Après Comme une image (1989) et Les araignées (1997), le troisième CD d'Hélène Sage paraîtra bientôt sur le label GRRR (dist. Orkhêstra) auquel elle est restée fidèle depuis Supposons le problème résolu avec Bernard Vitet. Comme chaque fois, le puzzle qui relate ses aventures scéniques et ses rencontres laborantines fait œuvre, construit comme un château de cartes dont on aurait collé les bords pour qu'il résiste au réchauffement schématique et à la fonte des miroirs. Si les précédents relataient ses complicités instrumentales et chorégraphiques, Échappée belle s'organise essentiellement autour du verbe, chanté, psalmodié, joué vif ou retraité. Les textes d'Omar Khayyâm (XIIe siècle), Djalâl-Od-Dîn Rûmi (XIIIe), Nathalie Desmarest, Benoît Lavoisier, Luc Baron, Patrizia Runfolia, Louisa Paulin, Joseph Delteil, Nouveau Testament ou objets trouvés, servent de colonne vertébrale à ses iconoclasties sonores. Hélène Sage chante et joue de ses instruments de prédilection comme la contrebasse et ses flûtes, dont la basse est sa préférée, et se risque aux piano, bandonéon, violon, psaltérion, grandes orgues, orgue de cristal et divers idiophones. Marc Démereau (ordinateur), Alex Picques (sampling) et Pascal Portejoie (percussions) viennent de temps en temps à sa rencontre. La musique grince et frotte, siffle et enchante. Les voix de ses filles, Louise et Zoé Bouchicot, ponctuent l'ensemble avec impertinence. Les autres, théâtrales, font sens et contrastent avec les paysages organiques qu'Hélène peint aux couleurs incroyables de ses expérimentations hirsutes. L'unité du patchwork inventif tient à la fantaisie de l'équilibriste qui s'échappe bel et bien des sentiers battus.