70 Cinéma & DVD - septembre 2012 - Jean-Jacques Birgé

Jean-Jacques Birgé

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jeudi 27 septembre 2012

Paris aura toujours été Paris


Tandis que Télérama axe son dernier numéro autour du Grand Paris j'admire la remasterisation impeccable du film d'André Sauvage, Études sur Paris, tourné dans les années 20. Dans ce DVD édité par Carlotta on aurait souhaité des chapitres plus découpés pour pouvoir sauter de quartier en quartier, histoire de comparer avec aujourd'hui. Le menu ne propose que Paris-Port, Nord-Sud, Îles de Paris, Petite ceinture, De la Tour Saint-Jacques à la Montagne Saine-Geneviève alors que nous sillonnons les rues vides d'automobiles ou du moins très rares, de Montmartre à la Zone, du Châtelet au Bois de Boulogne. Je reconnais ainsi la piscine des Tourelles avant sa modernisation, le Pré Saint-Gervais et l'emplacement des anciennes fortifications... Les chevaux sont partout et personne ne se soucie de la présence de la caméra. Malgré les sensationnelles vues aériennes prises depuis les toits de la capitale, nous sommes plus en présence d'un documentaire, certes passionnant, qu'en face d'un équivalent de Vertov ou Ruttmann. Si le choix de l'accompagnement musical permet d'osciller entre la techno molle de Jeff Mills et le nostalgique et suranné Quatuor Prima Vista, les deux interprétations ne figurent que papier peint, accentuant l'effet cartes postales des monuments cinématographiés. Les suppléments muets du DVD entérinent l'aspect documentaire des travaux de Sauvage, loin d'une recréation visionnaire à la Vigo. Il n'empêche que tout amoureux de Paris y trouvera son bonheur tant le grand écart est fondamentalement poétique.
Quant à Télérama, c'est un beau chantier, laissant le rappeur Oxmo Puccino évoquer la place Stalingrad, l'éditeur Éric Hazan l'incessante guerre sociale chassant du centre les classes populaires, les usagers du RER la ligne B, le créateur de mode Guillaume Henry les Parisiennes, l'écrivain Patrick Modiano sa carte du Tendre, Nicolas Delesalle la diaspora chinoise d'Aubervilliers, Mathilde Blottière mon quartier avec le statut des petites salles d'art et essai face au complexe qui s'ouvre Porte des Lilas. J'ai envie de tout lire, d'autant que ne regardant pratiquement pas la télévision je ne feuillette plus que les premières pages...

mercredi 26 septembre 2012

Deux comédies


Requête récurrente, nombreux amis et surtout amies me réclament une comédie lorsque vient l'heure de s'affaler devant le film de la soirée. Pourquoi faut-il que je craigne une grosse pochade quand il s'agit de ce genre de cinéma ? Est-ce la culpabilité de se laisser aller à la rigolade ou à la sentimentalité, ou bien la crainte de la vulgarité et de la facilité ? Pourtant l'exercice est souvent plus difficile que d'écrire un drame psychologique, de coller à la réalité et de se morfondre devant la cruauté du monde. Comme dans les polars qui laissent filtrer une forte critique politique ou sociale les comédies n'en sont pas dénuées, loin de là. J'en veux pour preuve l'astucieux et caustique Ça ne peut pas continuer comme ça ! de Dominique Cabrera dont nous ne manquerons pas de parler lors de sa diffusion à la télévision pendant la semaine du théâtre. Depuis ma dernière sélection et après avoir épuisé mes récentes acquisitions avec le rafraîchissant Et si on vivait tous ensemble ? de Stéphane Robelin, le farfelu Holiday de Guillaume Nicloux, le tatiesque La fée de Dominique Abel, Fiona Gordon, Bruno Romy et, en remontant dans le temps, les derniers Chatiliez qui m'avait échappé, La garçonnière, certains films d'Elio Petri, j'ai tenté le coup avec deux films français récents, Les infidèles et Mon pire cauchemar.

