70 Multimedia - novembre 2014 - Jean-Jacques Birgé

Jean-Jacques Birgé

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jeudi 27 novembre 2014

L'oracle DigDeep vous répond par un film muet


Après des mois de travail l'oracle DigDeep conçu par Sonia Cruchon et publié par Les Inéditeurs sort enfin sur iTunes. DigDeep est un oracle contemporain puisant ses réponses dans des extraits de films. À la différence de l’astrologie ou de la divination en ligne, DigDeep invite à chercher en soi l’interprétation de ses réponses. On peut l’interroger en pensant fort à sa question, en l’enregistrant vocalement ou en l’écrivant. DigDeep permet de garder une trace des tirages réalisés, de prendre des notes, ou encore de les envoyer par mail. Mikaël Cixous en a réalisé le graphisme, Mathias Franck l'a programmé et j'en ai composé la musique et l'interface sonore. Les films sont tous extraits des archives de la collection Prelinger.
DigDeep vous aide à y voir plus clair en regardant au fond de vous-même. Il vous donne des pistes de solution, des chemins à prendre, des réponses à vos questions. Mais vous ne y trouverez que ce que vous y mettez… Alors prenez le temps, concentrez-vous pour interroger l’oracle, isolez-vous au besoin. Soyez présent et ouvert à vous-même.


N’hésitez pas à partager vos retours d’expériences sur la page Facebook des Inéditeurs, ou sur l’AppStore. Il existe aussi une version anglaise. Tout cela pour 1,79 € une fois pour toutes ! Et même une page dédiée...

vendredi 21 novembre 2014

Chris Ware Building Stories


À l'approche de Noël les beaux livres s'affichent dans les vitrines. Après La nouvelle encyclopédie de Masse et Outside, quand la photographie s'empare du cinéma, le coffret Building Stories de Chris Ware traduit en français et publié par Delcourt séduira les amateurs de bande dessinée et de livres-objets les plus exigeants. Je me le suis offert pour mon anniversaire et suis loin d'en avoir fait le tour ! Chris Ware a marqué tous les étudiants en art avec le multiprimé Jimmy Corrigan (1995-2000), un petit livre très épais nécessitant de bonnes lunettes pour en apprécier tout le suc. Le grand format ACME (2007, toujours chez Delcourt) m'avait tout autant enthousiasmé par la précision du dessin et l'enchevêtrement des narrations.
Building Stories enfonce le clou en laissant le lecteur tracer son chemin parmi les 14 fascicules de tailles différentes contenus dans le grand coffret cartonné. Libre à chacun de construire le récit de la vie de cet immeuble où les questions familiales peuvent sembler étouffantes. Chris Ware raconte ses histoires de manière morcelée, souvent énigmatiques, comme des séances de psychanalyse. Au troisième étage la locataire est une femme qui a perdu une jambe dans son enfance lors d'une promenade en bateau. Au second un couple passe son temps à se chamailler et au premier réside la propriétaire âgée. La femme du troisième revoit sa vie, se considérant comme une artiste ratée, devient mère, desperate housewife regrettant son premier amour qui l'a quittée après un avortement. L'histoire est évidemment beaucoup plus complexe et abracadabrante, marquée par l'influence de Marcel Duchamp et de sa Boîte-en-valise, construction savante de pertes qui me rappelle la sublime introduction de l'opéra Lost Objects de Bang on a Can. Perte de foi, perte d'amour, perte d'argent, perte de poids, perte d'un membre, perte de mémoire, perte de sens...
Chris Ware rejette les tendances actuelles de la bande dessinée trop influencée à son goût par le cinéma et le roman-photo. Ses cadres sont dictés par la typographie. Ses narrations sont circonlocutoires, souvenirs reconstruits d'une époque à moitié oubliée. Le rêve y est aussi réel que les faits. Seul vaut leur interprétation. Chris Ware préfère se référer à Windsor McKay, Joseph Cornell et aux comics des années 50 pour avancer dans son œuvre si méticuleuse qu'elle peut paraître froide avant que l'on y pénètre sérieusement. Comme Crumb avec sa collection de 78 tours de vieux blues il vit dans le monde musical des ragtimes qui marquent la structure angulaire de son jeu de cubes. Cette nostalgie du temps passé résonne avec sa quête généalogique qu'il recompose dans une forme résolument contemporaine. Pathétique, son humour est forcément pince-sans-rire.
Building Stories est à double sens. Ce sont les histoires d'un petit immeuble livrées au lecteur pour qu'il se les construise à sa guise. C'est au nombre de ses interprétations que se révèle un chef d'œuvre.

