L'engagement du jeune Antonin Tri Hoang, 19 ans, encore au CNSM, et de l'empêcheuse de tourner en rond Ève Risser, qui vient d'obtenir brillamment son prix, m'a mis la puce à l'oreille. Le contrebassiste-arrangeur Daniel Yvinec, qui prendra la direction artistique de l'Orchestre National de Jazz à partir de septembre, révolutionne-t-il l'institution en formant un orchestre de jeunes musiciens plutôt qu'en réunissant ses potes ou des pointures éprouvées du monde du jazz comme le firent ses prédécesseurs ? Ni une ni deux, je lui propose une rencontre avant mon départ de La Ciotat puisqu'il partage son temps entre Paris et Toulon.
Je connaissais Daniel pour la variété de ses œuvres et son intérêt pour toutes les musiques sans exception, un boulimique passionné, blogueur et chroniqueur dans les mêmes canards où j'opère moi-même de temps en temps, Jazz magazine et Muziq. Je ne suis pas déçu, la curiosité et la générosité de celui qui se fait aussi appeler Yvinek lorsqu'il s'électrifie guident ses choix, tant pour la constitution et l'organisation de l'ensemble de dix musiciens que pour le répertoire à créer. De mèche avec Mohamed Gastli qui assure la coordination artistique, Daniel fait passer cent cinquante auditions, plus ou moins informelles, il arpente les conservatoires, lance des sondes téléphoniques, apprend comment fonctionne la machine ONJ, et accouche d'une distribution étonnante, puisqu'elle réunit essentiellement de jeunes musiciens pour la plupart encore inconnus, des personnalités fortes, poly-instrumentistes de préférence, curieuses de toutes les musiques, aptes à travailler collectivement, des gentils comme j'aime les appeler. L'orchestre n'a rien d'un big band ou d'un ensemble équilibré dans les normes de la convention, pas de tromboniste (parce qu'aucun n'était assez poly-instrumentiste), pas de vibraphoniste, mais pas mal de jeunes gens doués pour les instruments électroniques et l'informatique.
En marge de l'entretien de deux heures que je dois encore décrypter, je vous livre donc d'abord la composition de ce tentet qui met l'eau à la bouche.

Ève Risser piano préparé / flûtes en sol, alto et basse / électrophone / instruments jouets
Paul Brousseau clavier / guitare / percussions / basse & basse électronique / batterie / effets électroniques
Pierre Perchaud guitares acoustique et électrique / banjo / dobro
Jocelyn Miennel flûtes en sol, alto et basse / saxophones soprano, alto, soprano, ténor et baryton / clavier / traitements électroniques
Rémi Dumoulin saxophones soprano, alto et baryton / clarinette & clarinette basse
Matthieu Metzger saxophones alto, soprano, ténor / traitement électro-acoustique / programmation éléctronique
Antonin Tri Hoang saxophone alto, clarinette, clarinette basse / piano
Guillaume Poncelet trompette / piano et Rhodes / synthétiseur, effets électroniques
Yoann Serra batterie
et un bassiste dont le nom n'est pas encore définitif au moment où je tape ces lignes, d'autant que Daniel ne jouera pas dans l'orchestre, préférant garder le recul sur la musique en jouant à fond son rôle de directeur artistique.

Dès les premières présentations publiques, les musiciens auront le loisir de présenter des petites formes pour apprendre à se connaître et à se faire connaître. La programmation 2009 sera constituée de trois projets :
Around Robert Wyatt, où l'icône pop (ou unpop, comme il préfère lui-même se présenter) aura enregistré sa voix au préalable, l'orchestre l'accompagnant en direct avec des vidéos réalisées par Antoine Carlier.
Broadway in Satin, autour des chansons de Billie Holiday et cette fois avec des chanteurs sur scène.
Carmen, le film muet de Cecil B.DeMille (1915), sera présenté à l'Opéra Comique avec une partition originale et le duo Ambitronix (Benoît Delbecq et Steve Argüelles) en invités libres.
Voilà, c'est un petit aperçu du prochain ONJ, mais je vous retrouve, ici ou ailleurs, dès que j'aurai retranscrit l'entretien avec son nouveau chef, un musicien épris d'aventures, qui ne craint pas de prendre des risques pour imaginer de nouvelles couleurs orchestrales, timbres inouïs qui devront coller chaque fois au projet rêvé. Ce défi de faire voler les enclumes me fait trépigner d'impatience !