Les infidèles est un film à sketches français réalisé par Emmanuelle Bercot, Fred Cavayé, Alexandre Courtes, Michel Hazanavicius, Éric Lartigau, Gilles Lellouche et Jean Dujardin, ces deux derniers en interprétant chaque fois avec brio les rôles principaux. Loin d'être une apologie du machisme comme auraient pu le laisser supposer les deux affiches à scandale retirées des lieux publics, le film montre au contraire des personnages pitoyables aux prises avec une culture qui les étouffe (TF1). Quant à Mon pire cauchemar de Anne Fontaine avec Isabelle Huppert dans le rôle de la bourgeoise coincée et Benoît Poelvoorde dans celui du prolo rigolo, ses dialogues font mouche, pulvérisant au passage quelques préjugés tenaces sur les rapports de classes (Pathé). Les deux films dégagent même une finesse sur le sujet du sexe que l'on aimerait voir plus souvent dans les drames pesants dont le cinéma français a le secret bien gardé. Saluons encore l'excellence des comédiens, et donc de la direction d'acteurs, qui nous font croire à l'impossible au milieu des éclats de rire.

jeudi 20 septembre 2012

L'appartement, en son absence


Deux films en DVD le même soir. Dans le premier Louise Wimmer, faute d'obtenir un appartement auprès de l'Assurance Sociale, dort dans sa voiture. Dans le second, Bud Baxter fait les cent pas dehors pour avoir prêté le sien à ses patrons qui y amènent leurs conquêtes.

The appartment, en français La garçonnière, est une comédie douce-amère de 1960 réalisée par Billy Wilder qui préfigure le machisme et le cynisme de la hiérarchie à l'œuvre dans la série Mad Men. L'altruisme du héros qui l'empêchait de vivre lui donnera la force de se révolter. Ce n'est pas la plus drôle des comédies de Wilder, mais la tendresse qu'elle dégage tient beaucoup au jeu admirable de Jack Lemmon et Shirley MacLaine (ed. Carlotta).

Autre temps, le nôtre, autre révolte. Cinquante plus tard, Cyril Mennegun signe son premier long métrage de fiction en abordant sans misérabilisme le statut précaire de Louise Wimmer, la cinquantaine, révoltée et intransigeante. Là encore, la comédienne est remarquable, Corinne Masiero incarnant cette femme qui reste digne malgré le moment tragique qu'elle traverse. Un second DVD présente deux autres films de Mennegun, Tahar l’étudiant avec Tahar Rahim et Le Journal de Dominique, plus des entretiens avec le réalisateur et son héroïne (ed. Blaq Out).

Très bonne soirée, au chaud et au sec.

vendredi 7 septembre 2012

Françoise Romand sur UniversCiné


La plateforme UniversCiné offre des centaines de films indépendants en VOD (vidéo à la demande). Cette initiative originale s'agrémente d'un beau travail rédactionnel accompagnant les films à l'image des bonus d'un DVD, proposant photos, articles de presse, entretiens inédits avec les réalisateurs, etc., cela en libre accès, permettant de faire son choix parmi les pépites dont la distribution en salles est souvent négligée. De plus en plus de spectateurs optent pour ce nouveau mode de consommation lorsqu'ils ne sont pas attachés à l'objet physique du DVD.
Ainsi, en juin dernier, Philippe Piazzo et Pierre Crezé ont rencontré Françoise Romand qui évoque en vidéo ses films Mix-Up ou Méli-Mélo, Appelez-moi Madame, Ciné-Romand et Thème Je. Dans un second temps la cinéaste présente six films qu'elle a choisis dans le catalogue UniversCiné : Les Petites Marguerites de Věra Chytilová, Home d'Ursula Meier, Solutions locales pour un désordre global de Coline Serreau, Les Habitants de Alex Van Warmerdam, Adieu, plancher des vaches d'Otar Iosseliani et Satin Rouge de Raja Amari, avec extraits à la clef. Quatre femmes sur les six réalisateurs sélectionnés pour une bonne dose de fantaisie et de saine provocation !

Nouvel entretien mis en ligne le 11 septembre, cette fois sur Thème Je.