Un cheveu sur la langue n'empêche pas de chanter. Il participe même au charme de l'artiste, personnalisant sa voix, d'autant qu'il dessine l'enveloppe de son timbre. La plupart du temps je ne fais pas attention. J'y ai seulement pensé en écoutant le beau concert de Yael Naim sur arte studio (écoute libre) et en la regardant. De la même manière j'ai mis des années à me rendre compte que Robert Wyatt en était affublé et que ce chuintement, reste de l'enfance, produisait une fragilité délicieuse à celles et ceux qui ne s'en étaient pas débarrassés. Akhenaton, Freddie Mercury, Donald Fagen, Tom Waits, Elton John font ainsi partie des zozoteurs lyriques. Au cinéma Humphrey Bogart ou Sean Connery à ses débuts portaient eux aussi le cheveu sur la langue et Darry Cowl en fit son style. Il existe d'autres dyslalies plus handicapantes comme le bégaiement qui peut disparaître justement en chantant. Ou des timbres de voix comme celui de Bob Dylan dont la faille signale l'originalité. La difficulté pour chacun est d'accepter sa voix, trouble né seulement avec le premier système de reproduction lorsque l'on a pu l'entendre sans la résonance de son crâne. Comme en haïkido, mieux vaut renverser l'adversité pour en faire sa force !