Aux anciens Ateliers de la SNCF d'Arles, Amandine Casadamont a l'idée de faire un photomaton de notre duo Harpon. Nous commençons avec lunettes, les retirons, Amandine s'échappe, mais le plus drôle est le moment où je dois sortir de la cabine exigüe pendant qu'elle y entre. Nous avons tous les deux l'air parfaitement illuminé. Flash.
Parmi les expositions des Rencontres de la photographie que nous avons vues, la seule qui nous ait vraiment emballés est celle de Christian Marclay. Dans une sorte de tunnel rappelant une rue, nous passons devant deux rangées de six écrans où des vidéos montrent des bouteilles, verres et canettes abandonnées sur lesquelles il frappe pour composer une musique minimaliste, cristalline et aérée. Comme les images sont à ras du sol les ombres des jambes des visiteurs qui viennent se superposer nous propulsent dans l'East London où Marclay a filmé. La spatialisation sonore rend la courte promenade très rafraîchissante. A l'envers d'un des deux murs de ce Pub Crawl (2014), six petits films d'animation silencieux constitués de plusieurs milliers de photographies font jouer un mégot, un coton-tige, un chewing-gum écrasé, une cigarette qui se consume, des capsules de bière dans des scènes toujours aussi astucieuses. Intéressante, Mauvais genre, la collection de transsexuels de Sébastien Lipschitz, 450 photographies amateur de travestis de 1880 à 1980. Amusante, les saucisses de Beni Bischof. Trop d'expositions anecdotiques à notre goût, mais nous en avons ratées pas mal.


Lundi soir, c'est notre tour puisque nous participons avec Amandine à La Nuit de l'Année organisée par Phonurgia Nova pour son trentième anniversaire. Antoine Chao ouvre la soirée avec un montage sonore émouvant de son travail journalistique autour de Radio Debout et des évènements politiques récents au Mexique. Nous enchaînons avec trois improvisations, Hypnotik, Insomnie et Rewind. Je ne peux m'empêcher de faire le lien avec Marclay. Précurseur des DJ scratcheurs, il fut le premier platiniste que je rencontrai dans les années 80 tandis qu'Amandine est la première à produire des fictions qui me rappellent terriblement Un Drame Musical Instantané. Dans ses mix elle allie avec la plus grande élégance le sens et la plasticité, jonglant calmement avec trois platines. Elle sait également marier la gravité et l'humour, jouant des contrastes comme j'aime le faire avec mes instruments. Bien que nos sources et nos pratiques soient radicalement différentes nous semons la confusion sur qui fait quoi, y compris parfois à nos propres oreilles. Que ce soit en arpentant les expos d'Arles ou sur scène nous sommes sur la même longueur d'ondes, impatients de rejouer ensemble dès la rentrée.
En attendant je quitte la Toile pour un mois en montagne où nous ne recevrons ni Internet ni téléphone, saine coupure de la perfusion avec laquelle nous vivons le reste de l'année. Bonnes vacances à celles et ceux qui en prennent, pensées solidaires envers les autres...

Photo du concert © Olivia Ekelund