La Rumeur est connu des jeunes comme groupe de rap et pour leurs démêlés avec le Ministère de l'Intérieur pour "atteinte à l'honneur de la Police nationale" qui s'étaient soldés par un non-lieu après huit ans de procédure. Hamé et Ekoué étaient passés à la réalisation de films en 2011 et 2012 avec De l'encre puis Ce chemin devant moi, court-métrage en bonus sur le DVD de leur nouvel opus, un film noir qui se passe à Pigalle où gravitent Les derniers Parisiens avant l'exode vers la banlieue. Le duo tourne cette fiction en milieu documentaire caméra à l'épaule, arpentant le macadam comme ils en ont l'habitude dans un quartier qui est le leur.


Si dans l'autre bonus du DVD Hamé évoque Jean-Pierre Melville, je me suis interrogé sur tous les cinéastes qui doivent tant à John Cassavetes pour la liberté que la tribu d'amis qui les entoure leur octroie. Les comédiens évoluent dans un milieu où ils se sentent chez eux, concentrés sur les émotions que leurs personnages suggèrent. C'est souvent la différence avec les Anglo-Saxons qui préfèrent des rôles de composition demandant beaucoup de travail en amont. Reda Kateb et Slimane Dazi, découverts dans Un prophète, ont fait du chemin depuis. Ils incarnent deux frères en froid dans un cadre très chaud où la tension et la violence sont contenues, thème récurrent des films de La Rumeur qui évite les flingues et les poursuites pour privilégier une sorte de street movie moins conventionnel. Leur second long métrage est un beau portrait du Paris bigarré que j'adore avec une intrigue dramatique forte loin du manichéisme appuyé de nombreux films français. De même que le slameur Grand Corps Malade raconte son histoire édifiante avec humour dans Patients, en vieillissant La Rumeur perpétue sa critique sociale en passant du rap au cinéma.

→ Hamé & Ekoué, Les derniers Parisiens, DVD blaq out, 16,99€, sortie le 5 août 2017
→ Grand Corps Malade, Patients, DVD Gaumont, 14,99€