Il est surprenant et encourageant de rencontrer une personne dont les goûts, si ce n'est les couleurs, se rapprochent des vôtres. Entendre que ses références sont aussi particulières que les miennes, du moins dans certains domaines. Ainsi Philippe Dumez, attiré par les disques d'Un Drame Musical Instantané et ayant acheté un DVD de Françoise au vide-grenier d'où la pluie nous avait chassés dès midi, avait eu l'astuce de prendre nos coordonnées tandis que nous sauvions les meubles. Happé par Mix-Up, il était repassé à la maison chercher Appelez-moi Madame et Thème Je. À cette occasion nous avions échangé quelques pistes tant dans le domaine de la musique (grand consommateur de concerts de rock, Philippe Dumez place de la musique sur des films pour une major) que du cinéma (cinéphile curieux d'objets sortant de l'ordinaire). En regardant le blog qu'il a tenu quotidiennement jusqu'à la fin de l'année dernière, je comprends mieux son enthousiasme pour le documentaire Vinyl du Canadien Alan Zweig, cousin du High Fidelity de Nick Hornsby, où des collectionneurs racontent leur addiction.
L'organisation poétique qui guide son travail se retrouve dans l'aspect obsessionnel de ses écrits, petits fascicules, tirés chaque fois à une centaine, qu'il illustre en général avec une photo trouvée aux Puces, évidemment différente pour chaque exemplaire. Le vernaculaire y croise le système des listes où l'ordre n'est qu'un cadre à l'imagination. Je reconnais cette méthode de création qui pallie mon amnésie ! Ainsi son Trombinoscope, sur le modèle du Je me souviens de Perec, évoque le souvenir déterminant relié à chaque personne qu'il a croisée. La saveur de ces réminiscences, sortes d'aide-mémoire ciblés, tient dans la variété de l'accumulation et dans l'humour que génère sa franchise. Un second petit livre, 42+1, égrène chacune des années de sa vie, autres éléments déterminants depuis la plus tendre enfance jusqu'à son dernier anniversaire. Là aussi, la drôlerie des situations rivalise avec la réussite des évocations en quelques mots. J'ignore si ces ouvrages sont trouvables autrement qu'en rencontrant leur auteur, mais ils mériteraient une publication beaucoup plus large. Philippe Dumez tient un journal intime par mailing-list, récit de sa semaine passée, qu'il envoie tous les lundis à une petite centaine de destinataires dont je ne fais hélas pas partie !