En 1975 mon premier album et seul véritable succès discographique (!), réalisé avec Francis Gorgé sur mon label GRRR (aperçu en fond sous le CD de Théo Girard), portait le titre Défense de. Or avec ses quatre morceaux il formait la phrase "Défense de... crever / la bulle opprimante, / le réveil / pourrait être brutal". Quarante cinq ans plus tard , le contrebassiste Théo Girard sort Bulle, son second album, cette fois en quartet après le trio de 30YearsFrom que j'avais salué ici-même, mais sa bulle est nettement plus joyeuse. Ce n'est pourtant pas un signe des temps ! À croire qu'en période révolutionnaire on aurait besoin de mettre en garde contre un possible retour de la réaction, mais lors des dérives dictatoriales et régressives le ton devrait être aux heureuses utopies...

La franche rythmique du batteur anglais Sebastien Rochford, qu'elle soit martiale ou aérienne, permet aux deux vents solidaires de s'épanouir mélodiquement. Le jeune saxophoniste alto Basile Naudet qui vient se joindre au trio initial et le trompettiste Antoine Berjeaut s'adonnent à un lyrisme que l'on retrouve souvent dans les compositions initiées par des bassistes. Tout ce que j'avais écrit la fois précédente vaut pour ce nouvel opus. L'écriture rigoureuse n'empêche pas les solistes d'improviser et de faire glisser ce jazz dansant vers des paysages de liberté qui se font rares dans le réel, mais hantent heureusement toujours les espérances des créateurs.

→ Théo Girard Quartet, Bulle, Discobole Records, dist. Differ-Ant, sortie le 23 août 2019