. Nous avons rencontré des touristes qui avaient fait le voyage pour rien, refoulés à l'entrée. Nous avions compulsé le Lonely Planet et le Guide du routard, étudié maints sites Internet, récolté les conseils de précédents voyageurs ou d'amis péruviens, nous y prenant plusieurs mois en amont. C'était prudent, car ayant laissé en suspens les trajets en bus, il ne restait plus que deux places quatre jours avant la traversée. Nous avons eu chaud. Façon de parler...


La bonne idée avait été d'acheter des pulls en baby alpaga à Arequipa, car ici il fait très froid lorsqu'on n'est pas au soleil. La nuit, le thermomètre descend en dessous de zéro et les chambres ne sont pas chauffées. De plus, les fenêtres ne sont pas jointives et l'air glacial passe entre. Les Péruviens vivent en anorak à l'intérieur de leur maison. Notre panoplie comporte donc bonnets, gants, écharpes, chauffrettes. J'en ai trouvé des électriques qui se rechargent en USB. Autres gadgets acquis avant de partir, des AirTags permettant de localiser nos valises. Ce genre de gadget peut être utile à condition de n'y avoir recours qu'en cas de problème, sinon cela rajoute simplement de l'angoisse pour rien.


En sortant ce matin nous avons croisé un enterrement. J'ai raté la photo de l'impressionnante procession, mais j'ai enregistré les musiciens qui l'accompagnaient. Guitare, basse, accordéon, avec la sono sur roulettes pour qu'on les entende jusqu'aux premiers marcheurs.


Ce n'est pas tout ça, le taxi vient nous chercher pour nous emmener au port où nous devons embarquer pour les îles flottantes Uros.

jeudi 22 août 2024

Arequipa, deuxième étape


C'est l'hiver au Pérou. Il faisait bon à Lima, mais nous avons trouvé le ciel bleu à Arequipa, bien que les nuits y soient frisquettes. C'est un des points qui m'inquiétaient un peu avant de partir. Le soleil nous ayant cruellement manqué à Paris cette année, quelle drôle d'idée d'aller passer ces semaines de juillet-août dans l'hémisphère sud où les saisons comme les gens marchent la tête en bas. L'attraction de l'exotisme comme celle dite terrestre eurent raison de nos inquiétudes. Certes le siphon des toilettes tourne dans le sens contraire de chez nous, mais les différences de hauteur sont ici plus importantes que la latitude. Lima est au bord de l'Océan Pacifique, mais Arequipa est déjà à 2300 mètres de haut et nous allons dépasser les 4000 mètres avec l'appréhension du mal des montagnes qu'ici chacun/e redoute. Nous nous sommes entraînés à mâcher des feuilles de coca pour atténuer les effets hypothétiques désagréables que certain/e/s subissent, mais c'est franchement dégueulasse, enfin pas tant que ça, juste un peu amer ; le problème est que chiquer en laisse plein les dents. De l'autre côté de la frontière on appelle même cela le sourire bolivien ! Donc plutôt que mastiquer ses feuilles sèches qui finissent en boule sous les joues, nous avons acheté en pharmacie un mélange de coca, guarana et gingembre. On verra plus tard que cela n'eut que peu d'effet, ou, sinon, dans quel état aurions-nous subi le soroche sans n'avoir rien essayé ? Lors d'un trek au Népal il y a trente ans, le sherpa nous avait expliqué que ce mal des montagnes peut arriver à n'importe qui, même après des années, et même à lui ! J'espérais passer au travers, par une foi qui frise le mysticisme, mais cette composante de mon caractère obsessionnel n'a pas toujours été à la hauteur de mes espérances.
Dans le jardin de l'Hostal Casona Solar, je réussis à filmer un joli colibri, excité comme une puce, qui butine la corole des fleurs en faisant du surplace devant les chambres en sillar de cette ancienne maison coloniale du XVIIIe siècle. Au son j'avais d'abord cru que c'était un gros insecte.



La visite la plus extraordinaire fut celle du Monestario de Santa Catalina, une petite ville en soi avec ses rues rouges dans lesquelles donnaient les cellules des recluses. Ses 20000 mètres carrés occupent tout un pâté de maisons entouré de hauts murs. Dans ce monastère fondé en 1580 par la riche veuve doña María de Guzmán, les jeunes novices, placées par leurs riches familles, toutes à leurs prières, ne devaient prononcer aucun mot. Quatre ans plus tard, à raison de cent pièces d'or par an, elles pouvaient prononcer leurs vœux ou sinon déshonorer leur famille. Notez qu'elles s'y enfermaient tout de même avec une ou plusieurs domestiques ! Les meilleures cellules possédaient une cuisine, un four à pain et je suppose que le petit coin reculé servait de toilettes. On n'imagine jamais à quel point les gens et leurs espaces de vie devaient puer à cette époque-là... Promenade superbe, à la découverte des peintures réalisées par les nonnes, des cloîtres, du réfectoire commun, du clocher, de la chambre mortuaire (salle dite De Profondis), de la chapelle et du petit labyrinthe qui les dessert.