→ Building Stories, Chris Ware, Delcourt, 69,50€

jeudi 20 novembre 2014

*di*/zaïn 18 à l’Imaginarium de Tourcoing


Ce jeudi soir je présente quatre des productions des Inéditeurs à l'Imaginarium de Tourcoing. La plasticienne Marie Lelouche, les graphistes Malte Martin, Stefan de Vivies, Nicolas Millot, les designers d'animation Fafah Togora & Sephy Ka participent également à ce *di*/zaïn 18 organisé par les Designers Interactifs. La soirée est retransmise en direct sur Dailymotion à partir de 19h. Chaque présentation dure 10 minutes et je passe en dernier !
Après La machine à rêves de Leonardo da Vinci que j'ai créée avec Nicolas Clauss et mon second roman augmenté USA 1968 deux enfants, paraît enfin DigDeep, l'oracle imaginé par Sonia Cruchon. Je présenterai aussi Boum (ex Au boulot), roman graphique horizontal de Mikaël Cixous qui vient de recevoir la Bourse Pollen du Salon du Livre de Jeunesse de Montreuil.
Les quatre œuvres ont toutes été conçues pour iPad, ce qui facilitera les connexions ! Si je suis l'auteur de deux des applications, mes compétences sonores et musicales sont sollicitées pour l'ensemble, y compris les futurs projets en cours en collaboration avec d'autres créateurs. Composition musicale interactive pour cordes (avec entre autres le violoncelliste Vincent Segal) sur La machine à rêves, films et inserts audio de USA 1968 jouant des pauses au sein du récit romanesque, habillage sonore discret de DigDeep, sonorisation interactive de Boum, mes interventions sont toujours différentes, appropriées à la variété des œuvres audio-visuelles éditées. Chaque publication des Inéditeurs débute avec une couverture interactive : couvercles grinçants de Leonardo, light-show d'USA, glissements symphoniques de l'oracle, etc. Dans le passé j'avais raconté Alphabet, Machiavel, Nabaz'mob, Fluxtune, Leonardo... Voulant montrer quelque chose de récent, j'ai choisi les productions des Inéditeurs, la collaboration avec les Éditions Volumiques étant encore trop embryonnaire et la sonorisation des films 3D de Platform essentiellement hyper-réaliste. Quant aux transports du Grand Paris je suis contractuellement tenu au secret ! Pour le reste des évènements se reporter à la colonne de droite...

P.S. : j'interviens à 1h25 du début de l'émission mise en ligne sur DailyMotion !

lundi 17 novembre 2014

La nouvelle encyclopédie de Masse


Si vous cherchez une bande dessinée dont le dessin, le texte et le scénario sont originaux, entendre qu'il ne ressemble qu'à lui-même, Francis Masse est l'égal de Chris Ware, Joost Swarte ou Art Spiegelman. Si vous cherchez un ouvrage qui ne se lit pas en dix minutes, mais que l'on prend le temps de savourer tant la densité intellectuelle est au niveau de son humour et que les images sont si soignées qu'on y passerait des heures, les Éditions Glénat (coll. 1000 Feuilles) viennent de publier la Nouvelle Encyclopédie de Masse. Si l'artiste fait déjà partie de votre panthéon, sachez que presque tout est nouveau dans ce grand livre de 312 pages. Masse a redessiné les planches, réécrit les dialogues, ajouté quantité d'inédits, inséré de magnifiques photographies couleurs de ses sculptures métalliques, et son œuvre n'en apparaît que plus incontournable dans le paysage graphique français. Passé par Métal hurlant, (À suivre), Actuel, Hara Kiri, Charlie Hebdo, L'Echo des Savanes et Fluide glacial, il m'enchante depuis 40 ans jusqu'à m'avoir inspiré dans ma propre musique.
Chez Masse l'absurde réfléchit la réalité de la science, domaine poétique des questions sans réponse, humour des chercheurs, précision des rêveurs. S'il aborde de manière inimitable les grandes questions de l'humanité, cosmiques et métaphysiques, sociales et philosophiques, scientifiques et artistiques, son regard est toujours décalé, comme s'il nous regardait depuis une autre planète. Si nous marchons sur la tête, Masse retourne le cadre et croque ce qu'il aperçoit dans son périscope à l'envers. À coups de hachures et de traits noirs ils dessine des personnages à gros nez immergés dans des gravures rappelant Gustave Doré ou Pierre-Jules Hetzel. Les entretiens pataphysiques évoquent d'ailleurs la MRE., Macro-Rhino-Épistémologie. Avec le tome 2 : n-z qui paraîtra le 7 janvier 2015 vous tiendrez entre vos mains la somme indispensable à toute encyclopédiste digne de ce nom, barjitude oblige ! Il ne manque que les films d'animation dont je n'ai plus qu'un vague souvenir ; j'avais été emballé comme un cadeau de Noël, avec le ruban et les battements de cœur précédant la découverte de l'inconnu...


Parallèlement, L'Association édite Elle, petit fascicule de 90 pages où Masse semble rendre hommage à Copi, autre adepte de la MRE. Un petit bonhomme à béret emprisonné par son fauteuil le détourne de cent façons pour évoquer sa condition d'assassin présumé...