Mad Men est la nouvelle série dont on parlera bientôt avec des étoiles dans les yeux. C'est encore une fois par la télévision que le cinéma américain populaire se renouvelle. La première saison du feuilleton, diffusée au printemps dernier sur TPS Star, a certes moins de fantaisie que Six Feet Under, la référence du genre, mais elle est autrement plus profonde et plus critique. Le monde impitoyable de la publicité sert essentiellement de toile de fond a un portrait au vitriol des rapports hommes-femmes.
En la situant en 1961, Matthew Weiner, un des scénaristes des Sopranos, évoque notre actualité contemporaine, parce qu'il en montre les fondements. Pour comprendre où nous en sommes, il faut savoir d'où l'on vient et ce qui nous a engendré. On notera les différentes manières de se comporter selon les générations, du vieux patron humaniste au jeune loup sans scrupules en passant par le héros, Don Draper, plus complexe que prévu, sous ses faux airs de tueur impassible. Quant aux femmes, elles sont traitées comme elles le méritent, à savoir que le machisme ambiant est à son comble, les reléguant en Desperate Housewives, obligées à se prostituer dans les limites bourgeoises d'une société qui va devoir se transformer malgré le pouvoir des mâles, ou sacrifiant leur vie privée pour la cause.


Cela a été dit et répété, il n'y a jamais eu autant de cigarettes à l'écran. Tout le monde fume, allume et rallume, la publicité en vantant les mérites. Nous sommes bien le produit de ce que l'on nous a vendu. Les séquelles se feront sentir plus tard. Pierre Klossowski écrit : "Si nul n'échappe au conditionnement, tout revient à savoir ce qui nous conditionne". Petit gag : iTunes a effacé la cigarette du dernier plan du générique, comme en France celle de Jean-Paul Sartre censurée sur un timbre postal à son effigie !
Les acteurs sont comme d'habitude remarquables, le moindre détail si bien étudié que c'en est un plaisir de sophistication scénaristique, les décors, les costumes, le lumière, jusqu'à la musique, d'époque, qui ne se croit pas obligée d'envahir les scènes sentimentales, bien au contraire, préservant leur brutalité brute. Mad Men vient de recevoir six Emmy Awards ! Douglas Sirk y reconnaîtrait ses petits.
Dans la première saison de 13 épisodes, le duel Kennedy-Nixon rappelle furieusement Obama-McCain, tant les attentes sont fortes et que le résultat n'y change pas grand chose. Ici et là, des allusions sociales replongent l'action dans l'actualité de l'époque, l'homosexualité ne peut encore qu'être suggérée... Tandis que la première saison est sortie en zone 1 sous un étui original rappelant le célèbre briquet Zippo, s'annonce déjà la seconde, dont le neuvième épisode est actuellement diffusé aux USA sur la chaîne productrice AMC.