Si L'ail noir ressemble au titre d'une aventure de Tintin, l'expérience est plus proche d'un récit d'alchimiste. Chaque fois qu'il revient de Hong Kong mon ami Sun Sun me rapporte des têtes d'ail noir que son père prépare sur son balcon. Ce sont de jolies petites gousses monobulbes qu'il semble difficile de trouver en France. J'ai oublié de les mettre dans le cadre avant d'appuyer sur le déclencheur. Pas moyen de recommencer la photo, car j'ai aussitôt fait repartir une nouvelle fournée pour les douze prochains jours !
J'aime tant ce sublime mets que j'ai acquis un fermenteur d'ail noir. Le petit modèle 3 litres contient douze à quinze têtes sur deux étages. Il suffit d'attendre douze jours et le tour est joué. Comme cela coûte ici les yeux de la tête (d'ail, comme Me, myself and I), l'achat est vite amorti. On remplit la cuve, on appuie sur le bouton et le compte à rebours démarre pour 288 heures de caramélisation. Après trois jours à 80°C, le chauffage s'arrête une journée et reprend huit jours à environ 72°C. Mon premier essai est un coup de maître. L'ail est moelleux, doux et sucré. Son goût rappelle le vinaigre balsamique, le pruneau, la réglisse et l'umami. L'umami est considéré comme la cinquième saveur avec le sucré, l’acide, l’amer et le salé. En plus d'être délicieux, l'ail noir a quantité de vertus excellentes pour la santé. Il serait 25 fois plus efficace que cru ou cuit, d'autant qu'il perd le côté piquant de l'ail frais. Au frais et à l'abri de la lumière, dans un endroit assez sec, il se conserve jusqu'à un an. Cela m'étonnerait que j'ai besoin d'en faire des conserves, car il paraît que l'on peut en manger autant qu'on en veut !
Sa couleur vient d'une réaction de Maillard, la même que pour la sauce de soja ou le brunissement de la viande, action des sucres sur les protéines. Un petit bémol sur l'odeur dégagée pendant l'opération, surtout les premiers jours. Imaginez que c'est du 24 heures sur 24. Même si elle est agréable, du moins pour certains nez, la cuisson sentait si fort que j'ai choisi de brancher la machine dans le garage !
Originaire de Corée, l'ail noir a été développé par les Japonais, mais les Chinois en font une grande consommation. On peut s'en servir pour tous les plats (viandes, poissons, crustacés, coquillages, salades, fromages, etc.) jusqu'aux desserts (fruits, chocolat, miel) ! Sa quantité d'antioxydants le rend parfaitement digeste, contrairement à l'ail blanc, et renforce les défenses immunitaires de l'organisme. Il serait bénéfique contre l’arthrite, l’athérosclérose, les maladies cardiovasculaires, les accidents vasculaires cérébraux, les cancers, la maladie d’Alzheimer et d’autres maladies neurodégénératives, contre les infections et les virus... Il aurait des propriétés antibactériennes, antibiotiques et antifongiques, ainsi que antidépressives et antistress. N'en jetez plus ! La S-allyl-cystéine, principal composé actif de l’ail noir, prévient la mort des neurones et du lobe frontal, stimulant les fonctions cognitives (mémoire, attention, etc.) et allonge la durée de vie. Mon Centenaire a sur quoi s'appuyer sérieusement, tout en me léchant les babines. J'ai lu qu'il diminuait le cholestérol, fluidifiait le sang, réduisait la tension artérielle, et qu'une consommation régulière d’ail noir est recommandée par l'OMS (Organisation Mondiale pour la Santé) et n'entraîne aucun effet secondaire, quelles que soient les doses.
Lorsqu'on aime joindre l'utile à l'agréable, on est servi, sur un plateau !