Deux ou trois générations de musiciens assument avec brio l'héritage des premiers minimalistes américains, fringants octogénaires toujours en activité, mais dont l'inventivité n'est plus à la hauteur de leurs heures de gloire. Après Terry Riley, Steve Reich et confrères, John Adams ou les fondateurs de Bang On A Can, Julia Wolfe, David Lang et Michael Gordon tournent déjà autour de la soixantaine. Tous ont développé des langages personnels s'échappant de la doxa répétitive, d'où le glissement progressif vers le terme de minimalisme, lui-même très limitatif par rapport à la réalité de leurs œuvres. Certains pourraient même être taxés de maximalistes, ce qui n'est pas fait pour me déplaire ! Je reviendrai ultérieurement sur Bang On A Can pour avoir récemment écouté une trentaine d'albums, majoritairement parus sur le label Cantaloupe Music, mais j'ai besoin de temps pour débroussailler le style des uns et des autres, d'autant qu'apparaissent à côté du trio fondateur quantité de voix originales tels Arnold Dreyblatt, Glenn Kotche, Ken Thomson, Bobby Previte, Florent Ghys, Michael Harrison, Evan Zyporin et des ensembles comme Icebreaker ou So Percussion.
Le percussionniste Joby Burgess associé au sound designer Matthew Fairclough et à la vidéaste Kathy Hinde forment le groupe anglais Powerplant. Leur dernier album, 24 Lies Per Second, rassemble des pièces très diverses, mais qui ont en commun l'héritage de leurs aînés. D'autant que l'on y découvrira une version pour percussion de Piece For Tape de Conlon Nancarrow et une œuvre de jeunesse inédite de Steve Reich, My Name Is, à une époque où le compositeur ne craignait pas la surchauffe des méninges de l'auditeur ! Dans l'extrait vidéo joint on découvrira un instrument de prédilection de Joby Burgess, le xylosynth fabriqué par William Wernick. Il s'agit d'un xylophone midi dont le prix comparativement devrait intéressé plus d'un percussionniste. Pour Chain of Command Graham Fitkin a échantillonné les voix de George Bush Jr et Donald Rumsfeld évoquant Guantanamo, l'Irak et Abu Ghraib. L'effet répétitif et de reconstruction des phrases renvoie à la torture endurée 24 heures sur 24 par les prisonniers.


Powerplant mélange les percussions avec les traitements électroniques dans une optique toujours rythmique. Dominic Murcott répond à la pièce de Nancarrow qu'il a arrangée en y adjoignant de l'électronique live tandis que Max de Wardener s'inspire de films de Michael Haneke. Ci-dessous un extrait de Im Dorfe inspiré La pianiste. Sur le site de Powerplant on trouvera d'autres vidéos dont une déconstruction de Chain of Command.


Rien d'étonnant à ce que le premier album de Powerplant ait été Electric Counterpoint autour de Steve Reich et Kraftwerk, car s'il porte le titre de la pièce arrangée de l'Américain le nom du groupe est la traduction de celui des Allemands. Les singles qui l'avaient précédé étaient nettement plus technoïdes. On retrouve également Joby Burgess au sein de l'Ensemble Bash (A Doll's House) ou avec le compositeur Gabriel Prokofiev dont il est le soliste pour le Concerto for Bass Drum. NonClassical, le label de Gabriel Prokofiev (petit-fils de Sergueï), a l'intéressante particularité de proposer des remix dont tous les sons sont issus des disques originaux sans apport extérieur, tel The Art of Remix.