Les compositeurs de musique de film, et avant tout les réalisateurs, feraient bien de lire le catalogue de l'exposition Musique et cinéma, le mariage du siècle ? (à la Cité de la Musique jusqu'au 18 août), mais le lire vraiment ! Nécessité de se poser la question le plus tôt possible dans la gestation d'un film évidemment. Et puis de Jaubert à Schifrin nombreux mettent en avant le silence. Ce silence qui laisse les bruits construire la partition sonore. Lorsque la musique réapparaît elle peut prendre tout son sens. Ou continuer dans le même registre sans que l'on sache que l'orchestre a pris le relais. J'ai particulièrement apprécié l'évocation de la musique "diégétique" par N.T. Binh, commissaire de l'exposition, lorsqu'elle est produite in situ sans vous tomber dessus comme si Dieu était aux commandes ! Comme les articles de François Porcile sur Maurice Jaubert ou la musique française de 1930 à 1970, de Pierre Berthoumieu sur le symphonisme hollywoodien de 1933 à nos jours, "l'éloge raisonné de la monogamie de quelques tandems cinéaste-compositeur" par Thierry Jousse, les entretiens avec Nino Rota (en 1972), Lalo Schifrin, Michel Deville, Alain Resnais, Bruno Coulais, Benoit Jacquot, le monteur-son Jean Goudier... Par contre, Michel Chion rate le coche lorsqu'il répond aux questions sur l'emploi de musique préexistante, omettant le principal, la référence culturelle voire intime que cela implique, ses conséquences sur le système d'identification, élément essentiel de la magie du cinéma.

Les auteurs et témoins interrogés auraient pu aussi évoquer la complémentarité de la musique face aux images ou son utilisation pléonastique, la partition sonore qui englobe tous les sons et pas seulement la musique, son utilisation particulière dans les différents cinémas asiatiques, le synchronisme accidentel cher à Cocteau, etc., mais aucun ouvrage n'est jamais exhaustif.

Le catalogue (Actes Sud) étant truffé de QR-codes permettant de jouer des séquences vidéo et le site de l'exposition étant aussi richement illustré d'images que de sons, on peut se demander ce que la visite apportera de plus ? Comme je l'ignore et que je suis curieux il ne me reste plus qu'à y faire un saut !