Dimanche, avec Antonin-Tri Hoang et Vincent Segal, nous avons enregistré la maquette d'un album intitulé Dans tous les sens du terme en vue d'une hypothétique production dont le thème est Reprise. Ayant enchaîné les treize pièces comme des marathoniens, à la fin de l'après-midi nous étions totalement lessivés. Pour Prise de risque, Antonin et Vincent échangèrent leurs instruments. Le premier frottait l'archet sur le violoncelle comme je jouais du hou-kin, le second s'époumonant dans le sax alto. Mais la véritable difficulté fut pour moi de découvrir un autre programme que celui que j'avais prévu. Ayant envoyé la proposition de Reprise à mes deux camarades ils l'avaient prise au mot tandis que je pensais enregistrer la musique d'un film de Jacques Perconte ! Sans aucune préparation je n'ai eu d'autre choix que d'improviser une heure quarante de musique, ce qui en soi n'a rien d'effrayant, sauf que je choisis et prépare toujours les instruments en fonction des circonstances et que je sélectionne les programmations des machines électroniques en amont, ce qui me prend en général quelques heures.
J'aurais pu me douter que quelque chose clochait cette veille de Noël lorsque le matin-même Vincent me parla au téléphone du malentendu de Maria João Pires qui, entendant l'orchestre attaquer sous la direction de Ricardo Chailly, découvre qu'elle s'est trompée de concerto de Mozart, confondant celui en do et celui en ré.


Le document est étonnant. Il faut voir son visage se décomposer lorsqu'elle se rend compte de son erreur. Elle échange quelques mots avec le chef d'orchestre pour lui expliquer sa confusion alors que l'orchestre joue l'ouverture, heureusement suffisamment longue pour que la pianiste virtuose se ressaisisse. On peut lire sa pensée au fur et à mesure sur son visage. Soudain, en une seconde, elle se jette sur le clavier et jouera de mémoire et sans faute le concerto au programme. J'espère vivre un tel miracle à la réécoute de notre session lorsque je me mettrai au mixage après les fêtes !