Je resterais bien chaque fois un peu plus longtemps à Strasbourg. Ville universitaire, sa densité de jeunes gens lui donne un air de fête et de concentration studieuse. La ville est très belle, vivante, rafraîchissante, stimulante. C'est un mélange de tradition alsacienne et de cosmopolitisme. L'afflux de touristes fait résonner toutes les langues de la planète dans les rues piétonnes qui quadrille le centre érigé de demeures anciennes et encerclé d'eau. Des saules pleureurs alternent avec des glycines séculaires. À l'heure du repas je ne sais plus où donner de la tête tant les cuisines du monde se concurrencent pour m'allécher. Hier midi, je déjeunai d'un authentique menu coréen qui contrebalançait mes expériences locales de la veille. Le tramway, la bicyclette et la marche à pieds sont les moyens de locomotion les plus sûrs.
En quelques pas je suis dépaysé, me sentant presque en vacances alors que je dois reprendre le cours de ma conférence auprès des élèves en didactique visuelle de l'École des Arts Décoratifs. J'y transmets ma marotte, le son complément des images dans l'audiovisuel et les médias interactifs. Le jour précédent je réalisai quelques suivis de projets auprès d'étudiants de cinquième année passant leur diplôme la semaine prochaine. Pas question évidemment de les fragiliser à quelques jours de la sortie, mais répondre à leurs questions, déceler leurs faiblesses pour leur donner des armes pour se défendre face au jury si besoin est. Nombreux me réclament des références pour étayer leur discours et donner une légitimité historique à leur démarche. Les projets sont intéressants et prometteurs. Je n'ai pas besoin d'inventer des arguments, il suffit comme d'habitude d'analyser leur travail pour y déceler leurs motivations inconscientes.
Avant de quitter ma chambre d'hôtel, je porte mon appareil à bout de bras pour prendre en aveugle les toits de la ville alsacienne.