Lindsay Cooper s'est éteinte le 18 septembre. Je l'avais découverte au Théâtre des Champs Élysées en 1975 avec Henry Cow et Robert Wyatt. Corinne Léonet me l'avait présentée en 1994 lorsque nous avons réalisé le disque Sarajevo Suite. Lors des séances à Londres, Lindsay semblait fragile. Elle n'avait pas encore révélé la sclérose en plaques qui allait l'affecter terriblement. Elle avait choisi Nightmare comme poème d'Abdulah Sidran à mettre en musique et demandé à Phil Minton de le chanter avec Dean Brodrick aux claviers et Brian Abrahams à la batterie. Il lui manquait un percussionniste au marimba et surtout un joueur d'ondes Martenot. Je lui avais proposé Gérard Siracusa et Thomas Bloch. Nous avons enregistré ce cauchemar au studio The Premises. Lindsay jouait évidemment du basson, elle interprétait également le rôle de la mère et tenait le synthétiseur. Elle avait enregistré la voix d'Ademir Kenovic sur son répondeur. Cette pièce magnifique fut rééditée sur son dernier album, A View From The Bridge, et sur un disque de Thomas, et lorsqu'elle fut créée au Cargo à Grenoble le 30 novembre 1994 dans le spectacle que j'avais mis en scène pour les 38e Rugissants, l'orchestre la développa merveilleusement en improvisant. Gérard était cette fois à la batterie et Thomas avait apporté en plus son cristal Baschet.


Son quintet succédait à la projection du Sniper et clôturait en beauté cette longue soirée. Je garde un souvenir ému de notre collaboration. Nous la savions malade. Les nouvelles alarmantes nous étaient parvenues plus d'une fois. Lindsay était une musicienne exigeante et tendre à la fois, elle pratiquait un instrument rare et contribua à donner au basson des perspectives contemporaines qui ouvriront la voie à de nouvelles expériences.