Françoise Romand a mis en ligne la bande annonce de son film Appelez-Moi Madame dont le DVD paraîtra officiellement le 17 novembre, distribué par Doriane (mais que l'on peut recevoir en primeur dès maintenant, pour 20€ port compris, en écrivant à alibiprod@free.fr) et qu'elle fêtera lors de son Ciné-Romand à La Bellevilloise dimanche prochain 26 octobre de 18h à 23h.
Le sujet ? Dans un petit village normand, un militant communiste, marié et père d'un adolescent, devient transsexuel à 55 ans, aidé par sa femme.
À sa sortie en 1987, le célèbre critique du New-York Times, Vincent Canby, écrivait "Miss Romand fait des documentaires uniques. Elle s'attache aux faits mais il y a certaines réalités que peu de romanciers ou écrivains supposés sérieux traiteraient si ce n'est sous des pseudonymes... Dans Appelez-moi Madame, la cinéaste nous fait partager sa curiosité, son étonnement et son regard..." Pour cette édition dont Étienne Mineur a conçu la pochette, Françoise a réalisé deux entretiens, l'un en français, l'autre en anglais, compléments de programme qui tranchent radicalement avec les bonus habituels !

Documentaires ou fictions, tous les films de Françoise Romand interrogent l'identité de ses personnages. Dans Mix-up ou Méli-mélo des bébés sont échangés à la naissance, dans Appelez-moi Madame un militant communiste devient transsexuel à 55 ans, dans Les miettes du purgatoire deux jumeaux vivent en symbiose avec leurs parents très âgés, dans Passé Composé un homme à la recherche douloureuse de son passé rencontre une femme amnésique qui fuit le sien, dans Vice Vertu et Vice Versa deux voisines de palier s'échangent leurs vies, l'une prostituée de luxe l'autre intellectuelle au chômage, jusqu'à Thème Je où la cinéaste retourne sur elle la caméra en fouillant les histoires de famille et les réinventant, se permettant avec elle-même ce qu'elle n'aurait jamais osé avec qui que soit d'autre.
Documentaires ou fictions, la cinéaste mord le trait et met en scène les hommes et les femmes de la vie réelle comme s'ils étaient des personnages de roman. Pour elle, la vérité n'a jamais existé au cinéma. Les regards face caméra renvoient au miroir du spectateur. Avec tendresse et compassion, Françoise Romand recompose le passé en faisant jouer aux protagonistes leurs propres rôles. Espiègle et complice, elle ouvre la porte à toutes leurs fantaisies.
Dès le début d'Appelez-moi Madame le ton est donné. Ovida Delect fait un signe de connivence à la caméra et raconte ses fantasmes que la cinéaste concrétisera en images. La musique de Nicolas Frize accompagne la mariée qui court au ralenti sur la plage. En 1986 dans un petit village normand, devenir transsexuel à 55 ans avec l'aide de sa femme n'est pas une mince affaire pour ce communiste et poète, ancien résistant resté muet sous la torture. L'amour d'Huguette pour son mari devenu femme transcende tous les poncifs et son douloureux sacrifice réfléchit le statut de toutes les femmes. Avoir été directrice de l'école maternelle fait passer la pilule auprès des villageois. Dans un micro-trottoir rythmé par le hachoir du boucher, la réalisatrice se débarrasse rapidement des remarques grivoises que le curé couronne. Les deux mamies tournent le dos à ces commérages. Les films de Françoise Romand évitent les commentaires, ils parlent d'eux-mêmes, réfléchissant les vies ordinaires de personnages extraordinaires sous l'œil fantasque de la mise en scène. Le drame se joue toujours dans la comédie. La distance n'est pas celle de l'auteur à son sujet, mais du sujet au filmage, rapprochant le spectateur au plus près de l'émotion en le faisant entrer incidemment dans les arcanes du cinéma.

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