En réunissant le White Desert Orchestra la pianiste-flûtiste Ève Risser réalise l'un de ses rêves, d'autant qu'elle l'a prolongé au delà du réveil. Une quarantaine de très jeunes enfants et une quarantaine de seniors sont venus lui prêter voix fortes pour évoquer la matière que fabrique la nature. Des grands espaces américains à la structure d'une simple pierre, elle a composé des pièces sensibles où la métamorphose joue avec le temps. Le projet pédagogique mené parallèlement à la direction de son tentet lui permet d'assumer plus facilement son rôle de chef dans une entreprise où ce sont d'abord des camarades qui jouent le jeu pour elle. Tous et toutes font partie de ces jeunes affranchis qui font fi des frontières et des genres pour se consacrer à la musique, medium universel par excellence.


Si son Désert Blanc est beaucoup trop chaud pour être celui de l'Antarctique, il pourrait s'agir des White Sands de gypse du Nouveau Mexique, lumière aveuglante des dunes se confondant avec le ciel, sans limites, vertigineuse. Regardez avec les yeux d'une femme et vous entendrez peut-être les timbres magiques qui éclosent de l'orchestre. Sylvaine Hélary (flûte), Sophie Bernado (basson), Antonin-Tri Hoang (sax alto, clarinette, clarinette basse), Benjamin Dousteyssier (sax ténor et baryton), Eivind Lønning (trompette), Fidel Fourneyron (trombone), Julien Desprez (guitare électrique), Ève Risser (piano), Fanny Lasfargues (basse électro-acoustique), Sylvain Darrifourcq (batterie, percussion), Céline Grangey (mise en son) sont les artisans de la transmutation. Pour cette 32ème édition du Festival Banlieues Bleues à La Courneuve, le chœur d'adultes du Conservatoire à Rayonnement Régional d’Aubervilliers-La Courneuve était dirigé par Catherine Simonpietri et les enfants de l’école élémentaire Charlie Chaplin de La Courneuve par Azraël Tomé. Hors les chœurs les mouvements lents rappellent parfois les à-plats mouvants et cuivrés de Carla Bley tandis que les passages rythmiques ont quelque chose de zappien dans l'humour et l'entrain. Mais la pâte est de sa patte.


Il y a sept ans pour son Prix au CNSM Ève Risser avait déjà disséminé des comparses parmi le public. Hier soir le premier invité à sortir de l'ombre fut un gamin s'emparant du Theremin suivi d'une petite fille prenant la place d'Ève au piano. Les autres suivirent, dirigés tour à tour par l'une ou l'un d'entre eux. Quant au chœur d'adultes il était divisé en deux, en haut des gradins derrière le public qui encerclait le spectacle. Il n'aurait plus manqué que la salle se mette à chanter comme l'y incite dans ses œuvres Bobby McFerrin, car c'est le genre de pari qui doit titiller Ève Risser depuis belles lurettes ! Le White Desert Orchestra est bien la continuité d'une démarche généreuse.