L'autre attraction touristique est le Museo Santuarios Andinos où est exposée la "momie" de Juanita, une jeune inca découverte gelée au sommet du Mont Nevado Ampato en 1995. La glace conserva son corps quasiment intact depuis le XVe siècle. Lors de notre visite, Juanita étant stockée au congélateur à cause de la chaleur saisonnière, est exposée une réplique fidèle à l'originale. Nombreux objets trouvés dans sa tombe permettent à notre guide de détailler la longue préparation et les conditions des sacrifices humains dont étaient souvent victimes de jeunes enfants, préparés au supplice depuis leur naissance, en offrande à leurs dieux.




Ma petite sœur m'avait prévenu, ce que je savais déjà: tout ne se passe jamais comme prévu lors d'un voyage comme le nôtre. Nous en avions déjà fait les frais avec un retard de cinq heures de la compagnie low-cost chilienne Sky, mais le guano d'un urubu nous contraria vivement. Comment ce petit vautour a-t-il réussi à nous repeindre en vert tous les deux en même temps, c'est un mystère. Je n'avais jamais été recouvert de ma vie d'autant de merde. Heureusement c'est parti à l'eau et, après un nettoyage ardu mais réussi, nous en fûmes pour une bonne rigolade. À propos de fumée, en cinq semaines je n'ai croisé absolument personne avec une cigarette au bec, excepté ma compagne dont personne ne semblait remarquer cet appendice incongru.

mercredi 21 août 2024

Lima, première étape (2)


Nous étions évidemment sur les traces de Tintin et Milou, périple qui nous mènerait jusqu'au Temple du Soleil à Machupicchu. Mais pour le moment, c'était plutôt L'oreille cassée qui était évoqué dans le plus beau musée de Lima, le Museo Larco. Fondée en 1926 par l'archéologue et collectionneur Rafael Larco Hoyle, cette collection privée d'art préhispanique est à tomber à la renverse. En marge des galeries présentant les plus belles pièces, on peut visiter, ce qui est rare dans un musée, ses réserves, soit plus de 50 000 objets.


Les cultures cupisnique, chimú, chancay, nazca et inca y sont représentées. Les vases, bijoux, instruments de musique, textiles sont remarquablement éclairés, offrant un spectacle incroyable d'art précolombien. Certaines pièces montrent que les indigènes n'attendirent pas les Espagnols pour vivre de manière saignante, les civilisations se succédant parfois dans une extrême violence. Car il n'y eut pas que des sacrifices humains pour plaire aux dieux, mais surtout des guerres meurtrières frisant régulièrement le génocide. Je ne vais pas me lancer ici dans une histoire du Pérou, mais il est important de comprendre que, pour que Francisco Pizzaro en prenne le contrôle avec seulement 168 hommes, il fallait que l'empire inca soit déjà affaibli par des guerres civiles qui les opposaient aux autres peuples andins, et également des épidémies ravageuses. Avide de voler l'or et tout ce qu'ils pourront rapporter en Espagne, les conquistadors trahiront leurs engagements, s'entredéchireront, en faisant régner la terreur. Si l'on compare avec le reste du monde, à ces époques-là particulièrement, jusqu'à notre propre territoire qu'on appelle la France, nous n'avons pourtant pas de leçon à donner en ce qui concerne la barbarie humaine !


Ces tiares, bijoux de nez, boucles d'oreille et parures chimús en argent ne devaient pas être faciles à porter ! Elles datent de l'époque impériale (1300-1532 après J.C.).


Pareil pour cette magnifique tiare et le reste des bijoux en or massif... Le site du Museo Larco offre de nombreux détails, photos et explications sur les différentes cultures exposées.


Le jardin, qui abrite cette demeure du XVIIIe siècle, ancienne résidence d'un vice-roi, offre un cadre paisible et particulièrement agréable, avant de rejoindre le bâtiment exposant une belle collection d'objets érotiques des périodes préhispaniques.


La veille nous avions visité le MALI (Museo de Arte de Lima) qui présente des œuvres depuis l'époque précolombienne jusqu'à nos jours. Le contorsionniste cupisnique, étonnant vase datant de 3000 ans avant J.C., est le symbole du MALI.


Au rez-de-chaussée je me balance sur des fauteuils-toupies contemporains dont il m'a été impossible de trouver l'astucieux auteur.


Après la visite du MAC, petit musée d'art contemporain proche de notre hôtel, du Monestario de San Francisco et de ses catacombes, un bon pisco sour au Bar Piselli me remet en jambes. Lorsque cela ne suffit pas, j'utilise le Theragun qui est désormais de tous mes voyages. Il m'évite les courbatures et fait disparaître la moindre douleur musculaire !

mardi 20 août 2024

Lima, première étape (1)


La première image forte fut celle du Pacifique. Je ne l'avais vu que deux fois, depuis la côte ouest des États Unis en 1968 et en 2000. À Lima il fait souvent gris. La capitale péruvienne n'a pas la réputation d'une ville particulièrement excitante, peut-être à cause de ses embouteillages et de la pollution qu'ils provoquent. C'est une idée idiote, car il n'est pas d'endroit où notre curiosité ne peut s'exercer. En choisissant le quartier de Barranco, nous y avons vécu d'agréables promenades loin du tumulte limanien...


