La loi Hadopi est passée à l'Assemblée, essentiellement votée par la droite et rejetée par les partis dits de gauche. L'industrie discographique et cinématographique avait réussi son travail de lobbying auprès des sociétés d'auteurs (mes sociétés !) pour les entraîner dans cette voie liberticide, et contre les sociétés d'interprètes (mes sociétés également puisque je fais autant partie de la Spedidam et de l'Adami que de la Sacem, de la Sacd et de la Scam !). En parlant de privation de libertés, je n'évoque pas celui de télécharger librement sans rémunérer les artistes (j'ai défendu ici même la licence globale : 1 2 3), mais la loi, au demeurant inapplicable, est la porte ouverte au contrôle des échanges sur Internet. Rappelons que la semaine dernière le Parlement européen a considéré que "garantir l'accès à tous les citoyens à Internet équivaut à garantir l'accès de tous les citoyens à l'éducation" et adopté un rapport sur "la sécurité et les libertés sur Internet". On a pu lire ici et les raisons de s'opposer catégoriquement à Hadopi. Les artistes qui ont soutenu cette loi se sont fourvoyés en pensant qu'il s'agissait simplement de défendre son bout de gras. Il y avait d'autres façons de le faire que de jouer les collabos avec un système répressif qui encourage à désobéir en brouillant son identification (l'IP flottant ou délocalisé), à tester de nouveaux modes qui échappent à la loi (le streaming se développe : on regarde un film en temps réel sans télécharger) ou qui sont légaux (Deezer a signé un accord avec la Sacem et permet d'écouter tout ce qu'on veut sans que les artistes ne voient la couleur de leur argent), et j'imagine que les faussaires s'en donneront à cœur joie tant la tentation est grande de résister à cette loi aussi dangereuse qu'inapplicable. Le système envisagé permet tous les abus et les internautes auront peu de moyens pour se défendre en cas d'erreur par exemple. Il suffira aussi au pouvoir d'invoquer cette loi pour couper la connexion à Internet à qui il le souhaite. Nous entrons dans une ère où la répression va pouvoir s'épanouir. Et ce avec la caution d'un grand nombre d'artistes dont on trouvera la liste sur le site de la Sacem.
Je n'ai jamais apprécié les collabos, qu'il le soit devenu par conviction ou par inconscience. Aussi je décide de boycotter les disques et les films des signataires à commencer par ceux qui sont montés en première ligne pour défendre leurs petits intérêts égoïstes au détriment du bon sens et de l'intérêt général. Je me prive ainsi de Aldebert, Arthur H, William Baldé, Agnès Bihl, Bertrand Burgalat, Jean-Patrick Capdevielle, Bernard Cavanna, Alain Chamfort, Dany, Daphné, Da Silva, Thomas Dutronc, Jean Fauque, Gotan Project, Françoise Hardy, Icare, Louisy Joseph, Philippe Lavil, Maxime Le Forestier, Claude Lemesle, Renan Luce, Didier Lockwood, Christophe Mae, Ridan, Sanseverino, Yves Simon, Stanislas, Tété, et au cinéma, Jean-Jacques Annaud, Christian Carion, Jean-Claude Carrière, Alain Corneau, Radu Milhaileanu, William Karel... La liste est hélas beaucoup plus longue, mais chaque fois que j'apprendrai qu'un ancien camarade a permis de faire passer cette loi mortifère, je me priverai de son art. C'est une bonne manière de faire le tri en cette époque où plus que jamais il va falloir se serrer les coudes contre la réaction et l'obscurantisme.