La vérité n'existe pas au cinéma. Encore moins qu'ailleurs. Posez une caméra où que ce soit. Quiconque se trouve devant l'objectif se met à jouer. La télévision a perverti le dispositif comme tout ce qu'elle touche. Interviewé, le moindre quidam se comporte instantanément en suivant de supposées conventions, apprises en regardant le petit écran. Les documentaires n'auront plus jamais la fraîcheur d'antan. Ou bien il faudra que le réalisateur assume sa responsabilité et dirige. C'est ce qu'il est censé faire, non ? Restent les histoires. Les plus invraisemblables sont le plus souvent tirées de faits divers réels.
Les personnages croisés dans True Stories sortent des pages du journal que lit David Byrne. C'est le chanteur et guitariste des Talking Heads. Il a composé la musique de True Stories, mais il l'a également mis en scène. On devrait écrire "mise en scènes", avec un s au pluriel, parce qu'on est au cinéma et qu'il y en a toujours beaucoup. C'est un film très personnel, un film musical qui ne ressemble à aucun autre, un livre d'airs qu'on feuillette, une collection de perles, de vraies perles, comme découpées dans le journal avec de bons ciseaux à papier. L'intrigue a peu d'importance. C'est un faux documentaire sur la petite ville de Virgil au Texas, 40 000 habitants, une fiction déguisée. La musique est américaine, les portraits incroyables. David Byrne tient le rôle principal, une sorte de guide et de narrateur. Tourné il y a vingt ans, True Stories est au croisement de la comédie musicale et de l'enquête sociologique. J'ignore s'il est sorti en France. Je viens de le voir en v.o. sans sous-titres, un dvd zone 1 que les amateurs de rock et ceux de cinéma devraient écouter-voir. Les histoires vraies comme celles-ci réfléchissent le monde en mouvement bien mieux que les actualités qui se répètent inlassablement. Faits divers et rock'n roll. Du cinéma, je vous dis !