Après la Patience raisonnée de samedi matin, l'impatience des entrées en scène. Éole et Philou esquissent le même pas de danse en attendant les premiers visiteurs. Admirez l'ensemble sans même avoir besoin de se regarder. Éole, qui a gardé son manteau et son faux-col, a un jeu de jambes qui fait des miracles (voir billet d'hier). Philou, qui s'occupe du vestiaire, est aussi danseur de claquettes. Il gardera ses gants blancs, même pour dîner sans fourchette. Il est le boy en pagne de Thème Je.
La porte est entr'ouverte pour surveiller l'ascenseur transportant les invités. Certains préfèrent gravir à pieds les six étages. Est-ce de la peur ou du courage ?


Louisette, Léon, Isabelle et Gisèle jouent à la canasta sans faire attention à la télévision qui déverse son flux ininterrompu. Assis sur le canapé pour quelques minutes, les frères Goeury se font happer par la comédie de Françoise, Vice Vertu et Vice Versa. Ils en oublient les habitants qui eux-mêmes suivent les consignes de Françoise : ne faire aucun cas des visiteurs qui traverseront toute la soirée leur appartement. Chacun est absorbé par ses activités. Les deux groupes s'ignorent mutuellement. Leurs chemins se seront croisés sans qu'ils ne s'adressent jamais la parole. Annie Gentes suggère qu'il y a une passerelle entre les deux univers, et qu'à certain moment de son existence on aurait pu choisir l'inverse. La tentation de s'engouffrer alors dans l'autre vie devient prenante. Marcher sur le fil, est-ce une forme du border line ? Rien n'est jamais joué.
L'absence d'un des personnages en fait le centre de l'instant saisi par Aldo Sperber. Il n'est signalé que par un petit livre posé sur la table. Son évocation donne tout son pouvoir à l'hors-champ photographique.


Silence. Moment d'écoute. J'aurais dû enregistrer le son des souterrains. Le visiteur ne voit rien, mais il est entouré d'une profusion de signes graphiques dont certains représentent une énigme, un peu comme en musique.


Agnès de Cayeux oscille entre les deux écrans, elle envoie un SMS à un ami pour lui dire de rappliquer dare-dare. Derrière Nicolas Bigards, on entrevoit la Butte Montmartre éclairée par les lumières de la ville. Comme eux, lascivement allongé, Bernard Vitet assiste à la projection d'Appelez-moi Madame. Il est fortement question de le sortir en dvd comme Mix-Up ou Méli-Mélo l'an passé. Regarder les spectateurs depuis l'écran me fait revenir en arrière. Il y a plus de trente ans. Nous assistions à une séance en relief du Frankenstein de Paul Morrissey. Lorsque je me suis retourné sur mon fauteuil, toute la salle portait des lunettes de soleil...


Danièle Obadia regarde Mix-Up ou Méli-Mélo">Mix-Up ou Méli-Mélo dans la chambre du fond. La pratique quotidienne du yoga lui confère un port altier. Aldo Sperber a pris cette photographie et la précédente le samedi 10 mars. Les autres sont du 17.


Dans la salle de bain, la baignoire ressemble à un cercueil où gît Yves dans la boîte à images des Miettes du purgatoire. Ceux et celles qui connaissent le film savent qu'il écoute religieusement de la musique concrète. C'est pourtant le seul survivant du film.


Plus tard dans la soirée, après une centaine de visites, Philou et moi avons l'air moins flamby. Mathilde lit le projet de Françoise, Peep-Chat. J'ai les yeux fermés, mais j'avance toujours.