La bonzesse est une comédie érotique relativement provocante encore aujourd'hui malgré ses dialogues parfois potaches. Réalisée en 1974, soit sept ans après Belle de jour de Luis Buñuel, elle fut censurée à sa sortie sous Pompidou, probablement plus pour ses allusions au financement des maisons closes par la police et l'État que par ses scènes de sexe soft. Marqué par l'esprit libertaire de l'époque, teinté de féminisme et de tolérance, ce film amusant, produit par Francis Leroi, rappelle ceux de Jean-François Davy. Un carton avertit d'emblée que les dialogues ont tous été échangés dans la vraie vie. Mais c'est la personnalité du réalisateur et celle de la comédienne principale qui étonnent le plus dans cette fable où le babacoolisme finit par évacuer les scènes explicites du bordel.


Je connaissais François Jouffa pour ses chroniques dans Rock 'n Folk, à la radio ou à la télévision qui lui offrirent de côtoyer Elvis Presley et Bob Dylan, les Beatles et les Rolling Stones, Janis Joplin et Jimi Hendrix, Jim Morrison et David Bowie, Stevie Wonder et Miles Davis, ou encore Georges Brassens, Serge Gainsbourg, Johnny Hallyday, Claude François... Il écrivit également quantité de livres d'humour et produisit tout autant de disques de musique du monde...


Mais le plus étonnant est la carrière de l'héroïne, Sylvie Meyer aux côtés de qui on reconnaît Bernard Verley ou Féodor Atkine. On retrouvera cette séduisante actrice, dont on peut admirer ici la plastique intégrale, chez Pierre Granier-Deferre (Adieu Poulet, Le toubib), Jean Yanne (Chobizenesse), Bertrand Blier (Calmos), Franck Cassenti (La chanson de Roland), Federico Fellini (La cité des femmes), Jacques Rivette (Merry-Go-Round) et dans les films de son mari, l'artiste Charles Matton dont les Boîtes sont de merveilleux dioramas miniatures. Des actrices jouant dans des films roses de cette époque, on pouvait s'attendre à un passage éclair. Or Sylvie Meyer réalisait déjà des sujets et reportages pour le Journal Télévisé avant de devenir commissaire d'expositions, d'écrire des romans ou d'être considérée comme une spécialiste du génocide bosniaque, en particulier à Srebrenica. On peut ne pas partager toutes ses opinions, mais l'on comprend que son rôle d'étudiante en philosophie tentée par la prostitution avant de passer au boudhisme à Ceylan lui conférait une aisance qui rappelle fondamentalement les personnages de la Nouvelle Vague.

→ François Jouffa, La bonzesse, DVD, Ed. Montparnasse, 20€