Même si le jour de notre arrivée nous sommes tombés sur la commémoration de l'anniversaire des 150 ans du quartier... Devant la tribune officielle, où les discours hagiographiques étaient diffusés par des haut-parleurs surpuissants, défilaient les écoles, les associations culturelles et sportives, les pompiers, les employés de la ville, tous et toutes dans leurs uniformes de travail. C'était la fête, et nous en prîmes notre part !


Ce sont pourtant les ceviche de la Canta Rana, il y en a dix-sept au menu, qui nous mirent le pied "à les trier". J'ai, par exemple adoré celui aux coquilles saint-jacques noires. Car, entre les guides et les conseils d'amis, il faut toujours faire son chemin à la machette. On pourra d'ailleurs s'en resservir d'ici quelques semaines, dans la selva, la forêt amazonienne, pour avancer au milieu des lianes et des arbres aux écorces piquantes ou empoisonnées.


Le riz aux calamars à l'encre de seiche était tout aussi renversant, mais j'aurais pu m'abstenir de le commander en plus ce jour-là tant les portions sont gigantesques. À Lima les plats pour une personne pourraient en nourrir quatre affamées ! Un autre jour, les tripes servies avec du boudin noir haché menu, m'ont fait élire Isolina comme un autre de nos restaurants préférés, parmi ceux abordables du quartier. J'aurais bien essayé certaines grandes tables, le Pérou étant un pays où la gastronomie est luxuriante, mais ils ne sont pas dans nos moyens. De toute manière nous repasserons par Lima à la fin de notre périple, sachant également que chaque région a sa cuisine propre. À notre halte prochaine je pourrais goûter le steak d'alpaga (c'est du lama, l'équivalent pour nous du mouton en terme d'élevage) ou le cuy entier aplati (cochon-dinde, prononcé couille).


L'alpaga fournit aussi une des laines les plus douces au monde, surtout le baby alpaga, la vigogne (petit lama sauvage) atteignant des sommes astronomiques. Nous craquons pour des vêtements aussi chauds que soyeux qui nous seront bien utiles prochainement sur les hauts plateaux. C'est un des beaux souvenirs à rapporter du Pérou. Mais il n'y a pas que la bouffe et le shopping !


S'il n'y avait qu'un lieu à visiter à Lima ce serait indubitablement le musée Larco. Mais ça, c'est une autre histoire que je vous conterai demain.

lundi 19 août 2024

Un rêve d'enfant


Remettre le compteur à zéro est une constante de ma vie, peut-être une obsession, certainement un choix. C'est se demander si l'on est sur la bonne route ou s'il serait temps d'emprunter le chemin des écoliers. Cela vaut pour mon travail, mais aussi pour les grandes décisions, car on ne peut jamais revenir en arrière. Aucun regret n'était envisageable, et la responsabilité remplace ainsi toute culpabilité. Je souhaite donc conserver mes meilleurs souvenirs tant que je suis à même d'en avoir ! Lorsqu'en 1993 je suis revenu du siège de Sarajevo j'ai fait la liste de tout ce que je n'avais pas encore réalisé et dont j'avais rêvé. Cela m'a poussé à quelques bêtises, mais aussi à jouir de certains rêves d'enfant, ou d'homme, tout simplement. La forêt amazonienne fait partie de ces récits d'aventures qui alimentèrent mes jeunes années de découverte. Après le Journal de Tintin mes parents m'avaient abonné à la revue Tout l'univers. Avec les romans de Jules Verne il est probable que Le temple du soleil a décidé de ce que j'allais devenir. Je n'ai pas choisi la carrière d'explorateur, mais la création cinématographique et musicale m'a permis d'arpenter des espaces vierges où l'on pouvait vivre l'inimaginable. Au Laos j'avais adoré la forêt primaire et sur le disque Carnage j'avais déjà envisagé La fièvre verte. C'est la lune pour un petit parisien. Alors, lorsque Christiane a évoqué le Pérou comme destination pour les grandes vacances mon sang n'a fait qu'un tour, un tour d'un monde inconnu, sauvage, dépaysant. J'ai toujours été attiré par les pays dont je ne parle pas la langue. Mon espagnol et si rudimentaire que j'avais néanmoins évité jusqu'ici l'Amérique du Sud. Tant pis, tant mieux, je me lance, d'autant que nous croiserons probablement des Péruviens dans la langue nous est totalement étrangère. Le 12 juillet nous nous sommes donc envolés pour Lima, ce qui avait aussi le mérite de quitter Paris et ses jeux du stade.