Excellente surprise à la projection de Dev.D, treizième adaptation à l'écran de Devdas, roman Bengali de Sarat Chandra Chattopadhyay, qui en a connu une quinzaine depuis 1927, la plus connue en France étant la version hindi de 2002 réalisée par Sanjay Leela Bhansali et sélectionnée alors au Festival de Cannes. Sept ans plus tard, Anurag Kashyap tourne ce nouveau remake en débordant largement les conventions auxquelles Bollywood nous a habitués. En 2012 il réalisera la saga Gangs of Wasseypur, brutale évocation d'une sanglante vendetta.


Si la descente aux enfers est un classique du cinéma indien les provocations à caractère sexuel sont surprenantes pour un genre qui tient plus des Bisounours. Malgré le côté noir du film l'happy end reste de rigueur et les couleurs magnifiques de la photo explosent en cauchemar psychédélique. Quant à la musique signée Amitabh Bhattacharya elle participe à une partition sonore inventive qui dynamise l'action. On est loin du sirop servi par le cinéma américain et ses suiveurs européens. Au son, Kashyap ne craint ni les coupes sèches ni un certain décalage humoristique. Mais ce qui fait le principal intérêt de Dev.D est son portrait sans concession du machisme qui ruine tous les rapports. Les hommes sont lâches, orgueilleux, menteurs, manipulateurs, autoritaires, violents, suicidaires face aux femmes qui tentent désespérément de s'en affranchir. Le film les montre courageuses, solidaires, tolérantes, éprises de justice, et d'une certaine manière révolutionnaires en comparaison de la société patriarcale qui les étouffe. C'est dire si les conventions bollywoodiennes sont bafouées, apportant un supplément d'âme ou de conscience sociale aux amateurs et amatrices du cinéma populaire indien.


Vous trouverez Dev.D en DVD pour une bouchée de naan.
De mon côté, dès les jours prochains je prévois de regarder l'intégrale Kashyap soit Paanch (2003), Black Friday (2004), No Smoking (2007), Return of Hanuman (2007), Gulaal (2009), qui semble prometteuse... Car entre temps j'ai vu That Girl in Yellow Boots (2010) qui m'a captivé, cette fille à la recherche de son père révèle une histoire insensée, plongée noire dans le monde de la prostitution déguisée où la fiction a d'étonnants relents documentaires...